Les sénateurs n’en finissent plus de réclamer des explications sur les raisons et le contexte de l’annulation par l’Australie d’un super contrat pour l’achat de sous-marins français. Lundi, la sénatrice centriste de l’Orne Nathalie Goulet demandait l’ouverture d’une commission d’enquête. Ce mardi, ce sont les élus du groupe socialiste, écologiste et républicain qui réclament que la commission des Affaires étrangères se dote des prérogatives d’une commission d’enquête pour pouvoir se saisir de cette affaire, à l’origine d’une importante crise diplomatique entre Paris, Canberra, Washington et Londres. Dans un communiqué, les élus demandent « toute la lumière sur la rupture d’un engagement qui met à mal la diplomatie française et fragilise une industrie et des emplois sur nos territoires. »
Le président Gérard Larcher pourrait donner son feu vert « dans les prochaines heures », souffle le sénateur socialiste Rachid Temal, également membre de la commission des Affaires étrangères. Le président de la chambre haute devait s’entretenir dans la journée avec Patrick Kanner, le président du groupe SER.
« Nous voulons savoir ce qu’il s’est passé. Nous le devons aux Français et aux salariés de Naval Group »
Mercredi, l’Australie a brutalement rompu un contrat de vente passé avec la France pour la construction de 12 submersibles par Naval Group, contrat estimé à 56 milliards. Dans la foulée, la Maison Blanche a annoncé une alliance entre les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Australie, visant à doter celle-ci de sous-marins à propulsion nucléaire. « L’annulation de ce contrat est un véritable affront à notre pays et à l’Europe », s’indignent les sénateurs dans leur communiqué. « Jamais la France n’a été autant humiliée. Nous voulons savoir ce qu’il s’est passé. Nous le devons aux Français et aux salariés de Naval Group qui seront impactés », abonde Rachid Temal.
Si elle voit le jour, cette commission d’enquête devra aussi se pencher sur d’éventuels ratés de la diplomatie et des renseignements français. « Comment en est-on arrivé là ? Comment le Quai d’Orsay comme nos services de renseignement n’ont-ils pu détecter les signes d’une telle opération ? La France a-t-elle péché par excès de confiance ? », interroge le communiqué. « Cela pose quelques questions sur nos services qui n’ont pas vu se lier une alliance entre les Américains, les Australiens et les Britanniques », pointait lundi, auprès de Public Sénat, Nathalie Goulet.
Identifier les failles pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise
À l’inverse, Christian Cambon, le sénateur LR du Val-de-Marne et président de la commission des affaires étrangères, se montrait plus sceptique sur les possibilités d’investigation des sénateurs. « Nous ne sommes pas en mesure d’aller enquêter sur place, en Australie et aux États-Unis », a-t-il relevé, également auprès de Public Sénat. Il entendait toutefois lancer une série d’auditions, en convoquant Jean-Yves Le Drian le ministre des Affaires étrangères, le directeur général de la DGSE et des représentants de Naval Group. À ce jour, le calendrier de ces auditions ne semble pas encore fixé, Jean-Yves Le Drian s’étant envolé lundi pour les États-Unis en vue de l’Assemblée générale annuelle de l’Organisation des Nations unies à New York.
« Une commission d’enquête est capable d’aller plus loin que de simples auditions », plaide Rachid Temal. « Nous serons potentiellement en mesure d’identifier d’éventuelles erreurs dans la chaîne de transmission des informations. Et ainsi faire des recommandations pour être en capacité d’éviter qu’une chose pareille se reproduise. »