Joël Labbé, auteur de la loi du même nom de février 2014, encadrant l’utilisation des produits phytosanitaires en France, propose d’élargir cette loi à tous les pays de l’Union européenne.
Depuis le 1er janvier 2017, en vertu de la loi Labbé, l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics ne peuvent plus utiliser de produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts, des forêts ou de la voirie. La vente des produits phytosanitaires pour les particuliers sera également interdite, à compter du 1e janvier 2019.
« Il subsiste quelques exceptions à la loi, a expliqué Joël Labbé, lors d’un point presse au Sénat, mardi. Les stades, les cimetières, les voiries dangereuses ont été exclues du périmètre de l’interdiction. Le Parlement a souhaité ne pas interdire trop brutalement les usages sur ces espaces. »
Les produits phytosanitaires pointés du doigt par l’OMS et l’ONU
Sophie Bordères, responsable de la semaine pour les Alternatives aux Pesticides, à l’association Génération future, a rappelé mardi que, selon un rapport de l’OMS, « le coût humain de la pollution environnementale s’élève à 1,7 millions de décès chez les enfants de moins de 5 ans. » En outre, l’ONU a critiqué, dans un rapport, le recours massif aux pesticides.
L’enjeu des produits phytosanitaires est triple. Il existe un danger sanitaire - « les dangers dermatologiques et respiratoires d’une exposition aiguë à ces produits sont aujourd’hui connus » peut-on lire dans la proposition de résolution présentée par Joël Labbé, un danger environnemental, du fait de la contamination des eaux entraînée par les produits phytosanitaires, et un danger économique. En effet, les effets positifs de la biodiversité sont considérables : « pour les seuls pollinisateurs, domestiques et sauvages, lit-on dans la proposition de Joël Labbé, on estime la valeur économique de la pollinisation à 153 milliards d’euros par an ».
« Ce que l’on sait moins, c’est que l’on retrouve des pesticides dans l’air des villes également, loin des zones d’épandage. Ce n’est pour le moment que très peu surveillé » a par ailleurs souligné le sénateur du Morbihan.
« Une réelle prise de conscience en France »
Selon Sophie Bordère, « 83 % des Français sont favorables à l’instauration de zones sans pesticides, d’après un sondage réalisé en septembre 2016 pour Générations futures. » Joël Labbé a en outre avancé que « les citoyens sont très préoccupés par les produits phytosanitaires qu’ils doivent respirer, autant que par ceux qu’ils ingèrent. » Ainsi, pour le sénateur du Morbihan, « il existe une réelle prise de conscience en France de l’impact des produits phytosanitaires sur la santé et de la dégradation de l’environnement. »
« La progression de l’agriculture bio en France est aujourd’hui considérable, nous avons atteint les 6 % de la surface agricole utile (SAU) en Bio » s’est réjoui Joël Labbé. Pour lui, « la progression des surfaces est de plus de 10 % par an et celle de la consommation est également très soutenue », rappelant que les exploitants Bio s’en sortent aujourd’hui mieux que l’agriculture traditionnelle.
Une Europe « zéro phyto » ?
« La France est plutôt en avance sur la question du “zéro phyto” en Europe, même si d’autres pays ont enclenché des démarches de réduction, comme la Belgique, le Danemark, le Luxembourg ou les Pays-Bas » a précisé Sophie Bordères.
Joël Labbé a exposé la procédure : « la Commission des affaires européennes du Sénat est d’abord saisie et dispose d’un mois pour se prononcer sur le texte.» « Nous serons donc fixés dans deux mois, au plus tard, sur le sort définitif de ce texte au Sénat » a conclu le sénateur du Morbihan.
Le 16 mars dernier, l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a décidé de ne pas classer dans la catégorie « cancérogène probable » le glyphosate, une substance herbicide dont l'autorisation est contestée dans l'Union européenne. La tâche s’annonce donc difficile pour Joël Labbé.