Le Mexique est le premier pays consommateur de Coca-Cola dans le monde et représente à lui seul plus de 40% des ventes de la marque en Amérique du Sud. Diabète, obésité, hypertension mais aussi assèchement de certaines régions, les conséquences négatives pour le pays sont nombreuses. Julie Delettre, réalisatrice de : « Mexique, sous l’emprise du coca » témoigne de cette implantation, aux airs de « colonisation ».
Par Beatrix Moreau
Temps de lecture :
6 min
Publié le
Mis à jour le
En 1994, la signature de l’ALENA, le traité de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, offre une occasion à la multinationale Coca-Cola de s’implanter sur le continent Sud-Américain. Depuis, son importance ne cesse de croître sur le territoire mexicain, entraînant par là même de lourdes conséquences pour la population (https://reporterre.net/Au-Mexique-la-population-manque-d). La production de cette boisson sucrée pétillante, très gourmande en eau, contribue à assécher le pays tandis que sa sur consommation fait des ravages sur la santé des habitants qui peinent pourtant à se détacher de son emprise.
Au Mexique le coca est devenue une boisson sacrée
Julie Delettre
Votre documentaire s’ouvre sur un rite religieux incluant le Coca-Cola, la boisson est-elle devenue quasi sacrée pour cette population ?
Exactement. Le rituel en question est exécuté par des Mayas Tzotziles du village de San Juan Chamula. D’après le maître de cérémonie, ils considèrent effectivement la boisson comme sacrée, elle permettrait notamment d’exorciser les démons intérieurs, en rotant, tout simplement. Elle participe aux cérémonies de guérison, de baptême, de naissance, de mariage, au cours desquelles ils boivent également un alcool fort, qu’ils associent à présent avec le Coca. La couleur de la boisson, le fait qu’elle pétille, la sensation de coup de fouet après l’avoir bue les a amenés à considérer qu’elle les rendait plus fort. La famille que j’ai suivie, par exemple, considère que le Coca ne leur a apporté que du bien, qu’il est même capable de les guérir. Quand je leur ai fait remarquer que ce n’était pas forcément bon pour la santé, ils m’ont répondu : « Ca c’est des mensonges de journalistes ».
Au Mexique le long des routes les échoppes sont repeintes aux couleurs de Coca-Cola
Quelle est la stratégie menée par Coca pour s’imposer au Chiapas, l’un des états les pauvres situés dans le sud du Mexique ?
Le Coca-Cola est moins cher dans cette région, c’est une stratégie de la marque pour pouvoir s’implanter dans les villages assez reculés : vendre plus mais à moindre coût. Ils veulent être sûrs de pouvoir atteindre les familles les plus pauvres qui vont dépenser leurs moindres pesos là-dedans. La firme a colonisé la région en y installant un de leurs plus grandes usines de la région, à San Cristobal et en créant des zones de distribution d’où partent des camions livrant les terres les plus reculées. Aussi, elle a proposé aux petites échoppes qui longent toutes les routes de la région de leur faire « une jolie déco », en les repeignant en blanc et rouge afin qu’elles soient plus visibles. Elle leur a aussi donné des tables et des chaises en plastique Coca pour que les gens « puissent s’asseoir et consommer plus ». Grâce à cette stratégie marketing, la région entière est repeinte en rouge et blanc. Il est difficile d’échapper visuellement à Coca, et donc difficile de ne pas en boire. Quand on parle de « colonisation », ce n’est vraiment pas un terme si fort que ça.
Au Mexique 70% de la population est en surpoids, l’une des nutritionnistes interviewées estime que la prochaine génération pourrait mourir avant 30 ans à cause de la consommation de Coca-Cola, le constat est-il si grave que ça ?
Oui, elle est alarmante sur cette question car les taux de diabètes, d’hypertension et le nombre de maladies cardiaques augmentent. Les enfants sont biberonnés au Coca, avant même d’avoir des dents…c’est impensable. A une époque la situation était d’ailleurs dramatique dans les écoles mais depuis une politique publique a été mise en place. La vente de Coca est devenue interdite au sein des établissements, les enfants reçoivent des cours de nutrition, il y a des cours de sports renforcés des femmes sont invitées à cuisiner et à vendre leurs plats aux élèves pour leur déjeuner. Il y a une volonté de lutter contre cette « malbouffe ». Après, vous faites deux pas en sortant de l’école, vous avez des vendeurs de Coca partout, tout ce qui est fait à l’intérieur de l’école est ruiné en deux secondes quand vous sortez.
Les mères donnent du Coca cola à leurs enfants dés le plus jeune âge
Vous mettez aussi en lumière le manque d’eau dans certaines régions, est-ce que c’est une question politisée au Mexique ?
Oui, car le problème touche globalement tout le pays. Les politiques publiques pour assainir les réseaux d’eau sont totalement inexistantes, ce qui se traduit par une absence d’eau potable dans les régions reculées. Au Chiapas, il y a une réserve aquifère au pied du volcan Huitepec mais l’usine Coca-Cola s’y est installée pour puiser le plus possible, elle est en effet très gourmande : pour 1L de Coca, il faut 6L d’eau. Ils ont reçu l’autorisation de la Commission Nationale de l’Eau pour pomper 500 millions de litres d’eau par an ! Cela assèche les villages alentour, ceux raccordés au réseau n’ont plus rien au robinet et ceux habitués à vivre de l’eau des puits les voient se vider de plus en plus. Il y a eu des contestations quand l’usine a ouvert en 1994 mais au Mexique c’est un peu compliqué… un des intervenants m’a expliquée que le mouvement avait été vivement réprimandé et qu’il y avait eu des disparitions un peu mystérieuses. Je n’en ai pas la preuve, mais ce sont le genre d’histoires qui se racontent.
Depuis que Coca-Cola a installé sa plus grande usine à San Cristobal, ses habitants manquent de plus en plus d’eau, comment appréhendent-ils l’avenir ?
On sent une forme de résignation, un poids qui s’abat sur ses gens sans qu’ils puissent faire grand-chose… J’ai trouvé tout ça assez triste. Il n’y a pas beaucoup de messages d’espoir là-dedans.
La délégation aux droits des femmes du Sénat organisait une matinée de débat autour de l’opportunité d’introduire la notion de consentement dans la définition pénale du viol. Pour la majorité des intervenants, cette notion est partout dans l’enquête et dans la procédure, sauf dans la loi.
Suite à trois recours déposés contre le choc des savoirs, dont un par la sénatrice écologiste Monique de Marco, le rapporteur public du Conseil d’Etat demande d’annuler la mise en place des groupes de niveau au collège, soit le cœur de la réforme portée par Gabriel Attal. S’il faut encore attendre la décision du Conseil d’Etat, son avis pourrait être suivi.
Une large majorité de la chambre haute s’est opposée au texte de Samantha Cazebonne, visant à interdire la corrida et les combats de coqs aux mineurs de moins de 16 ans. La proposition de loi était pourtant soutenue par des élus de tous bords, ravivant le clivage entre défenseurs de la cause animale et protecteurs des traditions locales.
Ce mardi, Marie-Arlette Carlotti, sénatrice socialiste des Bouches-du-Rhône, était invité de la matinale de Public Sénat. Membre de la commission d’enquête sur le narcotrafic, elle est revenue sur les mesures présentées vendredi dernier par Bruno Retailleau et Didier Migaud dans le cadre de leur plan de lutte contre le trafic de drogue.