Deux ans se sont écoulés depuis le Ségur de la santé, et force est de constater que la situation de l’hôpital en France reste extrêmement tendue et préoccupante. L’été s’annonce à haut risque, dans un contexte de fermetures ou de réductions d’activité dans plusieurs services d’urgence. Ce 7 juin, une journée de mobilisation et de grève a été lancée à l’appel de neuf organisations syndicales et collectifs. Ces représentants des soignants, épuisés par les sous-effectifs chroniques, alertent à nouveau sur les dangers d’un système de santé proche de l’asphyxie. « Hôpital désespérément maltraité : il va y avoir des morts », mettent-ils en garde dans un communiqué commun.
Leurs revendications demeurent « inchangées » depuis 2019. Ils demandent notamment des recrutements supplémentaires et immédiats, pour permettre un « ratio de personnel adapté à la charge de travail ». Les syndicats plaident pour une « revalorisation générale » des salaires, pour « rattraper les dix ans de blocage », ainsi qu’une prise en compte du travail durant la nuit et les week-ends. Outre un renforcement « significatif » des moyens financiers dédiés à l’hôpital, un arrêt de la fermeture des établissements et de services est exigé.
Le malaise prégnant des personnels hospitaliers n’a pas laissé l’Elysée indifférent. En réaction, Emmanuel Macron a annoncé le 31 mai une « mission flash », d’une durée d’un mois, pour « dès cet été apporter des réponses très fortes pour consolider nos urgences dans cette période ». Elle est conduite par François Braun, président du syndicat Samu-Urgences de France (SUdF). Son rapport, attendu au plus tard le 1er juillet, devra notamment dresser une cartographie des manques et des pénuries de professionnels de santé et recenser les difficultés traversées par les soignants.
« Que va nous apprendre une nouvelle mission ? »
L’initiative a été jugée de mauvais goût à la commission des affaires sociales, qui a eu l’occasion de travailler plusieurs mois sur cette problématique, en multipliant les auditions. Au lendemain de l’annonce présidentielle, la sénatrice Catherine Deroche (LR) qui préside la commission, et auteure du rapport de la commission d’enquête sur l’hôpital, s’est étonnée du lancement d’une énième mission. « Les constats, nous les connaissons et nous avons rendu fin mars le rapport de la commission d’enquête sur l’hôpital après quatre mois de travaux. Que va nous apprendre une nouvelle mission ? Que l’hôpital manque d’infirmiers, de manipulateurs radio, de kinés ? Nous le savons. Que la médecine de ville doit être rapidement mobilisée pour soulager l’hôpital ? Nous l’avons recommandé. Que le Gouvernement utilise nos travaux, ce sera du temps gagné pour l’hôpital ! » a-t-elle réagi.
La sénatrice du Maine-et-Loire appelle donc à se saisir sans tarder des préconisations formulées par le Sénat, dont beaucoup font écho aux revendications des soignants, comme la revalorisation des gardes de nuit et des week-ends. La commission sénatoriale recommandait par ailleurs de mieux coordonner la permanence des soins par les médecins généralistes, de recruter en urgence des infirmiers afin de soulager les services d’urgence.
La parlementaire s’étonne surtout « que le recensement des besoins établissement par établissement, territoire par territoire, jugé impossible par le ministère quand le Sénat le réclamait, soit désormais annoncé dans le mois par le Président de la République. » En février, une audition de la direction générale de l’offre de soins (DGOS), dépendante du ministère de la Santé, s’était crispée sur ce point en particulier.