Fin de vie : « Aujourd’hui, on meurt mal dans notre pays » déplore Jean-Luc Romero

Fin de vie : « Aujourd’hui, on meurt mal dans notre pays » déplore Jean-Luc Romero

Invité de l’émission « On va plus loin », Jean-Luc Romero, président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), est venu défendre, encore et toujours, le droit à l’euthanasie et au suicide assisté.  
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Alors que les consultations citoyennes des États généraux de la bioéthique se sont achevées fin avril, on attend maintenant la remise du rapport du Comité national consultatif d’éthique, qui va déboucher sur la révision des lois de bioéthique.

Jean-Luc Romero, président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), sera très attentif aux conclusions de ce débat ainsi qu’à ses suites au Parlement, la fin de vie étant un  des thèmes majeurs de ces États généraux.

Il publie « Lettre ouverte à Brigitte Macron » (Éditions Michalon) dans lequel il s’adresse directement à la Première dame et lui demande son soutien dans son combat en faveur de la fin de vie.

 « Les gens me disaient : « Mais pourquoi vous n’en parlez-vous pas à Brigitte ? » Comme ils sont souvent déçus par un certain nombre de responsables politiques qui n’entendent pas…» explique-t-il pour justifier son choix.  

« Et puis, elle a un statut. Et dans son statut, elle a les relations avec la société civile (…) Je n’allais pas m’adresser à la ministre de la Santé, qui n’a même pas respecté le débat citoyen puisqu’elle donne son avis toutes les semaines dans les médias » lance-t-il ensuite.

« La personne qui meurt n’est pas au centre des décisions »

Une façon également de ne pas s’adresser directement au Président de la République, qui, durant la campagne présidentielle, avait déclaré qu’il voulait choisir sa fin de vie mais que s’il était élu président de la République il ne trancherait pas sur le sujet : « Lui, il est chef de l’État. Et s’il lui arrive un malheur, [ce que]  je ne lui souhaite pas, s’il voulait partir,  il trouver(ait) les solutions » estime Jean-Luc Romero. « La plupart des gens, ne sont pas, malheureusement, dans cette situation-là. Aujourd’hui, on meurt mal dans notre pays (…) Tous les rapports qui ont été faits nous le disent. On est un des pays où l’on meurt le plus mal en Europe. Et on est un pays où, surtout, la personne qui meurt n’est pas au centre des décisions. En fait, c’est toujours, ceux qui sont autour (…) qui décident. Et rarement la personne qui meurt (…) Il faut changer de logique » ajoute-t-il.

Pour Jean-Luc Romero, l’important est « d’abord l’accès universel aux soins palliatifs », qui ne va pas de soi selon lui. Les inégalités étant très importantes en fonction des départements.

« Ensuite il y a besoin de l’euthanasie et du suicide assisté » assure le président de l’ADMD. « On veut avoir le choix. Cette loi est une loi de liberté. C’est ce que je voudrais qu’on comprenne. Elle n’enlève rien à personne. C’est comme la loi qui a permis l’IVG. Elle donnait un droit à une femme. À elle de l’utiliser ou de ne pas l’utiliser. Là, c’est la même chose (…) On veut mettre la volonté du patient au centre de la décision. Cela veut dire que le patient qui veut mourir le plus tard possible, il doit être respecté et c’est honorable. Et celui qui veut arrêter ses souffrances, il doit l’être aussi parce que, je vous le rappelle, on est dans une République laïque ».  

 

Avant de poursuivre : « La Croix [le quotidien – NDLR] a fait un sondage, qui nous dit que 11% des Français sont satisfaits de la loi actuelle et que 89% veulent l’euthanasie et le suicide assisté (…) Ils veulent pouvoir choisir. Moi, je ne sais pas (…) ce qu’il va se passer dans ma fin de vie. On a plein de doutes. Et bien justement, on veut avoir tout le champ des possibles. Et la légalisation de l’euthanasie et le suicide assisté, on l’a vu dans les pays qui nous entourent, c’est au contraire, (…) où l’on meurt le plus serein (…) Ces lois, qui sont utilisées par très peu de gens au final, rassurent l’ensemble de la population. Parce que [les gens] savent que si leurs souffrances vont être insupportables, ils peuvent dire stop et partir entourés de l’amour des leurs. »

Pour le président de l’ADMD, il y a un vrai fossé entre la volonté des élus et celle des Français : « Il y a un grand décalage entre les responsables religieux, politiques et les Français ».  

Et il ajoute : « Il y a un moment, il faut entendre les Français (…) [Ils] sont dans une société plus ouverte. Et puis dans ce domaine-là, quelles que soient leurs convictions, ils ne sont pas du tout sur la thèse des conservateurs. Ils veulent avoir le droit de choisir. Ce serait une liberté formidable (…) et le Président de la République, s’il accordait cette ultime liberté (…) c’est quelque chose de très fort qu’il ferait. Parce que c’est la dernière liberté à conquérir. »

Jean-Luc Romero attend toujours la réponse de Brigitte Macron.  

