Alors que les députés PS soutiennent l’abrogation de la réforme des retraites portée par La France insoumise, qui efface également le mécanisme mis en place par l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sous François Hollande, le sénateur Bernard Jomier (Place publique), appelle les parlementaires de gauche à ne pas aller trop loin face aux enjeux démographiques.
Éric Bocquet demande une annulation de la dette française
Par Cécile Sixou
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Éric Bocquet s’intéresse à la question de la dette publique depuis longtemps. Avec la crise du coronavirus, il n’a aucun doute, « la dette va augmenter, ça va être l’enjeu d’une bataille politique forte ». En 2020, la France devrait emprunter 230 milliards d’euros, mais « ce sera probablement beaucoup plus » estime le sénateur communiste.
Les voyants sont au rouge mais cela n’empêchera pas la France de contracter de nouveaux prêts selon le sénateur, « on est au bord de l’apocalypse, surendetté mais on va nous prêter, parce que les titres français s’arrachent comme des petits pains, on a une bonne signature ». C’est la crédibilité et la fiabilité économique de la France qui permettent d’avoir la confiance des marchés financiers selon Éric Bocquet. « En 2019, le taux moyen d’emprunt était de 0,11 %, mais on nous prête même à des taux négatifs, ils sont prêts à ne pas gagner d’argent avec nous ». Mais lui reste circonspect sur ce système : « je me demande comment fait-on pour prêter à un pays fou comme le nôtre ? ».
La dette « un impératif absolu »
Car la dette coûte cher selon lui, 38 milliards d’euros d’intérêts reversés aux marchés financiers en 2019, « ce n’est pas rien » estime le sénateur, « un peu plus que le budget de la défense, un peu moins que ce que nous rapporte l’impôt sur les sociétés de 48 milliards d’euros ».
Une grosse facture pour la France, mais ce n’est pas tout selon Éric Bocquet, le remboursement de la dette serait aussi devenu la ligne directrice de nos politiques économiques et sociales. « Je suis membre de la commission des finances du Sénat et dès que l’on débute l’examen d’un projet de loi de finances, la première chose qu’on nous rappelle comme un absolu impératif, c’est la dette, c’est un couplet que l’on doit avoir en tête ». La dette serait donc le premier des critères pour élaborer les budgets de l’État « on nous dit, on ne peut pas mettre de l’argent dans les hôpitaux, dans l’école, dans les logements sociaux, parce qu’il y a la dette ». Cette obsession de réduire la dette empêcherait le financement du modèle social français. « C’est comme ça qu’on justifie toutes les politiques menées par les gouvernements successifs, au-delà des alternances ».
Et pour Éric Bocquet, ce n’est pas l’état qui va rembourser, « mais les Français ». « On dit aux Français, on vit au-dessus de nos moyens, vous ne travaillez pas assez, il faut revoir les 35 heures, réformer le système des retraites, les services publics coûtent cher ». Le gouvernement a un discours « culpabilisant » d’après le sénateur et « ça ne va pas se calmer avec la crise, ça va même s’alourdir », au final « ce sont les contribuables qui vont payer ».
Annuler la dette de la France
Comment s’en sortir ? Éric Bocquet s’est penché sur la question. Et l’option du remboursement est pour lui une mission impossible. « Il n’y a pas eu d’État dans l’histoire qui a réussi à rembourser sa dette, j’ai cherché, et je n’ai pas trouvé ». La dette est « perpétuelle » et difficile de trouver une porte de sortie quand « deux tiers des emprunts servent à combler la dette antérieure et le tiers restant est pour le déficit de l’année », selon le sénateur communiste.
Il propose donc une annulation de la dette « pour s’affranchir de la tutelle des marchés financiers, et reprendre le pouvoir monétaire ». En d’autres termes, il souhaite que ce ne soit plus les banques privées qui prêtent de l’argent à l’État français mais la banque centrale européenne (BCE). « Il faut que la BCE reprenne la dette dans son bilan, car elle n’est pas tenue de faire des bénéfices ». Or, aujourd’hui la BCE n’a pas le droit de financer les États, c’est interdit par le traité de Maastricht de 1992. « Il faudrait donc changer les traités européens pour que cela soit possible », estime le sénateur. « C’est ce qu’ont fait d’autres pays comme Le Royaume-Uni ou les États-Unis », explique le sénateur, « ils viennent d’autoriser le rachat de leurs dettes par leurs banques centrales ». « C’est une question de décision politique de maîtriser sa monnaie, sa politique, son financement, autrement on est sous la tutelle des marchés financiers ».
Le sénateur a bien conscience qu’il s’attaque à une « montagne », il compte tout de même poser le débat avec son groupe, le groupe communiste, et engager une bataille idéologique sur cette question. Il aimerait proposer une mission d’information au Sénat après le renouvellement sénatorial, normalement prévu en septembre prochain.