Tickets-restaurant, retraites, RSA, Airbnb : ce qui va changer au 1er janvier 2025
La nouvelle année approche à grand pas et avec elle, l’entrée en vigueur de plusieurs réformes. A quoi doit-on s’attendre après le réveillon ?
Par Romain David
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Une goutte d’eau dans un vase déjà bien rempli. Les tarifs des péages autoroutiers augmenteront d’environ 2 % à partir du 1er février. Une hausse contractuelle, prévue par les contrats d’exploitation qui lient les concessionnaires privés à l’État, et qui s’appuie sur l’inflation et les frais engagés pour entretenir le réseau. Elle vient surtout alourdir la facture déjà chargée des automobilistes, notamment les gros rouleurs, qui subissent déjà, depuis la fin de l’année dernière, la forte envolée des prix du carburant. De quoi nourrir, également, le débat autour du pouvoir d’achat des Français, qui s’impose désormais comme l’un des thèmes centraux de l’élection présidentielle.
En 2021, les tarifs n’avaient augmenté que de 0,44 %. Dans le détail, cette année, il faudra compter sur une hausse de 1,89 % sur le réseau Cofiroute, c’est-à-dire les autoroutes qui relient la région parisienne aux Pays de la Loire, de 1,91 % pour le réseau Sanef (au nord de l’Ile-de-France), de 2,05 % sur les autoroutes Paris-Rhin-Rhône et de 2,19 % sur le réseau Autoroutes du Sud de la France. Pour le sénateur UDI Vincent Delahaye (groupe Union centriste), rapporteur d’une commission d’enquête de la Haute Assemblée sur « le contrôle, la régulation et l’évolution des concessions autoroutières », ces augmentations trahissent l’important déséquilibre des contrats passés entre l’État et les sociétés d’autoroute. Un chantier auquel l’exécutif, selon lui, rechigne à s’atteler.
Cette hausse était prévue de longue date, puisqu’elle rentre dans un cadre annuel, mais avec l’augmentation générale des prix de l’énergie, on a l’impression qu’elle tombe au pire moment.
« Il n’y a jamais de très bon moment pour une hausse des prix. Effectivement, celle-ci vient s’ajouter à d’autres augmentations. Surtout, elle trahit un problème contractuel : l’État n’a pas été suffisamment vigilant avec les contrats de gestion du réseau. Il s’agissait, initialement, de contrats passés entre l’État et lui-même. Mais lorsqu’il y a eu privatisation, au début des années 2000, il aurait fallu en revoir les termes. Aujourd’hui, cette hausse vient nourrir des concessionnaires qui sont largement bénéficiaires, sans que l’on puisse estimer que le résultat soit très satisfaisant en termes de service public.
Justement, dans le rapport que vous avez rendu en septembre 2020, vous pointez la rentabilité « hors normes » du réseau pour les opérateurs privés, alors qu’il faudra attendre le début des années 2030, c’est-à-dire le terme des concessions, pour pouvoir réviser les contrats. Pensez-vous que l’État doive enclencher cette renégociation dès maintenant ?
Le maintien du statu quo n’est certainement pas satisfaisant. L’Etat a des moyens de pression pour pousser les concessionnaires à s’asseoir autour de la table dès à présent, à commencer par la question du renouvellement même des concessions. Une petite dizaine d’années, cela n’est pas si lointain quand on est une grande entreprise qui a besoin de garanties sur l’avenir. Par ailleurs, certaines clauses des contrats ne semblent pas avoir été respectées. Il y a des travaux qui n’ont pas été engagés, un inventaire qui n’a pas été fait, etc. Néanmoins, je ne sens pas une réelle volonté de la part du gouvernement pour sortir de cette situation. Je suis allé voir le ministre pour lui proposer une table ronde, mais rien n’a suivi.
Pour rappel, en 2015, Ségolène Royal a voulu sortir de ces contrats par un bras de fer, en décidant brusquement d’un gel des tarifs. C’est en partie ce qui se répercute aujourd’hui sur les usagers. Vouloir rompre un contrat unilatéralement vous met généralement en position de faiblesse…
Certains responsables politiques proposent d’aller bien au-delà de la renégociation, et réclament une nationalisation. C’était le cas du candidat Montebourg, qui a finalement jeté l’éponge dans la course à l’Elysée. Marine Le Pen défend également cette idée. Ce lundi, ce sont les sénateurs communistes qui lancent cet appel dans un communiqué, et demandent un retour à la gestion publique. Qu’en pensez-vous ?
L’argument principal d’une renationalisation du réseau est celui d’une baisse des tarifs. Mais pour y arriver, il faut parvenir à avoir une bonne gestion du service, et je ne suis pas sûr que l’Etat ait montré ses capacités de bon gestionnaire dans d’autres domaines. Surtout, je ne vois pas vraiment l’intérêt d’engager un chantier pareil à dix ans de la fin des contrats.
Le groupe Vinci (qui possède les Autoroutes du Sud de la France, Cofiroute, Escota et Arcour) annonce un gel des tarifs sur une grande partie des trajets courts de son réseau, c’est-à-dire ceux de moins de 30 ou 50 kilomètres. Mais aussi sur les itinéraires de contournement de certaines agglomérations. Au vu du contexte actuel, saluez-vous cette initiative ?
C’est habile de leur part, cette annonce leur permet de montrer qu’ils sont à l’écoute des usagers. Mais il faudrait que l’on puisse avoir des chiffres afin de savoir ce que leur coûte vraiment ce geste, et de quelles manières il va être amorti. Par ailleurs, je m’interroge sur la pertinence d’un gel ou d’une baisse des tarifs sur le long terme, alors que la France s’engage dans une politique verte de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Peut-être faudrait-il réfléchir à un système tarifaire qui récompense les comportements vertueux, c’est-à-dire les conducteurs de véhicules électriques ou ceux qui font du covoiturage, avec des prix qui baisseraient en fonction du nombre de passagers.
Pour limiter l’impact des hausses de prix sur les ménages, le gouvernement a annoncé plusieurs dispositifs, notamment un « bouclier tarifaire » pour encadrer les prix de l’électricité et du gaz, le chèque énergie de 100 euros ou encore, plus récemment, une revalorisation du barème de l’indemnité kilométrique. Est-ce que la hausse des tarifs des péages constitue un angle mort de cette politique de soutien ?
Je n’appelle pas cela une politique de soutien, ni même un 'bouclier tarifaire'. J’appelle cela un chèque à 48 millions d’électeurs ! Soyons clairs, appelons un chat, un chat ! Avec cette logique, qui crée de la dette, le gouvernement s’est lancé dans une véritable fuite en avant. Pour protéger le pouvoir d’achat des Français, il faut baisser les impôts, c’est-à-dire la dépense publique. Concernant les autoroutes, la crise des Gilets Jaunes a prouvé que l’automobile est un sujet ultra sensible. Or, ici nous avons un problème qui n’est pas géré. Et comme tout problème qui n’est pas traité, il pourrait bien, à terme, devenir explosif. »
La nuit du droit au Sénat