Stress post-traumatique chez les soldats : « Une fois qu’on est sortis de l’institution, on est totalement seuls »

Stress post-traumatique chez les soldats : « Une fois qu’on est sortis de l’institution, on est totalement seuls »

Chez les militaires, le stress post-traumatique n’est plus un tabou. Mais la réinsertion et la prise en charge de ces hommes et de ces femmes brisés par la guerre posent toujours problème. Comment retrouver sa place dans la société civile lorsque l’on a été confronté au pire ? L’armée accompagne-t-elle suffisamment ses soldats dans leur vie d’après ? Des questions auxquelles tentent de répondre les invités de Jérôme Chapuis, dans Un Monde en Docs.
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Par Hugo Ruaud

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C’est un mal invisible souvent méconnu, qui touche de nombreux soldats de retour de mission. Des soldats que l’on dit blessés, mais dont le sang n’a pas coulé, et qu’il est donc plus compliqué d’identifier, puis de diagnostiquer. Pourtant, le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est bien présent, palpable même, pour les militaires et leur famille qui en sont victimes : « Au quotidien, on a un intrus dans la famille, on est obligés de vivre avec, et tout le monde subit » décrit Carine Chauvel, dont le mari fut blessé en Afghanistan, en 2008. Alors que faire, face à ce fléau désormais reconnu ? Familles, associations, armée, chacun des acteurs, à son échelle, tente d’accompagner les blessés, non sans difficulté. 

De l’importance d’un diagnostic précoce

Reconnue seulement à partir de 2013 par l’institution militaire, la prise en charge du SSPT est encore difficile, au détriment des soldats qui se sentent parfois abandonnés : « Une fois qu’on est sorti de l’institution, on est totalement seul » témoigne Marc Staszac, militaire blessé en mission. Ces dernières années l’armée a pourtant pris conscience du problème selon le médecin chef Virginie, qui insiste sur l’importance d’un point en particulier : « La précocité du repérage de cette souffrance est déterminante. Les plans d’action qui ont été mis en œuvre permettent de structurer un véritable parcours de soins dès l’événement traumatique, où la personne est prise en charge par des psychiatres présents sur le terrain, au Mali par exemple ».

« Je ne l’avais pas vu sourire depuis six ans »

Est-ce suffisant pour autant ? « On attend beaucoup de l’institution militaire, mais sur ce sujet, ce n’est pas simple. Pour ce type de blessure, il est bon, aussi, qu’il y ait des intervenants qui ne soient pas de l’armée » plaide l’ancien sénateur Jean-Marie Bockel, aujourd’hui président de l’association Solidarité Défense. Ce dernier insiste sur l’importance d’articuler la prise en charge des soldats avec des associations, « qui peuvent compléter le rôle de l’institution militaire ».

Une idée corroborée par le témoignage de Carine Chauvel : « En 2014, on a découvert l’association Ad Augusta, et mon mari y a fait un stage. À ce moment-là, c’était très compliqué, il était en hypervigilance, j’étais très inquiète. Et puis il a fait le stage, en intégralité. Quand je suis allée le récupérer, je ne l’avais pas vu sourire depuis six ans, et là je l’ai trouvé en train de plaisanter avec d’autres blessés. Ça a été un rayon de soleil, qui m’a donné de la force. Depuis, l’association l’accompagne ».

Des associations de soutien aux militaires, qui aident donc à se reconstruire, à retrouver une forme de sérénité, de stabilité, et l’envie d’avancer. Reste que cette « complémentarité » avec l’armée peut paraître déséquilibrée. Est-ce vraiment aux associations de prendre en charge les blessés ? Pour Marc Staszak, le constat est amer : « On m’a envoyé au combat. L'État m’a envoyé au combat, et aujourd’hui, ce sont des associations qui s’occupent des blessés ».

Le débat sur le stress post-traumatique des soldats est en replay ici

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