Alors que les députés PS soutiennent l’abrogation de la réforme des retraites portée par La France insoumise, qui efface également le mécanisme mis en place par l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sous François Hollande, le sénateur Bernard Jomier (Place publique), appelle les parlementaires de gauche à ne pas aller trop loin face aux enjeux démographiques.
Incendie de Lubrizol : « Il est retombé une pluie de poussière d’amiante »
Par Public Sénat
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Quatre mois après l’incendie de Lubrizol, les auditions concernant cette affaire se poursuivent au Sénat ce mardi. Cette fois, la commission d’enquête Lubrizol se penche sur les questions de toxicologie et les questions de gestion de crise.
André Picot, président de l'association Toxicologie Chimie, assure que non seulement de l’amiante s’est bien dispersée lors de l’incendie de Lubrizol, « il y avait un toit en fibrociment (…) Il est retombé en pluie de poussière d’amiante » mais surtout que les populations en contact immédiat (comme les pompiers) ont été touchées. Ces propos sont en contradiction avec la version des autorités expliquant qu’il n’y a pas eu de fibres d’amiante dans l’air.
Le président de l'association Toxicologie Chimie a rappelé la toxicité de l’amiante à long terme : « Une des propriétés de l’amiante, c’est de déclencher des cancers de l’enveloppe des poumons, la plèvre. » Il a raillé le ministère de la Santé de ne pas être « très au fait de ce problème » : « Devant la pression des médias Madame Buzyn a demandé des analyses (…) de sang de l’état du foie de ces pompiers. Or tout le monde sait très bien que l’amiante n’a aucun impact sur le foie. Ils auraient mieux fait de vérifier un petit peu l’état de leur tractus pulmonaire. » Lorsque la sénatrice socialiste de la Charente Nicole Bonnefoy corapporteure de cette commission, a rappelé la position de la directrice de l’ARS (agence régionale de Santé) de Normandie lorsqu’elle a été auditionnée expliquant qu’il n’était pas nécessaire de faire de scanner pulmonaire pour recherche d’amiante parce qu’on n’en a pas trouvé dans l’air, André Picot a répondu en parlant de l’ARS : « C’est un peu désolant (…) On n’a beaucoup de mal à leur faire confiance … »
Concernant les suies qui ont recouvert les environs de l’usine, le toxicochimiste est catégorique : « À l’heure actuelle, on est incapable de savoir exactement les retombées que ça peut avoir sur la population. On n’a aucun élément. »
Importance d’impliquer les citoyens
Également auditionné, Patrick Lagadec, directeur de recherche honoraire à l’École polytechnique, travaille sur la maîtrise des risques et la gestion des crises. Il est convaincu qu’il est urgent d’avoir une maîtrise des risques à un niveau plus global en pensant aux interactions possibles. C’est-à-dire d’avoir « une approche des systèmes à risque et non plus installation par installation. » : « Quand j’ai entendu cet argument [à propos de l’incendie à Lubrizol - NDLR], ça vient de l’extérieur donc ce n’est pas nous », je me suis dit là, il y a un problème de philosophie générale et de politique générale de gestion des risques. »
Pour cet expert, il est bien sûr évident que les autorités de contrôle « pour être efficaces », « doivent être fortes, indépendantes et respectées ».
Quant aux « pilotages » de crise, ils sont « dépassés et à réinventer » : « Les moyens d’alerte sont d’un autre âge ».
Patrick Lagadec estime qu’il est fondamental d’avoir « la capacité culturelle à donner de l’information même si on n’a pas les éléments, même si on ne peut pas rassurer ».
Le directeur de recherche honoraire à l’École polytechnique souligne également l’importance d’impliquer les citoyens : « Quand on fait un exercice [de sécurité], « ne pas leur dire : « il y a aura un exercice dans trois mois, surtout ne faites rien, on vous dira ce qu’il faut faire » mais plutôt aller voir le directeur de l’école, le directeur de l’hôpital etc. [et dire] « Qu’est-ce qu’il vous serait utile que l’on fasse avec vous ? » Il y a vraiment une confiance partagée dans l’apprentissage collectif de situations compliquées. »
Pour Patrick Lagadec, inspiré par le modèle belge « en avance sur nous », s’il n’y a pas de changement décisif, « on s’expose à des drames et on laissera à Google ou à d’autres, toute l’attitude pour prendre en charge les alertes et éventuellement les manipuler à leur aise. »
Interrogé plus avant par les sénateurs, sur les risques grandissants de fake news sur les réseaux sociaux en cas d’accident de type Lubrizol, Patrick Lagadec insiste sur la nécessité pour les pouvoirs publics de bien les connaître, de biens maîtriser ses codes : « Il y a beaucoup de préfectures qui s’y mettent ». Pour cet expert, la fausse information va devenir « structurelle » car lorsqu’il y a beaucoup d’angoisse, elle émerge : « Sachant que l’on ne pourra pas l’éteindre, le problème numéro 1 sera de ne pas la favoriser (…) Donc ça suppose un terrain de confiance qui soit développée en permanence. »
Et Patrick Lagadec de marteler combien la confiance de la population est nécessaire alors que fragilisée. Si les entreprises et les services publics ne modifient pas leurs méthodes, ils détruiront cette confiance.
La commission d’enquête sur l’incendie de Lubrizol poursuit ses travaux ce jeudi avec le préfet Alain Thirion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises.