Incidents du 14 juillet : « Les forces de l’ordre sont sur les genoux », dénonce François Grosdidier

Incidents du 14 juillet : « Les forces de l’ordre sont sur les genoux », dénonce François Grosdidier

Après les débordements du 14 juillet, les sénateurs de tous bords mettent en cause le gouvernement. En marge du défilé militaire, près de 180 personnes, dont des figures des Gilets jaunes, ont été interpellées, avant que l’avenue ne soit investie par les supporters des Fennecs.
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Par Héléna Berkaoui

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La fête nationale était à l’image de l’année écoulée, mouvementée. L’image du président de la République descendant les Champs-Élysées sous les huées des gilets jaunes l'illustre. Dimanche 14 juillet, près de 180 personnes, dont des figures du mouvement ont été interpellées, avant que l’avenue ne soit investie par les supporters de l’Algérie, dans la soirée. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, 282 interpellations ont eu lieu dans toute la France, dont 169 à Paris. 249 personnes ont été placées en garde à vue. 

« Les forces de l’ordre sont sur les genoux »

Les sénateurs mettent en cause le gouvernement et condamnent unanimement les violences qui ont eu lieu dimanche. Du côté de la droite, majoritaire au Sénat, on s’émeut de la fatigue des forces de l’ordre et du manque de soutien du gouvernement. Le sénateur LR, François Grosdidier, refuse toutefois de cibler personnellement le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner. « Les problèmes sont beaucoup plus profonds, le gouvernement n’a pas suffisamment donné les moyens au régalien. Aujourd’hui, les forces de l’ordre sont sur les genoux », dénonce-t-il. Il y a deux semaines déjà, François Grosdidier alertait « sur le malaise extrêmement profond » chez les forces de l’ordre. « Taux de suicide supérieur de 36 % à celui de la moyenne nationale, 22 millions d’heures supplémentaires non-payées, équipements vétustes », le rapport qu’il a conduit avec Michel Boutant (PS) dresse un tableau alarmant (lire notre article).

À ces conditions de travail dégradées s’ajoute une « réponse pénale inadaptée », selon François Grosdidier qui conclut, sévère, que « la réponse du gouvernement et du ministère de l’Intérieur n’est pas à la hauteur des défis sécuritaires » dans le contexte de mobilisations des gilets jaunes, notamment. Rejoignant la position de son collègue Les républicains, Frédéric Péchenard, le sénateur s’étonne que le gouvernement, depuis des mois, « accepte que se déroulent des manifestations hors du cadre légal ». Ce matin, sur France Info, Frédéric Péchenard, vice-président Les Républicains de la région Île-de-France et ancien directeur général de la police nationale, appelait à interdire les manifestations des gilets jaunes dans toute la France. « Si elles ne sont pas déclarées, ce ne sont pas des manifestations, ce sont des attroupements », affirme-t-il.        

« Le 14 juillet est un jour de commémoration nationale, il doit fédérer »

La sénatrice (LR) de Paris, Catherine Dumas, s’inquiète, elle, de la dégradation de l’image de la France à l’international et des conséquences de ces débordements pour les commerces parisiens. « Le 14 juillet est un jour de commémoration nationale, il doit fédérer, d’autant que le défilé cette année était remarquable, c’est regrettable. Même si on n’est pas d’accord, il y a d’autres façons de protester », s’agace la sénatrice. « Cela nuit à l’image de la France, cela nuit au tourisme », poursuit-elle tout en espérant que le gouvernement anticipera les probables rassemblements de supporters pour la finale de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) vendredi, où se feront face les équipes du Sénégal et de l’Algérie.   

