Comment retrouver le plein emploi en France ? Comment améliorer le pouvoir d’achat des Français ? Des questions récurrentes et réactivées de surcroit à chaque élection présidentielle. Et la nouvelle année est arrivée avec une bonne nouvelle. Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A (longue durée) a diminué de 0,9% au mois de novembre. Les résultats tardifs de la baisse du chômage, pourtant un objectif prioritaire de François Hollande en 2012, laissent le soin aux 7 candidats de la primaire de gauche de se démarquer des réformes du quinquennat. A quelques jours du scrutin (22 et 29 janvier), l’occasion de faire le point sur les principales propositions, de Manuel Valls, Benoit Hamon, Arnaud Montebourg, Vincent Peillon, Jean-Luc Bennahmias, et François de Rugy. Sylvia Pinel annoncera ses propositions jeudi. La candidate du parti Radical, seule femme du scrutin, a déjà annoncé qu’elle entendait faire des propositions en matière d’égalité Homme/Femme, comme la volonté de réduire les écarts de salaire.
Pouvoir d’achat : Valls souhaite la défiscalisation des heures supplémentaires
Les désaccords en matière économique et sociale n’ont jamais vraiment cessé d’handicaper les gouvernements successifs de la présidence Hollande. Si Benoît Hamon et Arnaud Montebourg invoquent cette raison pour justifier leur départ de l’exécutif en 2014, pour Manuel Valls, instigateur du 49.3 pour la loi Travail et la loi Macron, difficile de faire de même. Il n’empêche, l’ancien Premier ministre se démarque en souhaitant la remise en place de la défiscalisation des heures supplémentaires. Mises en place sous Nicolas Sarkozy, elles consistent à exempter d’impôts sur le revenu et de cotisations sociales, les salaires perçus sur ces heures. François Hollande les avait supprimées, les jugeant trop couteuses pour les finances publiques et destructrices d’emplois. Sur son site, Benoit Hamon annonce qu’il revalorisera « immédiatement le SMIC, les minima sociaux à hauteur de 10% et le point d’indice de la fonction publique ». Arnaud Montebourg propose lui « une baisse de la CSG sur les catégories dont les revenus sont les plus faibles » tout en la rendant progressive ». « Pour une personne au SMIC, cette baisse représenterait un gain de pouvoir d’achat de 102 euros par mois. », calcule-t-il. Même idée pour Vincent Peillon, qui lui aussi propose de rendre progressive la CSG. Il indique également la création d’un bouclier fiscal pour les Français les plus modestes ». Ce « bouclier » consistera à plafonner à 20% du revenu mensuel, le montant de la taxe d’habitation, pour tout revenu inferieur à 1636 euros par mois. Pour le candidat écologiste, François de Rugy, des baisses d’impôts sur le revenu pourraient concerner « les foyers fiscaux dont les ressources sont inferieures ou égales à 1,5 fois le revenu médiant, « si la situation des comptes publics et la croissance économique le permettent » précise-t-il.
Minima sociaux : « minimum décent » pour Valls, contre « revenu universel d’existence » pour Hamon
Dans l’air du temps à droite comme à gauche, « le revenu universel d’existence » figure en bonne place chez plusieurs candidats à la primaire. Benoît Hamon prévoit son développement en trois temps. Dès 2017, le RSA sera augmenté de 10% soit 600 euros par mois. Puis, versé à tous les bénéficiaires ainsi qu’aux jeunes de 18 à 25 ans quel que soit leur niveau de ressources. Enfin, ce revenu sera « étendu à l’ensemble de la population ». « A terme, il atteindra la somme de 750 euros » indique-t-il. Problème, l’ancien ministre de l’Education nationale chiffre lui-même cette mesure « autour de 300 milliards par an ». Un coût qu’il compte financer par une réforme de la fiscalité ou encore la lutte contre l’évasion fiscale. Jean-Luc Bennahmias, président du Front Démocrate, propose aussi la mise en place d’un revenu universel mais reste flou sur son montant et son financement. Du côté de Manuel Valls, il s’agit de créer un « minimum décent » entre « 800 et 850 euros » mensuels (…) attribué à tous les adultes de plus de 18 ans (...), résidant sur le territoire national depuis au moins quatre ans et, bien sûr, sous seules conditions de ressources, parce que le lien avec le travail est indispensable » insiste-t-il. La mesure fusionnerait l’ensemble des prestations existantes et couterait 30 milliards d’euros. Son financement est à l’étude reconnait-il. Dans la lignée de son souverainisme économique, Arnaud Montebourg souhaite lui généraliser « les contrats d’activité à l’attention des chômeurs de longue durée. Les emplois jugés non solvable dans le secteur associatif ou l’économie sociale et solidaire seraient ainsi financés par l’argent des minima sociaux. Grace au numérique et à la généralisation des demandes effectuées en ligne des prestations sociales, Vincent Peillon se fixe comme objectif d’étendre « la Garantie jeunes à 200 000 bénéficiaires à l’horizon 2020 ».
