C’est la première fois que Volodymyr Zelensky s’adresse directement à la jeunesse européenne depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, le 24 février. Lors de son intervention par visioconférence diffusée dans l’amphithéâtre Boutmy de Sciences Po Paris, le dirigeant ukrainien a profité de ce temps d’échanges pour rappeler la détermination de son peuple, « Nous croyons en notre victoire ! »
« Notre entrée ne fera que renforcer l’Union européenne »
Pour son premier grand discours depuis sa réélection, au Parlement européen à Strasbourg, Emmanuel Macron a douché les espoirs ukrainiens d’une intégration rapide à l’Union européenne. Selon le président français, la candidature de Kiev « prendrait plusieurs années, sans doute plusieurs décennies, sauf si nous décidions de baisser les standards de cette adhésion », avait-il expliqué. Le président français avait également suggéré un projet alternatif : « Une communauté politique européenne. »
Visiblement agacé par ces déclarations, Volodymyr Zelensky considère que les Etats membres et la commission ne peuvent pas tenir un double discours aux Ukrainiens. « On ne peut pas nous garder à distance nous prendre sans nous prendre dans l’UE. C’est comme un couple fiancé dont le mariage n’arrive jamais. […] Comme un invité sans chaise, c’est injuste », a-t-il souligné.
Ce désir d’adhésion doit exister des deux côtés de la table selon lui, à la fois de la part des Ukrainiens mais également des Etats membres de l’Union. « 'L’Ukraine mérite de poser sa candidature', n’est peut-être pas la bonne tournure de phrase pour justifier une candidature », reconnaît-il. « Cela fait belle lurette, que l’Ukraine a tout mérité. […] L’Ukraine ne fera que renforcer les autres Etats. Notre armée a démontré ses capacités, nos gens ont fait leurs preuves […], il s’agit d’une société qui mérite le respect. » « L’Ukraine veut bénéficier du même respect que les autres États membres, pas plus mais pas moins. »
Le refus de l’Otan d’intégrer Kiev, une erreur lourde de conséquences pour la paix selon Zelensky
Interrogé sur une possible extension de l’alliance atlantique sur le vieux continent, le président Zelensky estime que l’agression de Moscou en Ukraine a « poussé » la Finlande et la Suède à déposer une candidature auprès de l’OTAN. « C’est un choix motivé par l’invasion », explique le dirigeant politique. Concernant l’Ukraine, Volodymyr Zelensky regrette que son pays n’ait pas rejoint les rangs de l’alliance militaire avant le début des combats le 24 février : « L’erreur c’est que l’Otan n’ait pas trouvé une place à l’Ukraine avant la guerre. Je suis persuadé que si l’alliance avait intégré l’Ukraine, il n’y aurait pas eu de guerre. »
Le président est également revenu sur les « justifications » de la Russie pour envahir l’Ukraine. L’agrandissement de l’alliance atlantique vers l’Est est « l’une des raisons » invoquée. Selon lui, ce conflit militaire a des origines multifactorielles. « La Russie ne nous considère pas comme un Etat, ne nous considère pas comme un peuple, comme une nation. Elle veut garder la main sur notre pouls », souligne Volodymyr Zelensky. Pour conserver cette influence, la Russie aurait selon le président ukrainien infiltré les organes gouvernementaux, l’armée et le système politique national avant la guerre, « nous empêchant, de nous développer selon notre volonté. »
Comment construire une paix durable ?
Le retour à la paix en Ukraine ne pourrait se faire qu’avec « des garanties juridiques solides. » Le président ukrainien se désole que Moscou ait violé le mémorandum de Budapest signé le 5 décembre 1994, un accord signé notamment par Eltsine, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Ce texte prévoyait « le respect et la souveraineté des frontières » de l’ex-république soviétique de la part des signataires en échange d’une dénucléarisation du pays et la signature de Kiev au traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). « Vous savez que la guerre se terminera pour l’Ukraine quand on nous redonnera notre unité et nos territoires. […] Quand nous récupérerons tout ce qui nous appartient, nous finirons cette guerre », explique Volodymyr Zelensky. Pour le dirigeant ukrainien, les découvertes de charniers et de crimes de guerre amenuisent les possibilités de régler cette guerre par des moyens diplomatiques. « Nous sommes prêts à mener des négociations et des pourparlers pourvu qu’il ne soit pas trop tard. Avec chaque nouveau Boutcha, Marioupol et Irpin, le désir et la possibilité de négocier disparaissent. »
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