 

Vous pouvez voir et revoir l’interview de Jean-Luc Romero, en intégralité :

Interview en intégralité de Jean-Luc romero, sur la fin de vie
08:10

 

Dans la même thématique

Versailles: Congress meeting for the inclusion of abortion in the constitution
8min

Société

IVG dans la Constitution : retour sur les grandes étapes d’un vote historique

L’année 2024 s’achève, l’occasion de revenir sur les travaux législatifs marquants du Sénat. Impossible donc de passer à côté de l’inscription dans la Constitution de la liberté d’interrompre sa grossesse. Retour sur les grandes étapes de cette séquence législative historique.

Le

Paris : illustrations of assize court of Paty s trial
5min

Société

Procès de l'assassinat de Samuel Paty : tous les accusés ont été reconnus coupables

Les deux amis de l’assassin du professeur Samuel Paty, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov, ont été reconnus coupables de complicité d’assassinat et condamnés à 16 ans de réclusion criminelle. Le verdict a été accueilli par des cris et des pleurs de la part de la famille de Naïm Boudaoud, âgé de 22 ans. « Ce soir, c’est la République qui a gagné », s’est félicité Thibault de Montbrial, avocat de Mickaëlle Paty, une des sœurs du professeur assassiné. La cour a également déclaré coupables d’association de malfaiteurs terroriste les deux auteurs de la « campagne de haine « qui ont fait de Samuel Paty une « cible » : Brahim Chnina, 52 ans et le prédicateur islamiste Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, ont écopé respectivement de 13 et 15 ans de réclusion criminelle. « J’ai compris que vous avez fait de la politique, pas de la justice », s’est exclamé depuis son box Abdelhakim Sefrioui avant d’être sèchement interrompu par le président, tandis que la famille de Brahim Chnina, très nombreuse sur les bancs du public, éclatait en sanglots et cris de désespoir. Vincent Brengarth, un des avocats d’Abdelhakim Sefrioui, a annoncé aussitôt que son client faisait appel de sa condamnation. Ouadie Elhamamouchi, autre avocat du prédicateur, a estimé que son client était désormais « un prisonnier politique ». « Je me désolidarise de ces propos-là », a cependant nuancé Me Brengarth, montrant des failles dans la défense du prédicateur. Avocat de la compagne de Samuel Paty et de leur fils, présent à l’audience, Francis Szpiner s’est félicité d’un « verdict équilibré ». Le fils de Samuel Paty, âgé seulement de 9 ans, a compris que « justice a été rendue pour son père », a-t-il ajouté. Si le quantum des peines n’est pas très différent de ce que réclamait le parquet, la cour présidée par Franck Zientara a choisi de maintenir l’infraction de « complicité » pour les deux amis d’Abdoullakh Anzorov, un islamiste radical tchétchène de 18 ans, abattu par la police peu après son acte. Les quatre autres accusés, dont une femme, appartenant à la « jihadosphère » qui était en contact avec Anzorov sur les réseaux sociaux, ont également tous été condamnés à des peines de prison ferme ou avec sursis. Pour deux d’entre eux (Ismaël Gamaev et Louqmane Ingar) la cour a retenu l’association de malfaiteurs terroriste tandis qu’elle a déclaré coupable Priscilla Mangel de provocation au terrorisme et Yusuf Cinar d’apologie du terrorisme. La veille de l’attentat, Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov avaient accompagné Anzorov à Rouen pour y acheter un couteau (pas celui qui a servi à décapiter Samuel Paty) qui sera retrouvé sur la scène de crime. A l’audience, Boudaoud et Epsirkhanov ont répété qu’Anzorov leur avait expliqué que ce couteau était « un cadeau » pour son grand-père. Le jour de l’attentat, le 16 octobre 2020, Boudaoud, le seul sachant conduire, avait accompagné le tueur dans un magasin de pistolets airsoft puis l’avait déposé à proximité du collège où enseignait Samuel Paty. « Volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers » Les deux jeunes gens « avaient conscience de la radicalité » d’Anzorov et qu’il « avait la volonté de s’attaquer à l’intégrité physique d’un tiers », a estimé la cour. Cependant, a souligné le président Zientara, « il n’est pas démontré que (les deux jeunes gens) étaient avisés de l’intention d’Anzorov de donner la mort à Samuel Paty ». Les magistrats du Pnat avaient requis 14 ans de réclusion assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Boudaoud et 16 ans de réclusion également assortie d’une période de sûreté des deux tiers contre Epsirkhanov. La cour n’a cependant pas retenu la période de sûreté des deux tiers à leur encontre. Brahim Chnina, père de la collégienne qui a menti en accusant le professeur d’avoir discriminé les élèves musulmans de sa classe lors d’un cours sur la liberté d’expression où il a présenté une caricature de Mahomet, avait lui posté des messages et une vidéo hostile au professeur dès le 7 octobre. Quant à Abdelhakim Sefrioui, fondateur de l’association (aujourd’hui dissoute) pro-Hamas « Collectif Cheikh-Yassine », il avait qualifié Samuel Paty de « voyou » dans une autre vidéo. Mais rien ne prouve qu’Anzorov avait vu la vidéo d’Abdelhakim Sefrioui, avaient mis en avant ses avocats, ajoutant que leur client n’avait pas rencontré l’assassin de Samuel Paty. « La cour a considéré que (MM. Chnina et Sefrioui) avaient préparé les conditions d’un passage à l’acte terroriste », a indiqué M. Zientara. (Avec AFP)

Le