Un jour de deuil national aura lieu, lundi 23 décembre, en hommage aux victimes du cyclone Chido qui a dévasté l’archipel la semaine dernière. A 11 heures, tous les Français seront notamment invités à se recueillir.
Répression en Iran : que peuvent faire les pays occidentaux ?
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L’Iran est le théâtre d’une incroyable rébellion depuis le 16 septembre et la mort de Mahsa Amini, 22 ans, arrêtée par la police de la moralité pour « port de vêtements non appropriés ». Ces révoltes, de la part de jeunes, de femmes, d’étudiants, sont tournées contre le régime des mollahs et la théocratie en place depuis 1979. Le régime impose un contrôle très strict des comportements des femmes, leur interdisant de sortir à tête découverte dans la rue. Les images des révoltes sévèrement réprimées, où l’on voit des femmes, jeunes et plus âgées, enlever et brûler leur voile, ont ému la France et le reste des pays occidentaux. Des manifestations de soutien ont eu lieu dans nombre d’entre eux : en France, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Turquie, au Liban, au Brésil, au Chili, …
Des forces de sécurité qui tirent « à balles réelles » sur les manifestants
La gronde est durement réprimée par le régime iranien, les forces de sécurité tirant « à balles réelles » sur les manifestants, selon Fanny Galois, responsable du programme Libertés à Amnesty France. Les chiffres fiables sont difficiles à obtenir. Amnesty International a pu confirmer la mort de 30 personnes dont 4 enfants, « mais on pense qu’il y en a plus », précise Fanny Galois. L’ONG Iran Human Rights, elle, dénombre le 26 septembre 76 morts, chiffre repris par l’AFP. L’agence de presse estime par ailleurs que plus de 1 200 personnes ont été arrêtées depuis le début du conflit. De leur côté, les autorités iraniennes annoncent la mort de 41 personnes, manifestants et forces de l’ordre compris, et l’arrestation de plus de 1 200 manifestants.
Des réactions internationales qui se font attendre
Si la situation a fait bondir la société civile de nombreux pays dans le monde, via des vidéos sur les réseaux sociaux, les réactions se sont fait attendre du côté des gouvernements des puissances occidentales. Lors de son entrevue avec le président iranien, en marge de l’Assemblée Générale des Nations Unies le 20 septembre, Emmanuel Macron n’avait que brièvement abordé la situation des droits des femmes en Iran.
C’est le 25 septembre, soit près de dix jours après le début des manifestations, que l’Union Européenne, par communiqué, a jugé « inacceptable » l’usage « disproportionné de la force » par les autorités iraniennes. La diplomatie française a réagi le 27 septembre par un communiqué du ministère des Affaires étrangères exprimant sa « condamnation la plus ferme » de la répression iranienne. Pourquoi les pays européens et la France ont-ils attendu dix jours pour réagir face à ce qui semble être une violation des droits sur lesquels ils sont bâtis ?
« Les déclarations ne suffisent plus, elles déclenchent même une frustration face à l’incapacité de la communauté internationale »
Quand on lui pose la question, Bernard Hourcade, géographe, directeur de recherches émérite au CNRS et spécialiste de l’Iran, auteur de Iran. Paradoxes d’une nation (Presses du CNRS, 2021) répond : « Parce que les événements de ce type-là arrivent tous les jours, en Iran et dans le reste du monde. Pourquoi viser l’Iran et pas la République démocratique du Congo ou l’Arabie saoudite ? ». Pour lui comme pour Fanny Galois d’Amnesty France, les communiqués sont nécessaires sur le plan moral, mais loin d’être suffisants. « Les condamnations sont formelles, mais est-ce que cela fait avancer la cause des manifestants ? Pour l’Iran, c’est plutôt le contraire. Même si moralement, ces communiqués sont importants », explique Bernard Hourcade. Pour Fanny Galois, « les déclarations ne suffisent plus, elles déclenchent même une frustration face à l’incapacité de la communauté internationale, car ce n’est pas la première fois que cette situation a lieu en Iran ». En 2019, lors de la rébellion des Iraniens contre les prix de l’essence, la répression des forces de sécurité de l’Etat iranien avait fait entre 230 et 300 morts.
« Nous avons appelé assez rapidement à la mise en place d’un mécanisme d’enquête indépendant de l’ONU », explique Fanny Galois. Pour Amnesty, les pays occidentaux se doivent de faire la lumière sur les circonstances de la mort de Mahsa Amini, mais également sur la répression qui a lieu depuis. L’organisation a lancé une pétition en ligne pour faire pression sur les Etats et les enjoindre de mettre en place cette enquête.
« Il faut prendre des mesures à l’issue de cette enquête pour que les responsables puissent être punis et que cela ne se reproduise plus », continue Fanny Galois. « On assiste à une totale impunité des forces de sécurité et des autorités sur ces répressions, et des répressions en général ».
« La clé pour résoudre la situation en Iran est l’ouverture économique »
Condamner ne suffit pas, il faut aussi enquêter. Mais quelles mesures prendre ? Que faire pour calmer la situation hautement inflammable du pays ? Pour Bernard Hourcade, la solution réside dans la signature de l’accord sur le nucléaire iranien. Initié en 2015 par Barack Obama, il prévoit d’encadrer le nucléaire iranien en échange de la levée des lourds embargos mis sur le pays par les Etats-Unis. Sa signature a été mise à mal par Donald Trump en 2018 et piétine depuis.
« La clé pour résoudre la situation en Iran est l’ouverture économique », explique-t-il. « Les mollahs craignent que le jour où l’accord sur le nucléaire sera signé et les sanctions levées, un afflux d’entreprises et de fonds étrangers n’arrive sur le territoire iranien. Il y aurait donc des Françaises, des Australiennes, des Américaines en Iran. Est-ce qu’on peut imposer le port du voile à ces étrangères ? Peut-on mettre en prison la directrice générale de Renault Iran car elle n’a pas porté le voile ? A ce moment-là, la question du voile se serait posée dans la réalité, dans tout l’Iran ». Pour Hourcade, c’est une des raisons pour lesquelles l’Iran s’attache à ralentir les négociations sur l’accord, en demandant l’inclusion de clauses toutes aussi farfelues les unes que les autres. « Des deux côtés, il faut arrêter de jouer les matamores », conclut Hourcade.
En attendant que l’accord ne soit signé et que la pétition d’Amnesty n’aboutisse, il ne reste plus qu’à garder le regard tourné vers l’Iran et ce qui s’y passe, pour que la répression iranienne ne se referme pas sur la « petite mèche allumée par la mort de Mahsa Amini », d’après les mots de Bernard Hourcade.