La vision d’une élite. « Brandir la carotte du TGV, du théâtre ou du restaurant est un raisonnement de classe favorisée, inadapté pour beaucoup de publics âgés, précaires, marginalisés. » Avec ces mots, la philosophe Barbara Stiegler, autrice de l’ouvrage « De la démocratie en pandémie » (édition Gallimard, collection Tracts, 2021) décrit pourquoi le passe sanitaire n’est pas une solution en période de pandémie. Dans cette tribune, publiée dans Libération, elle réussit à faire signer le député François Ruffin (LFI), François-Xavier Bellamy (LR), mais également les sénateurs Loïc Hervé (Union centriste) et Stéphane Artano (RDSE). A leurs côtés, des soignants et des citoyens.
« Les éternels oubliés »
« Nous, soignants, acteurs et chercheurs en santé, nous parlementaires et élus, nous citoyens, appelons au retrait du « passe sanitaire » car il transgresse les principes fondamentaux de l’éthique biomédicale et du droit des personnes. », écrivent-ils avant d’ajouter : « Dépassé, le gouvernement choisit d’imposer une vaccination tous azimuts en faisant montre d’autorité, qui laisse de côté les éternels oubliés et arrose le reste de la population. Ainsi, le vaccin est érigé en remède miracle pour pallier l’absence de stratégie de santé publique. »
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« Cette tribune m’a été proposée par Barbara Stiegler, précise le sénateur Loïc Hervé. A titre personnel, je suis favorable à la vaccination, mais il est nécessaire de mieux cibler les publics. » Pour lui, le problème vient du fait que peu de mesures sont mises en place pour aller à l’encontre des publics les plus fragiles mais aussi les plus précaires.
Egalité des droits et accès à l’éducation
L’Académie de médecine avait aussi tenté d’alerter sur la nécessité d’inclure tous les publics tout en portant « une attention particulière aux plus démunis et aux moins visibles » comme les populations migrantes.
Pour les signataires de cette tribune, ne pas avoir réussi à vacciner les plus précaires et les plus éloignés des soins pose un vrai problème d’égalité des droits dans l’accès à l’éducation ou au travail. Le passe sanitaire est aussi nécessaire pour les personnes qui ont des rendez-vous médicaux ou qui accompagnent des personnes à l’hôpital, dès lors que cela n’entrave pas l’accès aux soins d’urgence.
« Contraindre une population dans ses libertés du quotidien parce qu’elle n’est pas vaccinée est contre-productif », ajoute le sénateur.
Ce passe sanitaire, en grande partie validé par le Conseil constitutionnel, doit être en vigueur jusqu’au 15 novembre, dans l’état actuel du droit.