Sport et vie associative : le Sénat rejette un budget qu’il juge trop généreux avec le SNU
Vendredi soir, le Sénat a rejeté le budget en hausse de la mission « sport, jeunesse et vie associative ». Pour les élus, les crédits font une part trop belle au service national universel aux détriments des associations.
Durement touché par les conséquences économiques de la crise sanitaire, le secteur du sport bénéficie de 802 millions d’euros de crédits pour 2021, soit 20 % de plus que l’année précédente. Mais comme l’ont fait remarquer bon nombre d’orateurs et la ministre Roxana Maracineanu, elle-même, « cette progression globale du budget s’inscrit dans un élan vers les Jeux Olympiques et paralympiques de 2024. 105 millions de plus […] ce sont des fonds qui sont principalement alloués à la Solideo (société de livraison des ouvrages olympiques dont l’État est le principal financeur.
« Où sont vos amendements ? Ce n’est pas respectueux de la Haute assemblée »
Le monde sportif, le tissu d’associations et de fédérations amateures ou professionnelles qui le composent ont, cette année, régulièrement souffert de la comparaison avec les aides allouées au monde de la culture, poussant l’exécutif à annoncer de nouvelles aides ces dernières semaines (voir notre article).
Mais pour l’ancien ministre des Sport, le président du groupe PS du Sénat, Patrick Kanner, « les annonces faites par le président de la République n’ont aucune traduction sous forme d’amendements à ce budget. Où sont vos amendements ? Ce n’est pas respectueux de la Haute assemblée » a-t-il tancé.
Malgré un avis favorable de la commission des Finances pour l’adoption des crédits de la mission, cette dernière n’a pas été adoptée.
Doublement du budget du SNU
En effet car outre le budget des sports, cette mission couvre la vie associative et la jeunesse. Et de l’avis des sénateurs de tous bords, ce programme fait une part bien trop belle au service national universel (SNU), promesse du candidat Macron lors de la campagne présidentielle mais qui est encore en phase d’expérimentation. « Certes les crédits connaissent une augmentation de 39,52 millions d’euros, ils atteignent désormais 699 millions d’euros. Toutefois, le doublement du budget du SNU explique cette augmentation […] 60 millions d’euros soit 10 % des crédits du programme » a relevé Jean-Jacques Lozach rapporteur PS pour avis de la commission de la Culture.
Colonies de vacances
De droite comme de gauche, les amendements destinés à piocher dans les crédits du SNU pour les redistribuer aux associations ont fusé dans l’hémicycle, de quoi faire perdre, parfois, le fil des débats. On retiendra l’adoption de plusieurs amendements LR. Un amendement du sénateur Max Brisson, transfère à hauteur 10 millions d’euros les crédits afin de prolonger en 2021 le dispositif « vacances apprenantes ». Un autre du sénateur Michel Savin, ponctionne également à hauteur de 10 millions d’euros le SNU en direction d’un nouveau programme « Fonds de soutien aux colonies de vacances et classes de découverte ».
Le sénateur socialiste, Jean-Jacques Lozach a, lui, fait passer un amendement qui redirige 3 millions destinés au SNU pour le déploiement des maisons sport-santé.
« Faire une pause dans ce dispositif et redispatcher les crédits »
« Les conséquences de la crise financière, c’est 1,5 milliard sur les associations […] l’expérimentation qui a eu lieu sur 13 départements et qui devait s'élargir sur l’ensemble de la France pour les raisons sanitaires que l’on connaît. Quoi qu’on pense du SNU, je crois qu’on peut tous se retrouver pour faire une pause dans ce dispositif et redispatcher les crédits sur des acteurs qui en ont besoin » a résumé la sénatrice communiste, Céline Brulin.
« Si on vote tous les amendements, Mme la ministre, vous repartez du Sénat, vous n’avez plus de SNU. Ce sera rétabli à l’Assemblée. On fait de la gesticulation sénatoriale » avait prévenu Éric Jeansannetas, rapporteur PS de la mission.
Il n’y aura pas eu cette gesticulation. Après le vote de quelques amendements, cités plus haut, en raison d’un grand nombre d’abstentions, l’ensemble de la mission a été rejeté.
Les sénateurs ont, toutefois, adopté un amendement de la sénatrice LR, Elsa Schalck, qui insère un article additionnel. Il demande au gouvernement de présenter un rapport précis et détaillé du SNU, son déploiement et son coût, à l’automne prochain.