Que faire de la loi Travail ?
Véritable épouvantail pour une partie de la gauche, que comptent faire les différents candidats de la loi Travail ? Garder le meilleur et supprimer le mauvais, peut-on résumer pour Arnaud Montebourg, Le « meilleur », étant le compte personnel d’activité (CPA). Benoit Hamon souhaite abroger la loi et créer un « droit à la formation tout au long de la vie ». Vincent Peillon se rappelle au bon souvenir de Manuel Valls en regrettant « des brutalités » comme l’utilisation du 49.3. L’actuel député européen propose, par ailleurs des modifications, comme « le rétablissement de la hiérarchie des normes dans le droit du travail » et déplore la possibilité de réduction du taux de majoration des heures supplémentaires. En ce qui concerne le CPA, il souhaite y adjoindre « une banque du temps » un nouveau nom pour définir l’actuel compte épargne temps. François de Rugy, candidat écologiste à la primaire propose lui de maintenir la loi Travail « en la transformant en loi expérimentale, valable cinq ans ». A l’issue de ce délai, « il sera possible d’en tirer vraiment le bilan, et d’adopter un texte définitif »estime-t-il. Enfin, Manuel Valls ne compte évidement pas y toucher si ce n’est pour y ajouter « un chèque syndical ». La cotisation syndicale serait financée par l’employeur dans le but de renforcer le dialogue social et pour « donner les moyens aux syndicats d'accomplir leur mission ». Aucun des candidats ne souhaitent remettre en cause la durée légale hebdomadaire du temps de travail.
Que faire face à « l’uberisation du travail » ?
Pour Arnaud Montebourg, il s’agit d’amener les plateformes à assumer la protection sociale de leurs salariés qui sont aujourd’hui faussement indépendants ». Benoît Hamon tranche la question et annonce qu’il requalifiera les « collaborateurs » en salariés « des entreprises ubérisées ».
Par des contrôles plus fréquents des conditions de travail, « le juge pourra requalifier la relation en salariat lorsque le lien de subordination est manifeste » annonce Vincent Peillon. Manuel Valls entend lui « bâtir une protection sociale véritablement universelle » qui comblerait l’écart entre les salariés et les travailleurs des plateformes. « Lorsqu’il y a dépendance économique par rapport au donneur d’ordre, celui-ci devra contribuer à cette protection » expose-t-il.
Travailler mieux
Arnaud Montebourg et Benoit Hamon plaident pour la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle. L’ancien ministre du redressement productif souhaite mettre l’accent sur le télé-travail en le défiscalisant. L’ancien ministre de l’Education évoque lui « le droit à la déconnexion pour tous « avec nouvelles règles pour protéger les salariés ». Déjà brocardé dans un rapport de la commission des finances du Sénat, le CICE est dans le viseur de Vincent Peillon. Il entend conditionner le versement des aides publiques aux entreprises « à la signature d’accords d’entreprise ou de branche consacrés à la formation, à la recherche-développement et à la qualité de l’emploi et des conditions de travail » (…) et « au non licenciement au sein des entreprises bénéficiaires ». Si pour Manuel Valls, « le temps de travail ou « la pénibilité » tombent dans l’escarcelle de la loi, les autres problématiques liées au bien être au travail doivent, elles, être réglées au plus près de l’entreprise, donc par le dialogue social.
Le 12,15 et 19 janvier prochains, lors des trois débats qui précédent le premier tour, les candidats auront l’occasion de confronter leurs idées.