L’examen du projet de loi Climat se poursuit en ce lundi 28 juin, pour sa dernière journée dans l’hémicycle. Les sénateurs ont examiné un article prévoyant de réguler l’implantation de locaux commerciaux afin de lutter contre l’artificialisation des sols. Ils ont décidé d’y inscrire, contre l’avis du gouvernement, une limitation des entrepôts d’e-commerce.
Les entrepôts « mystérieusement absents du projet de loi »
L’article de départ prévoit d’interdire la construction, en artificialisant les sols, de nouvelles surfaces commerciales de plus de 10 000 mètres carrés. La ministre chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, salue dans l’hémicycle un « article structurant », issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, qui permettra de « mettre fin au modèle des grands centres commerciaux ».
Pourtant, un absent important est remarqué par les sénateurs, qu’ils soient socialistes, écologistes, communistes ou LR : les entrepôts, en particulier ceux d’e-commerce. Pour le sénateur socialiste de la Haute-Vienne Christian Redon-Sarrazy, « une fois de plus, le secteur de l’e-commerce passerait à travers les mailles du filet ». Un avis partagé par le rapporteur Jean-Baptiste Blanc (LR), pour qui les entrepôts sont « mystérieusement absents du projet de loi ».
« Le bilan économique, social et environnemental du modèle promu par les multinationales du commerce en ligne est dévastateur […]. Il va à l’encontre de l’objectif de relocalisation de notre économie. Il est destructeur pour l’emploi […], pour les droits de salariés, pour le tissu du commerce de proximité et la ruralité, pour les finances publiques et pour le climat et la biodiversité. », admoneste le sénateur écologiste d’Ille-et-Vilaine Daniel Salmon, visant directement les géants de la vente en ligne comme Amazon.
Le rapporteur introduit le contrôle des entrepôts d’e-commerce
En commission des affaires économiques, le Sénat a réécrit l’article, en remplaçant notamment la notion de surface de vente par celle d’emprise au sol, ou encore en octroyant la possibilité aux maires de soumettre un projet de moins de 1 000 m² à une autorisation d’exploitation commerciale. Cette autorisation, délivrée par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC), est aujourd’hui obligatoire pour la plupart des projets commerciaux de plus de 1 000 m².
En ce qui concerne les entrepôts, un amendement du rapporteur a été adopté en hémicycle afin de les inclure dans le texte. Il soumet ainsi à « autorisation d’exploitation commerciale les entrepôts principalement consacrés au commerce électronique à destination des consommateurs, lorsque leur surface de plancher est supérieure à 5 000 mètres carrés et qu’ils ne sont pas situés sur une friche ». Les sénateurs écologistes, favorables à une version plus sévère de la disposition, ont tenté en vain de supprimer la dérogation prévue en cas de construction d’un entrepôt sur une friche.
Cet ajout s’est effectué contre l’avis de la ministre, qui considère qu’il ne faut pas « confondre » régulation de l’e-commerce et lutte contre l’artificialisation des sols. « Il y a des avancées [au sujet de la régulation des entrepôts d’e-commerce] dans ce texte », argue Emmanuelle Wargon.
« Il faut stopper l’amazonisation de la France »
Mais le jeu n’est qu’en partie gagné pour les sénateurs assis à la gauche de l’hémicycle. En effet, les groupes communiste, socialiste et écologiste souhaitaient tous les trois une régulation bien plus forte des entrepôts d’e-commerce, afin de « stopper l’amazonisation de la France », selon les mots de Daniel Salmon.
Ils ont ainsi proposé des amendements cherchant à soumettre les entrepôts d’e-commerce de plus de 1 000 m² au régime de l’autorisation commerciale et à instaurer un moratoire sur la création d’entrepôts logistiques de plus de 3 000 m². Faute d’avis favorable de la part du rapporteur Jean-Baptiste Blanc, qui critique des mesures « trop restrictives », ces amendements n’ont pas été adoptés.
Loi Climat : pour Daniel Salmon, il faut stopper l'"amazonisation" de la France