Covid-19 : le gouvernement face aux recours

Covid-19 : le gouvernement face aux recours

Après la crise du Covid-19, l’exécutif devra se préparer à rendre des comptes… L’opposition parlementaire annonce qu’une fois la crise terminée, des commissions d’enquête seront créées au Sénat et à l’Assemblée nationale. Par ailleurs, des recours ont également été déposés devant la Cour de justice de la République.
Public Sénat

Par Fanny Conquy et Alexandre Poussart

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Dans la gestion de cette crise du COVID-19, certains membres du gouvernement se seraient-ils rendus coupables de mise en danger de la vie d’autrui ? D’homicide involontaire ? Ou encore de non-assistance à personne en danger ? Plusieurs plaintes, en effet, ont été déposées dans ce sens auprès de la Cour de justice de la République à l’encontre du Premier ministre Édouard Philippe, de l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn et de son successeur Olivier Véran.

La Cour de justice de la République, qu’Emmanuel Macron entend supprimer à travers le projet de réforme constitutionnelle, est la seule à pouvoir  juger les membres du gouvernement pour les actes commis dans l’exercice de leur fonction. La Cour est composée de trois magistrats de la cour de cassation, et de douze parlementaires : six députés et six sénateurs. La commission des requêtes de la CJR doit se prononcer sur la recevabilité de ces plaintes sur la gestion de la crise du Covid-19. Pour Jean-Luc Fichet, sénateur socialiste du Finistère et membre suppléant de la Cour de justice de la République, « Le rôle de la CJR dans le bilan de cette crise sanitaire sera totalement justifié. Si les plaintes sont retenues, nous nous mettrons en fonctionnement. Au moment où la réforme des institutions d’Emmanuel Macron propose de supprimer la CJR, elle prend tout son sens. »

« Le gouvernement devra rendre des comptes »

Et les plaintes pourraient se multiplier … Sur les réseaux sociaux et sur le web, les pétitions citoyennes commencent à apparaître : comment expliquer la pénurie de masques et de gel hydroalcoolique ? Pourquoi le 1er tour des élections municipales a-t-il été maintenu ?  Alors qu’Agnès Buzyn, ancienne ministre de la Santé, déclarait dans le Monde du 17 mars avoir alerté sur la situation dès le mois de janvier : comment en est- on arrivé là ? L’exécutif a-t-il failli à ses devoirs … ?  Les auteurs de ces pétitions se disent prêts à aller devant la justice avec un objectif : que le gouvernement rende des comptes. Pour Jean-Luc Fichet, il faudra en effet des réponses : « les déclarations d’Agnès Buzyn dans Le Monde sont très graves. Elle a assuré avoir prévenu en janvier le chef du gouvernement de l’ampleur de l’épidémie à venir mais que son alerte n’a pas été prise en compte. Et dans les jours suivants, elle continuait à dire aux Français qu’ils ne courraient pas de risques. Il faudra analyser les conséquences de cette appréciation sur le traitement de la crise. Agnès Buzyn n’est pas isolée, il y a une responsabilité collective du gouvernement. »

Pour sa part, Laurence Rossignol, sénatrice PS et membre de la Cour de justice de la République, n’est pas favorable à la poursuite pénale du gouvernement dans cette affaire : « L’un des critères en droit pénal c’est l’intention. Il ne faut pas confondre faute pénale et faute politique. C’est pourquoi je suis favorable à une commission d’enquête sénatoriale sur cette crise pour déterminer les fautes politiques. Cette commission dira ensuite s’il y a des infractions pénales qui ont été constituées. »

Des enquêtes parlementaires prévues

Au Sénat en effet, une commission d'enquête sur la gestion de la pandémie sera créée. Pour Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, il s’agira de « créer cette commission avec tous les groupes politiques, de façon concertée, mais une fois la crise passée. Car sur un tel sujet, pour le moment toute l’attention doit être concentrée sur la lutte contre ce virus ».  Objectif de la commission : « Tirer tous les leçons de cette crise. Chaque crise révèle ses faiblesses, et elles ont été nombreuses.».  Pour Rachid Temal, sénateur socialiste du Val-d’Oise, il sera nécessaire en effet de dérouler le fil des évènements, d’entendre tous les acteurs,  pour comprendre comment les choses se sont passées concrètement, quelles informations étaient à disposition, comment ces données ont circulé…et déterminer ainsi ce qu’il faut corriger.

Du côté de l’Assemblée nationale, le président du groupe LR Damien Abbad a annoncé dans le JDD qu’une commission d’enquête serait également créée à l’automne.

Mais la majorité, elle, regrette ces « polémiques ». Stanislas Guerini, délégué général de La République en marche, y voit « l'irresponsabilité de certains élus de l'opposition dans la période ». Pour Agnès Canayer, sénatrice LR de Seine-Maritime, membre de la Cour de justice de la République, et candidate sur la liste d’Édouard Philippe aux municipales au Havre, « ce n’est pas le moment de juger la gestion du gouvernement. Nous vivons une crise sans précédent, qu’on n’aurait pas pu imaginer. Il était très difficile de l’anticiper. »

Mais pour Bruno Retailleau « l’unité nationale ce n’est pas la cécité nationale. L’unité ce n’est pas faire taire les oppositions. Il faut de la clarté. Le rôle des oppositions est d’autant plus essentiel ». Rachid Temal explique « Il ne s’agit pas de politique politicienne. C’est salutaire de dire qu’il y aura de la transparence. La démocratie n’est pas mise en quarantaine. C’est notre rôle de parlementaires de porter la parole des Français, leurs inquiétudes, leurs questionnements. »

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