Jordan Bardella élu président du Rassemblement national : le sacre de la fidélité
Jordan Bardella a largement été élu président du Rassemblement national, lors du XVIIIème Congrès du RN qui se tient ce samedi à Paris. Sa large victoire sur Louis Aliot acte un passage de relais qui n’en est pas un, puisque ce Congrès marque aussi la mainmise de Marine Le Pen sur le parti.
Par Louis Mollier-Sabet / Images : Flora Sauvage
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Président par intérim depuis plus d’un an, l’avènement officiel de Jordan Bardella à la tête du Rassemblement national n’a pas surpris grand monde, ce samedi à la Maison de la Mutualité à Paris. C’est Marine Le Pen qui a annoncé les résultats un peu avant midi : sur 36 000 électeurs, plus de 25 000 ont pris part au vote, soit 71,5 % de participation, avec 22 130 voix pour Jordan Bardella et 3 955 pour son concurrent, Louis Aliot. Un score « plébiscitaire », de l’aveu même des militants présents se réjouissant du score de Jordan Bardella, qui, en tant qu’ancien secrétaire départemental du FN de Seine-Saint-Denis, jouait presque à domicile.
Le RN reste dans la famille
En 2011, au Congrès de Tours qui avait tranché la succession de Jean-Marie Le Pen, Marine Le Pen n’avait récolté « que » 67,65 % des voix, contre 32,35 % pour son concurrent de l’époque, qui s’était bien plus frontalement opposé à l’héritage des Le Pen. Cette victoire encore plus large de Jordan Bardella témoigne surtout du faible degré de conflictualité qui entourait cette élection à la tête d’un mouvement qui n’a pas une grande culture des débats internes. Au Front national, les duels pour la présidence ont souvent été très durs, comme en 2011, et la fameuse scission de Bruno Mégret en 1998-1999 a laissé une sorte de traumatisme enfin conjuré aujourd’hui. Plus de 20 ans plus tard, le Front national – devenu Rassemblement – avait besoin d’une élection qui se passe sans encombre, Louis Aliot et Jordan Bardella lui en ont offert une.
Certains y ont vu un duel entre une ligne souverainiste et modérée portée par Louis Aliot et une ligne plus dure et plus marquée à droite portée par Jordan Bardella. Si l’histoire et l’implantation locale de l’un tranche avec la jeunesse et la présence médiatique de l’autre, il n’est pas certain que ce soit vraiment la « ligne » du Rassemblement national qui ait été tranchée aujourd’hui, puisque dans les deux cas, c’est Marine Le Pen qui gagnait. Entre son ex-compagnon et (l'ex-)gendre de sa sœur Marie-Caroline et de Philippe Olivier, son bras droit, la candidate du Rassemblement national à la dernière élection présidentielle était certaine que le parti resterait dans la famille. « Je tenais publiquement à apporter mon soutien à Marine, que je ne remercierai jamais assez, tout comme son père d’ailleurs, pour m’avoir permis de vivre une telle aventure », s’est fendu Louis Aliot dans son discours, alors que Jordan Bardella, en clôture du Congrès, a confié que deux femmes « lui avaient permis d’être l’homme qu’il est aujourd’hui » : sa mère et Marine Le Pen.
« C’est un tandem qui marche bien depuis plusieurs mois. On est dans un partage des rôles qui fonctionne, Jordan aura un travail de cohésion et d’animation à faire au sein du parti, ce n’est pas un handicap que Jordan ne soit pas à l’Assemblée », confie Laurent Jacobelli, député RN de Moselle. Plusieurs cadres du parti voient les choses de cette manière : à Marine Le Pen l’Assemblée nationale et l’incarnation politique, et à Jordan Bardella l’animation militante et la gestion de la machinerie interne, dans un « tandem » qui vise 2027. « Je suis certain qu’il n’y aura pas de concurrence », assure Laurent Jacobelli.
