Propositions de Darmanin sur la police : « Un côté amateur » pour les sénateurs

Propositions de Darmanin sur la police : « Un côté amateur » pour les sénateurs

Les annonces de Gérald Darmanin destinées à retisser le lien de confiance entre la police et les Français sont loin d’enthousiasmer les sénateurs qui rappellent que la plupart figuraient dans un rapport du Sénat de 2018.
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« Gérald Darmanin n’est pas dans une position facile. Il s’en sort comme il peut. Et pour ça, il pouvait difficilement être dans le déni absolu » note Jérôme Durain, vice-président socialiste de la commission des lois du Sénat.

S’il n’était pas dans le déni absolu, lundi soir devant les députés qui l’interrogeait sur les violences policières, le ministre de l’intérieur a, néanmoins, tenu à affirmer « qu’il n’y avait pas de « divorce » entre la police et la population. Un constat ou tout du moins un point de vue qui ne l’a pas empêché de dérouler plusieurs pistes pour réaffirmer le lien de confiance entre les forces de l’ordre et les Français mais aussi réformer le travail de la police.

Des propositions identifiées par le ministre comme « sept péchés capitaux ». « Nous devons » aux policiers « plus d’heures de formation » a estimé Gérald Darmanin. Pour rappel, après les attentats de 2015, la formation initiale (période de scolarité en école de police) avait été ramenée de 12 à 8 mois, afin de permettre le recrutement de plus de fonctionnaires. Le ministre a également insisté sur l’importance de la formation tout au long de la vie. « On ne peut qu’y être favorable. Il faut que la police s’adapte à de nouveaux modes d’action. Comme par exemple, en Suède ou en Allemagne où les forces de l’ordre mènent des concertations avec les manifestants en amont des mobilisations » propose la vice-présidente écologiste du Sénat, Esther Benbassa. Lors de son audition, le ministre s’est d’ailleurs excusé que le gouvernement ait « balayé d’un revers de main » les amendements du PS sur la formation des policiers.

« Pas un euro dans le budget pour les armes de la gendarmerie

Le ministre a également reconnu un manque de moyens pour les policiers et gendarmes. Certes, son ministère a obtenu 1 milliard d’euros au titre du plan de relance pour rénover les commissariats, changer sa flotte de véhicules, mais pour Philippe Dominati, rapporteur (LR) du budget sécurité au Sénat, « le plan de relance, fait figure de père Noël pour combler toutes les failles de l’Etat ». « Ça fait 7 que nous votons contre le budget sécurité, sauf cette année car il y a le plan de relance. Mais sans ça, les dépenses de fonctionnement et d’investissement des forces de sécurité seraient en baisse. Gérald Darmanin arrive à 18 mois d’une échéance présidentielle pour régler un problème dont on ne s’est pas préoccupé depuis des années. Pour vous donner un exemple, sans le plan de relance, il n’y aurait pas un euro dans le budget pour les armes de la gendarmerie. Dans le plan de relance, vous avez 5 millions qui y sont alloués » explique-t-il.

Auditionné le 18 novembre dernier au Sénat, le directeur général de la gendarmerie nationale, Christian Rodriguez se félicitait de pouvoir renouveler l’année prochaines les engins blindés « contemporains de la Renault 12 », soit le début des années 70.

Caméras-piétons défaillantes

C’est un serpent de mer lorsqu’on évoque les moyens de la police : la généralisation des caméras piétons. Le ministre l’a promis en juillet 2021, une annonce déjà acté cet automne. La généralisation des caméras-piétons était une demande forte émise par la commission d’enquête du Sénat sur le malaise des forces de sécurité intérieure. 10 400 caméras équipent actuellement les policiers. Malheureusement, comme le rappelait le DG de la police nationale, Frédéric Veaux aux sénateurs en juillet dernier, « c’est un matériel qui ne satisfait pas les policiers qui y ont recours » expliquant qu’il était difficile de les accrocher sur les uniformes, de les déclencher et que les batteries étaient déficientes. Et la police française est liée à ce marché public jusqu’en 2022.

« C’est un énorme cafouillage »

Pour Marc-Philippe Daubresse, rapporteur LR de la proposition de loi, « Sécurité globale » au Sénat, « les intentions sont bonnes ». « Mais si on en arrive là, c’est parce que le gouvernement s’est pris les pieds dans le tapis avec cet article 24 (voir nos articles). « On utilise un grand évènement pour légiférer en urgence. On travaille sur trois textes en même temps (proposition de loi sécurité globale, projet de loi séparatisme et budget) pour apporter des réponses au malaise des forces de l’ordre. C’est un énorme cafouillage avec un côté amateur ». Le sénateur du Nord préconise « une grande loi structurante, de programmation » comme l’avait fait Nicolas Sarkozy en 2003 avec la loi sur la sécurité intérieure. Là encore, le rapport du Sénat sur le malaise des forces de sécurité intérieure en 2018 préconisait « l’adoption de lois de programmation des forces de sécurité intérieure permettant de fixer un cadre budgétaire, opérationnel stable et crédible ».

« On a besoin d’un préfet Grimaud dans cette période »

Le ministre de l’Intérieur a également reconnu un défaut d’encadrement des forces de l’ordre. « Il n’y a pas assez de chefs, de sous-chefs présents dans la rue […] il faut recréer un corps intermédiaire d’encadrement sur le terrain » a-t-il préconisé. « On ne peut pas se cacher uniquement derrière des problèmes de déontologie, de formation ou de crédits, le vrai sujet de fond, c’est le défaut de transparence. On a besoin d’un préfet Grimaud dans cette période » plaide Jérôme Durain. Maurice Grimaud, qui était le préfet de police de Paris lors des évènements de 1968. Sa lettre adressée aux forces de l’ordre est restée célèbre, comme cette phrase : « Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même ». Gérald Darmanin a par ailleurs réaffirmé « toute sa confiance au préfet de police de Paris, Didier Lallement.

Au sujet de la transparence, le ministre a écarté une proposition régulièrement demandée à gauche : Sortir, l’inspection générale de la police nationale (IGPN) du ministère de l’intérieur pour en faire un organe de contrôle indépendant, comme c’est le cas au Royaume-Uni. A minima, il s’est dit prêt à étudier l’idée de placer une personnalité indépendante à la tête de l‘lGPN.

 

 

 

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