A quelques jours de l’audience qui devait avoir devant la cour de justice de le République, Noël Le Graët, par la voix de son avocat a annoncé retirer sa plainte pour diffamation contre l’ancienne ministre des Sports. Invitée dans l’émission Sport etc, Amélie Oudéa-Castéra réagit en exclusivité à cette annonce au micro d’Anne-Laure Bonnet.
Appel de Fabien Roussel à envahir les préfectures : « Une volonté de concurrencer Jean-Luc Mélenchon »
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Fabien Roussel appelle les Français à « envahir les préfectures, les grandes surfaces, les stations essence », notamment pour inciter le gouvernement au blocage des prix. Il dit à nos confrères de franceinfo : « On se fait racketter, voler, plumer comme de la volaille ». Qu’est-ce que vous évoque cette attitude ?
Au-delà de la surprise sur la forme, sur le fond, il y a une volonté évidente de concurrencer Jean-Luc Mélenchon, d’être capable d’intéresser, de sensibiliser les populations en colère, les anciens Gilets Jaunes et les personnes victimes de l’inflation. Ce n’est pas la première fois qu’il lance ce genre d’appel à la mobilisation, il l’avait déjà fait en 2021 sur la flambée des prix de l’énergie. Mais il n’employait alors pas le terme « envahir ».
Jusqu’à l’heure, Fabien Roussel était une figure médiatique installée qui a pu sembler figée dans une certaine modération vis-à-vis du système médiatique et des pouvoirs en place. Là en lançant cet appel, il fait un pas de côté, il tente d’envoyer un message politique pour se démarquer de la gauche.
Est-ce qu’il représente le Parti communiste avec ces propos ou est-ce une initiative personnelle ?
Si les liens entre le PCF et Fabien Roussel ont pu être compliqués par le passé, il a su instaurer une forme d’autorité, notamment grâce à l’élection présidentielle de 2022. Sa candidature a marqué. (Ndlr : Bien qu’il n’ait recueilli que 2,3 % des suffrages.) Par ailleurs, on sait qu’il y a toujours un décalage entre d’un côté le charisme des leaders politiques qui jouent le jeu du buzz, et de l’autre les organisations politiques en interne. Il joue la carte de la visibilité, du retentissement médiatique. C’est de la communication pure.
Fabien Roussel « précise être un « partisan de l’action non-violente » qui appelle à la « légitime défense » face à l’inaction du gouvernement. Envahir des institutions n’est pas sans rappeler l’incendie de la préfecture du Puy-en-Velay (Haute-Loire), lors des évènements des Gilets jaunes, en décembre 2018. Est-ce dangereux pour vous d’appeler à l’insurrection ?
C’est assez paradoxal puisqu’il a plutôt l’image de celui qui joue le jeu des usages républicains. Or, là il n’est plus du tout dans la tradition de l’ordre qu’il a l’habitude de suivre, par exemple avec des propos plutôt favorables sur la police, contrairement à Jean-Luc Mélenchon. D’ailleurs cette fois, l’ancien leader de La France Insoumise a dénoncé « une initiative violente » de la part de Roussel. On sent qu’il chasse sur ses terres. Cette stratégie peut avoir un effet négatif et créer de l’incompréhension. Il veut se défaire d’une armure qu’il a participé à construire, car il s’aperçoit qu’elle l’empêche d’attirer un certain type d’électeurs vers le parti communiste, notamment les délaissés de la politique.
Ses positions divergent du reste de la gauche ; « il fait l’éloge des traditions ou de la souveraineté de la France », des thématiques habituellement portées par la droite. Sur l’écologie aussi, il tient des propos qui peuvent étonner. Peut-on dire que c’est un candidat de gauche à contre-courant ?
Pour l’heure à gauche personne n’est d’accord. Tout n’est pas encore bien calé pour les prochaines élections, d’autant que chaque leader joue son rôle. En revanche, son positionnement est assez conforme à celui du parti communiste et à son histoire. Je dirais même qu’il est presque orthodoxe puisque le souverainisme a longtemps été porté par le PCF. Cette posture complique d’ailleurs leur conversion à l’écologie, notamment en ce qui concerne le nucléaire. Sur ces thématiques, Fabien Roussel reste cohérent, il est plutôt dans une forme de continuité qu’il avait déjà incarnée lors de la présidentielle de 2017 : celle de « la France heureuse des années 1970 ».
Ce week-end, à l’occasion de la Fête de l’Humanité, qui se déroule au Plessis-Pâté (Essonne), le secrétaire national du PCF tiendra un débat avec Édouard Philippe. Comment qualifiez-vous cette stratégie ?
Dans certains réseaux républicains, il y a une reconnaissance des adversaires. C’est le cas de Fabien Roussel, qui est reconnu par une certaine partie de la droite comme étant un républicain. N’oublions pas qu’ils se rendent mutuellement service en occupant l’espace médiatique. Ce sont deux acteurs politiques très forts. Alors que le jeu est incertain et très ouvert depuis au moins 2017, et la candidature d‘Emmanuel Macron, tout est à surveiller.
En acceptant ce débat, Fabien Roussel souligne l’importance « de maintenir un rapport gauche droite » dans le pays afin de présenter « deux projets de société différents ». C’est ce qu’ils représentent l’un et l’autre : l’ancien clivage gauche-droite qui n’aurait jamais disparu ?
Edouard Philippe a certes été fléché à droite auparavant, mais en devenant le Premier ministre d’Emmanuel Macron, il se situait lui aussi en dehors du clivage gauche droite. Et aujourd’hui, il n’est plus chez Les Républicains, ni chez Renaissance. Comment se situera-t-il pour la présidentielle de 2027 ? Son parti Horizons sera-t-il suffisamment implanté dans le paysage politique pour convaincre les Français ? Cela va dépendre de la configuration du jeu à ce moment-là. Quant à Fabien Roussel, il n’est pas le seul fermement ancré à gauche, Olivier Faure, le Premier secrétaire du parti socialiste, l’est aussi. Ils sont présidentiables parmi d’autres.
On dit d’Edouard Philippe qu’il serait le candidat favori à droite, et de Fabien Roussel qu’il est l’homme de gauche préféré des sympathisants de droite. Qu’en pensez-vous ?
Oui tout à fait, de par les thématiques mises en avant par Roussel, notamment la souveraineté, il a un écho favorable à droite et dans une certaine élite journalistique. Mais il faut faire attention car à chaque fois qu’un candidat de gauche est apprécié de la droite, c’est préjudiciable pour la gauche. On se souvient de la Chiraquie qui vantait les mérites d’Arlette Laguiller et de Pierre Chevènement, en 2002. Résultat ? Sa candidature a été l’une des raisons qui ont contribué à la défaite de Lionel Jospin.
Chacun s’éloigne des forces majoritaires. Roussel dit non à l’union avec la NUPES, il l’a d’ailleurs rappelé devant des militants, lors de cette première journée de la Fête de l’Humanité. C’est un problème récurrent, les militants et sympathisants de gauche appellent à un certain rassemblement, mais les organisations et les leaders ne sont pas sur la même ligne.
Propos recueillis par Emilie Balla.