« La ligne gagnante, c’est la dédiabolisation »
C’est donc bien la continuité que les militants mettent en avant en sortant de l’annonce des résultats. Pourquoi changer une équipe qui gagne (presque), en somme ? Mais si le choix de Jordan Bardella s’imposait comme une évidence, pourquoi avoir organisé un Congrès ? « Pourquoi il y a des élections si on sait déjà le vainqueur ? » nous lance Louis Aliot. C’est bien toute la question qui entoure ce XVIIIème Congrès du Rassemblement national. Plus qu’un duel face à Jordan Bardella qu’il a de toute façon largement perdu, le maire de Perpignan préfère voir, dans sa candidature, un signal envoyé à « un certain nombre de nos anciens amis » : « Cela fait vingt ans que je suis avec Marine sur la dédiabolisation, il fallait que je dise des choses. La ligne gagnante c’est celle-là. Ce n’est pas de Jordan que je parle, mais plutôt de mouvements périphériques ou de personnalités qui rêvent d’union de je ne sais quoi qui serait vouée à l’échec. »
Le maire de Perpignan admet donc à demi-mot une candidature de témoignage pour rappeler la « ligne » du Front national depuis plus de dix ans maintenant que Marine Le Pen a repris le parti de son père : « On a la bonne ligne : un pilier économique et social, un pilier national et identitaire, mais tout ça dans un équilibre et malheureusement un certain nombre de nos anciens amis continuent de tenir des propos qui inquiètent les Français, ça ne sert à rien. »
Louis Aliot ne cible pas Jordan Bardella, mais Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont et proche historique de Marine Le Pen y voit, lui, un « début de purge contre ceux qui défendent la ligne sociale », a-t-il confié dans un communiqué, après n’avoir pas été reconduit au bureau exécutif, sorte de gouvernement resserré du parti qui compte une quinzaine de membres. « Alors que depuis de nombreux mois je tire la sonnette d’alarme sur une potentielle re-radicalisation, je ne peux voir dans mon éviction qu’une sanction pour avoir voulu sensibiliser sur un phénomène que les faits confirment. Depuis les ronds de jambe faits à certains intégristes, jusqu’à l’adoption de positions droitardes, contraires à mon sens au ‘ni droite, ni gauche' qui a prévalu pendant des décennies au Front National. Certaines outrances me donnent encore raison », ajoute-t-il.
Pile, Le Pen gagne, face, les autres perdent
Une référence explicite à la remarque raciste proférée lors des questions au gouvernement de jeudi dernier par Grégoire de Fournas, député du Rassemblement national. Si le groupe parlementaire soutient le député de Gironde en dénonçant une récupération politique, celui qui était pressenti pour être nommé porte-parole du parti par Jordan Bardella en cas de victoire ne s’est pas montré, ce samedi, à la Maison de la Mutualité. Et pour cause, l’incident de séance gêne aux entournures, en plein débat interne sur la « dédiabolisation » du parti. « Il y a toujours de l’actualité à l’Assemblée nationale, ça bouge », coupe court une militante quand on l’interroge sur le « qu’il retourne en Afrique » lâché par Grégoire de Fournas. Jordan Bardella a clairement pris la défense du député, en accusant la Nupes et la majorité présidentielle de s’être « livrés à une véritable chasse à l’homme contre un député de la République. Ils veulent interdire toute remise en cause de la politique d’immigration menée dans notre pays depuis des décennies. »
« Depuis 48h, je passe mon temps à dire qu’il a été victime d’un système complètement anti-démocratique. Il a été jugé par des gens qui l’ont pointé du doigt et ont scandé ‘dehors, dehors, dehors’, est-ce que c’est impartial ? » se défend Philippe Ballard, député RN de l’Oise, quand on lui demande si le RN n’a pas un peu lâché de Fournas. « Mais non, moi je ne l’aurais pas dit comme ça, j’ai d’ailleurs dit pendant la séance que notre collègue de LFI ‘faisait le jeu des mafias’ », est-il obligé d’ajouter. Laurent Jacobelli aussi, tente de tenir ce « en même temps » version RN, en admettant une formulation malheureuse, mais en l’imputant à « l’extrême-gauche, qui met un tempo difficile à canaliser à l’Assemblée nationale, où les petites phrases fusent dans tous les sens. »
Malgré l’incartade Briois, pour le moment isolée, la candidature de Louis Aliot a donc donné l’occasion de rappeler que le RN marchait tout de même sur deux jambes, surtout après l’épisode sulfureux du « qu’il retourne en Afrique. » Dans le même temps, la large victoire de Jordan Bardella a permis de contenter une base militante peut être plus proche des positions qualifiées de « droitardes » par Steeve Briois que la « ligne sociale » que ce dernier entend incarner. Le plus important, dans toute l’opération, étant que Marine Le Pen reste au-dessus de la mêlée et parvienne à tenir les deux bouts du parti, puisque le point commun de tous les protagonistes de ce Congrès, de Briois à Bardella en passant par Aliot, c’est bien de s’inscrire dans la stricte lignée de l’action de Marine Le Pen.
Une fidélité unanime qui permet en fait au Rassemblement national de s'éviter de trop important débats internes, parce que la ligne, c'est « Marine. » D'ailleurs, quand on interpelle Jordan Bardella sur sa ligne qualifiée de « droitarde » par Steeve Briois, sa réponse est simple : « J'ai la ligne de Marine Le Pen, et elle a fait 85%. »
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