La Commission européenne devrait pouvoir entrer en fonction dès le 1er décembre après l’accord entre les trois principaux partis européens sur le collège des commissaires. Un accord qui illustre la place centrale de la droite européenne, prête à s’allier avec l’extrême droite.
Surpopulation carcérale : le groupe communiste au Sénat veut « mettre les pieds dans le plat »
Par Lucille Gadler et Mathilde Nutarelli, images de Jérôme Rabier
Publié le
Le 8 septembre, Eliane Assassi, présidente du groupe communiste républicain citoyen et écologiste (CRCE) au Sénat, a présenté la proposition de loi déposée par son groupe visant à mettre fin à la surpopulation carcérale.
Elle précise d’entrée de jeu que le texte est « travaillé depuis très longtemps », avant que la polémique de « Kohlantess » ne défraye la chronique.
Composée de deux articles, cette proposition de loi vise à instaurer un mécanisme de régulation empêchant les dépassements de capacité dans les prisons. En pratique, avec ce dispositif, le seuil d’occupation des établissements pénitentiaires serait fixé à 90 %, se fondant sur le modèle allemand, avec 10 % de places réservées. Le juge de l’application des peines devra être saisi par l’administration pénitentiaire lorsque l’admission d’un détenu obligera à utiliser l’une des places réservées. Il examinera les possibilités de réduction de peines pour les détenus ayant encore 6 mois à effectuer.
« C’est une proposition de loi qui ne nécessite pas de budget en plus », explique Eliane Assassi. A la construction de nouvelles prisons, elle préfère en effet la rénovation et la régulation de celles existantes, ainsi que le changement de doctrine concernant la politique carcérale.
Surpopulation carcérale : une situation « inhumaine et indigne »
Cette proposition de loi est déposée alors que la situation carcérale en France est plus que tendue. Le rapport annuel de la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) publié en juin 2022 fait en effet état d’une augmentation de la densité carcérale entre 2021 et 2022, passant de 107,5 à 117,1 %.
Ce texte vise à intervenir dans une situation qu’Eliane Assassi juge « inhumaine et indigne ». Il faut « mettre les pieds dans le plat », dit-elle. Elle explique que la situation est intenable pour les détenus et pour le personnel pénitentiaire.
Le dépôt de cette proposition de loi intervient quelques semaines après la visite surprise de la prison de Fresnes par les sénateurs communistes du Val-de-Marne Laurence Cohen et Pascal Savoldelli. « J’avais honte », témoigne Pascal Savoldelli, décrivant des parloirs en sous-sol, avec une forte odeur de pourriture, « irrespirables ». Laurence Cohen parle, elle, de « double peine ». Elle décrit une peinture qui « s’écaille immédiatement » après avoir été mise, du fait de l’extrême humidité.
La France fait office de mauvaise élève parmi les pays de l’Union Européenne en ce qui concerne les conditions de détention. En effet, elle a été condamnée en 2020 par la Cour européenne des droits de l’Homme, sur une plainte de l’Observatoire International des Prisons, pour conditions de détention dégradantes et inhumaines.
Une proposition de loi soutenue par les acteurs du milieu
La proposition de loi des communistes a été élaborée avec le concours de l’Observatoire International des Prisons, du Syndicat des avocats de France (SAF) et du Syndicat de la magistrature. Eliane Assassi salue un « débat extraordinaire ».
La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot se « réjouit de la proposition de loi qui fait écho à ses recommandations » et la soutient. En effet, elle plaide depuis des années pour une réforme carcérale en ce sens.
Maître Thomas Fourrey, secrétaire général du SAF, salue également cette proposition de loi « pas facile et courageuse ». Il ne mâche pas ses mots sur la situation des prisons en France : « c’est une honte française ».
« Ce texte n’est que la première étape »
Eliane Assassi et ses collègues ne veulent pas s’en arrêter là. « Ce texte n’est que la première étape d’un texte qui sera plus global sur la politique pénitentiaire », explique-t-elle. Elle souhaite déposer une proposition de résolution plus globale sur la politique carcérale. « C’est un texte d’urgence », explique-t-elle.
Le secrétaire général du SAF abonde : « C’est la première étape d’un changement de paradigme quant à la philosophie carcérale française. On trouve un mécanisme qui donne du sens à la peine ».
Pour l’instant, il n’y a pas de calendrier précis pour l’examen de ce texte. « Nous déciderons démocratiquement au sein du groupe quels textes seront examinés dans nos niches parlementaires », explique la présidente. Affaire à suivre…