Devant les sénateurs, Pap Ndiaye est venu présenter un premier budget en hausse, avec une « augmentation forte et inédite » des crédits de son ministère, avec 3,7 milliards d’euros supplémentaires, soit un budget de 59,7 milliards d’euros et 6,5 % de croissance par rapport à 2022. Cette augmentation, comme pour quasi tous les budgets ministériels cette année, doit être mise au regard de l’inflation, évaluée à 5,6 % par l’INSEE en septembre. « La commission des Finances ne peut que se réjouir qu’il y ait un peu plus d’argent », a admis Gérard Longuet, rapporteur du budget de l’enseignement scolaire au Sénat, rejoint par Max Brisson, autre sénateur LR spécialiste du sujet, qui n’a pu que « saluer les 935 millions d’euros obtenus de Bercy pour les revalorisations. »Le ministre de l’Education nationale est ensuite revenu dans le détail sur les sommes affectées à cette fameuse revalorisation des enseignants, le poste de dépense « qui compte le plus dans cette augmentation du budget 2023 », afin de « reconnaître l’engagement sans faille des enseignants » : « Ce choc d’attractivité qu’un rapport du Sénat soulignait à juste titre récemment, vous le trouvez dans ce budget avec 935 millions d’euros consacrés à la revalorisation des enseignants, pour les seuls quatre derniers mois de l’année 2023, puisqu’elles seront effectives en septembre 2023. »
Revalorisations : la part « inconditionnelle » et la part « pacte »
635 millions seront consacrés dans le projet de lois de finances pour 2023, à la part dite « inconditionnelle » des revalorisations, qui sera donc automatique et « concentrée sur la première partie de carrière pour casser le faux plat qui caractérise les progressions de salaires à ce moment-là », a précisé le ministre. Sur une année complète, cette revalorisation « inconditionnelle » représentera 1,9 milliard d’euros, pour aboutir à une hausse totale de 10 % des salaires, avec notamment la hausse du point d’indice, et ainsi atteindre l’objectif de ne plus avoir d’enseignant payé moins de 2000 euros net par mois. Pap Ndiaye a assuré que les « personnels en fin de carrière ne seraient pas oubliés », avec notamment une amélioration de l’accès aux « grades finaux », comme la « hors classe » qui devrait augmenter les rémunérations en fin de carrière.Vient ensuite la part dite « pacte » de la revalorisation des enseignants, qui financera à hauteur de 300 millions d’euros pour 2023, une hausse supplémentaire des salaires « à condition d’exercer de nouvelles missions, qui sont parfois déjà réalisées sans être pleinement valorisées. » Pour ne pas préempter la concertation sur le sujet avec les syndicats d’enseignants qui a commencé le 3 octobre et devrait se clore en février, le ministre de l’Education nationale a cité, à titre d’exemple, la formation continue hors temps d’enseignement, le suivi individualisé des élèves et l’aide à l’orientation, les remplacements de courte durée ou encore la réalisation de projets pédagogiques.
10 % d’augmentation pour les AESH obtenus à l’Assemblée
« Mais les réponses que vous aborderez ne seront pas sans effet sur l’engagement de mes collègues qui ne sont pas tous aussi mesurés que je le suis devenu avec l’âge », a euphémisé le sénateur LR. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la Culture et de l’Education, a confirmé cette attente de réponse des sénateurs, qui allait un peu plus loin que les simples lignes budgétaires présentées par les services du ministère de l’Education nationale, et a donc finalement retenu Pap Ndiaye plus de 2h40 devant les sénateurs ce soir. Parmi les sujets d’inquiétudes soulevés par les sénateurs, l’avenir de
l’école inclusive, a occupé une bonne part des discussions. L’accès à l’Ecole pour les personnes en situation de handicap « demeure une priorité pour le ministère et le gouvernement », a assuré le ministre de l’Education nationale, qui a notamment avancé 4000 créations de postes d’Accompagnement des élèves en situation de handicap (AESH).
Pap Ndiaye a tout de même reconnu que « la hausse des notifications [d’élèves nécessitant un accompagnement], qui dépend des Maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH), est beaucoup plus rapide que celle du nombre de postes d’AESH. » Face à cette pression et « l’expression d’une préoccupation légitime à l’Assemblée nationale » sur la fragilisation de la situation matérielle des AESH à cause des tensions inflationnistes, une revalorisation de 10 % des AESH avait été « retenue », « selon le même calendrier que les enseignants », soit à la rentrée 2023, pour un budget de 80 millions d’euros supplémentaires.Ces différentes revalorisations « ne vont pas inverser brutalement » les difficultés de recrutement que rencontre actuellement l’Education nationale, a concédé Pap Ndiaye. « Il y a des facteurs liés aux conditions de travail, ou à la manière dont les jeunes se projettent dans un métier qui a été conçu pour des carrières qui durent jusqu’à la retraite. Alors qu’aujourd’hui, ils veulent des portes de sortie au bout d’une dizaine d’années, et des portes d’entrée pour des gens qui entrent après une autre expérience professionnelle », a ainsi ajouté le ministre de l’Education nationale, qui a aussi insisté sur la nécessité de revaloriser « la place symbolique des enseignants dans la société française » pour remédier à « un sentiment de déclassement qui va au-delà des simples questions financières. »