À gauche de l’hémicycle, les sénateurs condamnent également les violences qui ont émaillé le 14 juillet. « La police a réussi à faire cesser les débordements sans qu’il y ait des dégâts d’ampleur », fait remarquer Rémi Féraud, sénateur (PS) et président du groupe socialiste et apparentés au Conseil de Paris. « C’est un mélange de violence, d’esprits factieux, ils sont les idiots utiles du macronisme. Ça achève de décrédibiliser le mouvement des gilets jaunes, alors que des millions de Français se sont mobilisés pour crier leur sentiment d’injustice », s’agace l’élu. Rémi Féraud est aussi sévère à l’égard du gouvernement qui « n’arrive pas à éteindre l’incendie qu’il a déclenché à force de dureté ». À son sens, l’exécutif a trop tardé à répondre aux revendications de ce mouvement social d’ampleur. « Depuis deux ans, le gouvernement refuse les compromis avec les contre-pouvoirs, aujourd’hui il se retrouve seul face à la foule », analyse-t-il. 

« On est face à un gouvernement qui est dur et faible à la fois »

S’il condamne sans ambiguïté les violences du 14 juillet, Rémi Féraud pointe aussi les dérives du maintien de l’ordre. « Certes il y a beaucoup de violences dans le mouvement des gilets jaunes mais ce qu’il s’est passé pendant la fête de la musique à Nantes et sur le pont de Sully avec les militants écologistes n’est pas acceptable », dénonce l’élu. Pour Rémi Féraud, « il serait temps que le gouvernement sorte de son silence, se remette en cause » mais « on ne sent pas chez Castaner la solidité politique qui lui permettrait de faire ça ». Son constat est sans appel : « On est face à un gouvernement qui est dur et faible à la fois ».

Une position qui se rapproche de celle de la sénatrice écologiste de Paris, Esther Benbassa. L’élue condamne évidemment les violences mais juge sévèrement l’arrestation des figures des gilets jaunes le 14 juillet sur les Champs-Élysées : « Arrêter leurs porte-paroles n’était pas malin, c’est le meilleur moyen de renforcer la détermination des gilets jaunes ». Régulièrement aux côtés des gilets jaunes pendant les samedis de mobilisation, Esther Benbassa comprend leurs revendications et leur volonté d’aller sur les Champs-Élysées, non pas pour casser mais pour interpeller le président de la République et rendre visible leurs combats, leurs revendications. Contrairement à certains collègues, la sénatrice écologiste n’est pas choquée que les gilets jaunes aient choisi le 14 juillet pour se faire étendre. « Le 14 juillet ce n’est pas la journée de l’armée, c’est la journée du peuple, c’est la prise de la Bastille », rappelle Esther Benbassa.

Le Rassemblement national a fait preuve de racisme ordinaire, accuse Rachid Temal 

« Monsieur Ravier fait preuve d’agression et de racisme ordinaire », accuse Rachid Temal
02:19

Le Rassemblement national a largement communiqué sur les heurts qui ont gâté les manifestations de joie des supporters de l’Algérie. Le sénateur et membre du RN, Stéphane Ravier, a même appelé à l’interdiction des drapeaux algériens.

« Ces drapeaux algériens qui sont brandis contribuent à ce qu’il y ait cette excitation, ces débordements, ces troubles à l’ordre public. C’est dans ce cadre-là que je souhaite que les drapeaux soient interdits », justifie-t-il. Pour Stéphane Ravier ces « drapeaux sont une véritable provocation pour certains (…) les Harkis, les pieds noirs ».

« Monsieur Ravier fait preuve d’agression et de racisme ordinaire », balaie le sénateur socialiste, Rachid Temal qui condamne plus largement le discours du Rassemblement national sur les évènements d'hier. « De quelle intégration parlent-ils, ce sont des Français qui, il y a tout juste un an, avaient le drapeau français pour célébrer la victoire de l’équipe de France », rétorque le sénateur. Les réactions des élus du Rassemblement national au lendemain du 14 juillet sont pour lui la démonstration que « le FN n’a pas changé même s’il est devenu le Rassemblement national ».

Sur Twitter, Stéphane Ravier, sénateur des Bouches-du-Rhône, s’en est pris à la sénatrice phocéenne Samia Ghali. Une énième preuve du « racisme ordinaire » de l’élu pour Rachid Temal qui tonne : « Samia Ghali a le droit de soutenir n’importe quelle équipe ! »

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