Rapport du GIEC : « On est coupables de ne pas agir », juge Guillaume Gontard

Rapport du GIEC : « On est coupables de ne pas agir », juge Guillaume Gontard

Le Groupe d’experts de l’ONU sur l’évolution du climat a publié lundi le premier volet de son sixième rapport d’évaluation. La crise climatique s’aggrave partout à un rythme accéléré et ses conséquences sont déjà « irréversibles ».
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

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Les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ont publié, lundi 9 août, le premier volet de son sixième rapport d’évaluation. Un état des lieux vertigineux qui s’illustre à plusieurs endroits du globe : les feux apocalyptiques en Turquie, en Grèce et Sibérie, les inondations en Chine ou en Inde, la famine à Madagascar, le manque d’eau dans le sud de l’Iran…

Ce premier volet rédigé par 234 scientifiques de 66 pays, à partir de l’analyse de plus de 14 000 études scientifiques, confirme que le changement climatique en cours « est un voyage sans retour ». Ses conséquences sont déjà « irréversibles » et s’accélèrent plus rapidement encore qu’attendu. La hausse du niveau de la mer s’est considérablement accélérée (trois fois plus rapide par rapport à la période 1901-1971), de même que la fonte des calottes glaciaires (celle du Groenland a fondu six fois plus vite entre 2010 et 2019 que durant la décennie précédente).

Seule solution : « réduire fortement, rapidement et durablement les émissions de gaz à effet de serre »

« Pour stabiliser le climat, il faudra réduire fortement, rapidement et durablement les émissions de gaz à effet de serre et atteindre des émissions nettes de CO2 nulles. La limitation des autres gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques, en particulier le méthane, pourrait avoir des effets bénéfiques tant sur la santé que sur le climat », affirme le climatologue chinois et coprésident du groupe 1 du Giec, Panmao Zhai.

« Limiter le réchauffement à 1,5° est désormais quasiment impossible », retient le président du groupe écologiste au Sénat, Guillaume Gontard. Ce rapport n’est certes pas une surprise mais il s’avère plus inquiétant que prévu dû à l’accélération de la crise climatique. « Je me souviens de 2017, lors du précédent rapport du GIEC, les conclusions et les recommandations étaient similaires. On est coupables de ne pas agir. Les solutions sont là pourtant », souffle l’écologiste.

« Le temps de l’indignation est derrière nous », a réagi le chef de l’Etat après la publication de ce rapport « sans appel ». « Accord de Paris, neutralité carbone au niveau européen, loi climat… La France restera du côté de ceux qui agissent. En novembre, à Glasgow, scellons un accord à la hauteur de l’urgence », a-t-il appelé.

Des freins politiques

La loi Climat, justement, représente une preuve tangible des freins politiques à la mise en place de politiques ambitieuses, pour le sénateur écologiste. Si des avancées sont à noter, cette loi ne remplit pas sa mission initiale, à savoir la réduction des gaz à effets de serre de 40 % d’ici 2030. « C’est simple, on n’arrivera pas à s’en sortir si on ne change pas de modèle et Emmanuel Macron ne croit pas à ce changement », estime Guillaume Gontard.

« Tous les efforts que les pays se sont engagés à prendre ne suffiront pas », retient le sénateur centriste, Pascal Martin. Rapporteur de la loi Climat, il observe les conclusions des experts du GIEC avec craintes et acte « l’urgence absolue » à agir. « Lors de la prochaine COP à Glasgow, on ne pourra plus se satisfaire de belles déclarations », prévient le sénateur de la Seine-Maritime.

« Ce qui est inquiétant dans ce rapport, c’est l’accélération de la crise climatique. Le changement ne pourra se faire qu’à l’échelle internationale mais je vois mal comment la Chine ou l’Inde, deux gros émetteurs de gaz à effet de serre, accepteront de réduire la voilure », pressent-il. Les Etats-Unis, deuxième émetteur mondial de dioxyde de carbone, pourraient néanmoins accepter de changer de braquet avec l’arrivée de Joe Biden, souligne Pascal Martin.

Climat : (enfin) un sujet pour la présidentielle

La prochaine étape se tiendra effectivement lors de la 26e Conférence des Parties des Nations unies sur le changement climatique (COP26) à Glasgow en novembre prochain. Ce rapport sera complété par deux volets – sur la vulnérabilité de nos sociétés et sur les solutions pour réduire les émissions des gaz à effet de serre – en février et mars 2022.

A quelques mois de la présidentielle, le climat ne saurait rester un sujet à la marge pour les politiques. Emmanuel Macron a d’ailleurs laissé entrevoir la ligne qu’il entendait porter en se déclarant favorable à l’énergie nucléaire lors de son déplacement en Polynésie française.

« Le nucléaire va retrouver une place », soutient également le sénateur LR, Jean-François Husson. Et d’avancer l’argument du moindre mal écologique - le nucléaire génère moins de carbone que le gaz ou le charbon - et celui de la souveraineté énergétique : « rien ne fonctionne sans externalités négatives ». En revanche, à ce jour, aucune solution n’existe pour les déchets nucléaires, si ce n’est leur enfouissement.

Marta de Cidrac (LR), rapporteure de la loi Climat, se place sur la même ligne que son collègue et ne veut pas laisser le sujet de l’écologie « entre les mains d’un parti ». « C’est un sujet éminemment transversal qui concerne aussi bien la production de logements que nos consommations quotidiennes. Le vrai défi sera de faire accepter ces changements à nos concitoyens », prévient-elle. Chaque année, la France émet environ 400 millions de tonnes de CO2. Côté responsabilités, dix entreprises génèrent à elles seules 21 % de cette pollution, selon les données du Plan national d’affectation des quotas d’émissions de CO2.

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