Alors que François Bayrou souhaite pouvoir avoir le ministre de l’Intérieur sortant dans son équipe, Bruno Retailleau a obtenu les garanties qu’il attendait, selon l’entourage du ministre. Il est prêt à lâcher l’idée d’un grand texte immigration, qui susciterait une levée de boucliers, pour « saucissonner » les sujets via plusieurs propositions de loi. Globalement, les LR sont rassurés et devraient rester au gouvernement.
Alors que le premier ministre a demandé aux partis de se positionner par rapport à l’exécutif selon trois choix, les partis de gauche ne souhaitent pas rentrer pas dans le jeu de François Bayrou. Ils attendent des signaux qui pourraient les amener à ne pas censurer. Mais ils ne les voient toujours pas…
C’est le signe d’ouverture vers la gauche qu’on retient de la réunion, ce jeudi 19 décembre, entre les différents représentants des partis politiques (hors Rassemblement national et La France insoumise) et François Bayrou. Le nouveau Premier ministre propose de remettre en débat la réforme des retraites, pour aboutir à un nouveau compromis avec les partenaires sociaux d’ici septembre. Sans nouvel accord, c’est la réforme adoptée en 2023 qui continuerait à s’appliquer. « Lorsque François Bayrou met tous les représentants de partis et de groupes autour de la table, je pense qu’il envoie un signal d’ouverture qui va le légitimer. Il est conscient de la situation politique inédite et il tend des mains », salue la députée Renaissance Eléonore Caroit, sur le plateau de Parlement Hebdo, au lendemain de la rencontre. « Au lieu d’avoir cette posture de contestation permanente, travaillons ensemble ! » « La première des choses, c’est de suspendre l’application de cette réforme, pour permettre aux 50 000 salariés qui devaient partir en retraite et qui en ont été empêchés cette année de pouvoir le faire », rétorque le sénateur communiste Ian Brossat. Une position partagée par l’ensemble des partis de gauche, à la sortie de la rencontre à Matignon la veille. Tous attendent davantage de compromis de la part du Premier ministre, avant de s’engager à ne pas le censurer. « Pour l’instant, il n’y a absolument rien qui garantisse à François Bayrou d’échapper à une motion de censure, parce que tout ce qu’il dit va dans le sens d’une perpétuation des politiques macronistes menées depuis 7 ans », fustige le sénateur communiste. Une position que dénonce vivement la députée Renaissance : « S’il faut revenir sur cette réforme, s’il y a des choses à améliorer, je suis tout à fait prête à ce qu’on en discute. Mais je pense qu’il faut qu’on arrête de polariser le débat. Au lieu d’avoir cette posture, cette attitude de renfermement et de contestation permanente, travaillons ensemble ! » Ian Brossat dénonce un « déni de démocratie » Ce n’est pas la première fois que le débat des retraites revient sur la table ces derniers mois. À la fin du mois de novembre, La France insoumise avait profité de sa niche parlementaire à l’Assemblée pour introduire une proposition de loi visant à abroger la réforme. Après des débats houleux, le texte n’avait pas pu être voté en raison du trop grand nombre d’amendements déposés par les groupes de la droite et du centre. « Lorsqu’ils ont eu la possibilité de voter aux dernières élections, les Français ont massivement soutenu des partis politiques qui s’engageaient à abroger la réforme. Quand ce sujet a, à nouveau, été débattu à l’Assemblée, les députés macronistes ont pratiqué l’obstruction pour éviter le vote d’une loi d’abrogation », dénonce Ian Brossat. « Si nous étions dans un pays véritablement démocratique, cette réforme serait déjà abrogée », ajoute-t-il, dénonçant un « déni de démocratie ». Une expression qui ne passe pas pour Eléonore Caroit. « C’est une réforme dont l’examen a pris trois semaines, vous pensez qu’elle aurait pu être abrogée dans une niche parlementaire ? C’est fantaisiste », fustige la députée. De son côté, François Bayrou a répété sur le plateau de France 2 après la rencontre à Matignon, qu’il était ouvert à une autre solution que le report de l’âge de départ de 62 à 64 ans pour financer le système des retraites. Le nouveau Premier ministre a notamment rappelé qu’il avait été « un militant de la retraite à points ».
Les chefs de partis et de groupes parlementaires étaient reçus à Matignon par François Bayrou, qui promet de former un gouvernement « avant Noël ». Une rencontre dont les socialistes, écologistes et communistes ressortent sans avoir « trouvé de raison de ne pas censurer » le nouveau Premier ministre, rapporte Olivier Faure.