Train Paris-Limoges : les sénateurs montent au front pour dénoncer « l’abandon des habitants du Limousin »
Six sénateurs de la Creuse, la Corrèze et la Haute-Vienne, de tous bords politiques, appellent, dans une tribune publiée le 13 décembre 2022, l’État et la SNCF à tenir leurs engagements pour rénover, améliorer et fournir de nouvelles rames à la ligne ferroviaire Paris-Limoges, alors que la situation pour les habitants de la région est devenue insupportable.
Cela aura été le déraillement de trop. La paralysie de la ligne ferroviaire Paris, Orléans, Limoges, Toulouse (POLT) suite à l’accident d’un train de marchandise début décembre a fini de convaincre les six sénateurs de l’ex-région Limousin (Haute-Vienne, Corrèze et Creuse) de faire front uni pour dénoncer les conditions de voyages « déplorables » proposées par la SNCF sur cet axe. Ils appartiennent à des groupes politiques différents : Socialiste, Écologiste et Républicain (SER), Les Républicains (LR) et Les Indépendants - République et territoires (LIRT), mais « l’enjeu méritait cette presque union sacrée », glisse Christian Redon-Sarrazy (SER), élu dans la Haute-Vienne.
Les six parlementaires publient une tribune collective, après deux semaines de mobilisation, samedi 3 décembre à la Souterraine dans la Creuse et lundi 12 décembre à 7 h 30 devant la gare de Limoges. C’est pour donner une caisse de résonance nationale aux mécontentements locaux que les sénateurs du territoire prennent la parole. « L’enclavement ne cesse de s’aggraver et c’est insupportable pour tous les acteurs territoriaux », déplore Christian Redon-Sarrazy évoquant l’entreprise du CAC 40 Legrand, spécialisée dans l’appareillage électrique et dont le siège social est à Limoges. Dans une lettre à la SNCF, le directeur général Benoit Coquart s’interrogeait sur la pertinence de rester implanté en Haute-Vienne alors que la ligne « se détériore ».
De gauche à droite : Daniel Chasseing, sénateur LIRT de Corrèze, Eric Jeansannetas, sénateur SER de Creuse, Christian Redon-Sarrazy, sénateur SER de Haute-Vienne, Jean-Jacques Lozach, sénateur SER de Creuse, Isabelle Briquet, sénatrice SER de Haute-Vienne et Claude Nougein, sénateur LR de Corrèze.
Allongement des temps de trajets
« Ce qui caractérise la défense de cette ligne POLT, c’est que jamais, nous n’avions connu une telle force et une telle diversité dans la mobilisation », relève Jean-Jacques Lozach, sénateur socialiste de la Creuse et vice-président de l’association Urgence Ligne POLT. En effet, élus nationaux, locaux, associations et acteurs économiques en appellent à l’État et la SNCF à tenir leurs engagements de rénovation de la ligne et du matériel.
Car cette ligne ferroviaire connaît de nombreux dysfonctionnements. D’abord sa régularité. « On est passé de 14 allers-retours chaque jour en 2015 à 8 allers-retours aujourd’hui, imaginez la perte de service pour l’ensemble des usagers de la ligne », explique Christian Redon-Sarrazy. Ensuite, les retards qui s’accumulent pour les voyageurs. « En 1980, vous faisiez Paris-Limoges en 2 h 50, maintenant, c’est au minimum 3 h 30 », regrette Daniel Chasseing, sénateur Les Indépendants de la Corrèze.
Territoire enclavé
La demande des six sénateurs tient en quatre points. Premièrement, une amélioration significative du fonctionnement des trains durant l’hiver et l’arrêt des suppressions horaires. Deuxièmement, le rétablissement des 14 allers-retours comme c’était le cas en 2015 contre les 11 indiqués dans le schéma directeur de la SNCF pour cette ligne. Les parlementaires insistent aussi sur la desserte de gares intermédiaires pour éviter d’enclaver les communes qui se situent sur cet axe. Dans le même sens, la tribune demande un « maintien de l’unicité de la ligne POLT sans déclassement du tronçon entre Brive et Cahors afin d’éviter toute réduction de vitesse. »
L’enjeu est territorial. « Nous allons fêter bientôt les 50 ans du plan Massif Central qui avait comme priorité le désenclavement routier, ferroviaire, aérien et 50 ans après, nous en sommes encore à réclamer ce même désenclavement », se désole Jean-Jacques Lozach. « Les citoyens qui vivent dans notre région ont moins de possibilités que dans d’autres territoires d’accéder aux grandes capitales et de se déplacer », abonde Isabelle Briquet, sénatrice socialiste de la Haute-Vienne. Pour elle, l’état de cette ligne constitue une rupture d’égalité.
« Mépris des habitants du Limousin »
Tous ces dysfonctionnements sont liés à la vétusté du matériel ferroviaire utilisé sur la ligne POLT. Les sénateurs demandent que l’État et la SNCF « tiennent leurs engagements ». « Il faut qu’en 2025, nous disposions de nouvelles rames et que les travaux de régénération des voies soient terminés », insiste Jean-Jacques Lozach. Dans le détail, la régénération des voies, c’est-à-dire « la maintenance nécessaire à cause des négligences depuis des décennies », selon le sénateur socialiste, coûte 1,6 milliard d’euros, financé aux deux tiers par l’Etat. Les nouvelles rames représentent un investissement de 400 millions d’euros. Pour les parlementaires de la région, il faudrait aussi moderniser les voies pour un montant de 380 millions afin de réduire le trajet jusqu’à la capitale. Une demande légitime pour Isabelle Briquet : « Les métropoles ont vu leurs transports s’améliorer et nous, c’est l’inverse, ils se dégradent.»
Sur les raisons qui ont mis la ligne POLT dans une telle situation de dégradation, le sénateur LR de la Corrèze Claude Nougein dénonce l’attitude de l’État. « Je crois qu’il y a un mépris des habitants du Limousin puisqu’on les abandonne. Chaque jour, quand on prend cette ligne, on vit dangereusement. C’est à l’État d’agir et vite. » Le maire de Limoges, Émile Roger Lombertie espère aussi que cette union agira concrètement pour que la rénovation et l’amélioration de la ligne POLT aboutissent en concertation avec l’État, la région et la SNCF.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.