Cabinets de conseil : le gouvernement annonce de nouvelles règles pour les prestations informatiques

Cabinets de conseil : le gouvernement annonce de nouvelles règles pour les prestations informatiques

Le ministre de la fonction publique Stanislas Guerini veut « renforcer l’exigence » lorsque l’Etat se tourne vers des prestataires externes pour le conseil en informatique. Matignon publie une nouvelle circulaire, afin d’exiger une part minimum de réalisation interne pour les grosses missions.
Guillaume Jacquot

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La nouvelle doctrine du gouvernement en matière de recours aux cabinets de conseil s’élargit un peu plus. À l’approche du premier anniversaire des conclusions de la commission d’enquête sénatoriale, qui avait épinglé les dérives d’un « phénomène tentaculaire », l’État poursuit sa mue, avec la volonté de « renforcer l’exigence ». Une nouvelle circulaire interministérielle fixe de nouvelles règles pour l’achat de prestations de conseil dans les ministères et l’administration.

Stanislas Guerini, le ministre de la fonction publique précise, ce 6 février dans une interview donnée à l’AFP, que le texte signé par Élisabeth Borne vise les prestations informatiques. Ce domaine particulier, compte tenu de l’aspect technique des missions, représente une part très conséquente de l’ensemble des dépenses publiques en matière de conseil. Régulièrement, l’informatique était considérée par les sénateurs comme l’angle mort des engagements pris par le gouvernement, ces derniers mois.

Un objectif minimum d’internalisation

L’exécutif demande désormais de limiter la part de l’externalisation dans les prestations d’expertise et de réalisation informatiques. Les plus grosses missions devront être réalisées avec une part minimum de 20 % de compétences internes à l’administration. « L’État doit être plus exigeant et plus impliqué dans la maîtrise d’ouvrage », plaide Stanislas Guerini. Une première circulaire publiée en janvier 2022, à la veille d’une audition clé au Sénat, exigeait simplement de la part d’un ministère qu’il démontre que l’Etat ne dispose pas des ressources internes nécessaires avant d’externaliser la réalisation d’un projet.

Quant aux prestations de stratégie numérique, la règle sera la même que pour les prestations de conseil au sens large, selon le ministre. Autrement dit, il sera impossible de conclure plus de deux contrats d’affilée avec le même prestataire, et le coût cumulé d’une prestation sera plafonné à deux millions d’euros, y compris lorsqu’elle est répartie sur deux contrats. Le gouvernement avait mis en place ce référentiel le 29 juillet 2022.

Le texte des sénateurs « pas forcément caduc »

Avec ces nouvelles règles, le ministre de la fonction publique estime que le gouvernement anticipe « la quasi-totalité des exigences inscrites dans la proposition de loi » adoptée à l’unanimité au Sénat le 19 octobre. Selon lui, le texte sénatorial qui reprenait les préconisations législatives de la commission d’enquête n’est « pas forcément caduc ». « On peut toujours réinscrire dans la loi ce qui est déjà effectif dans la pratique. Moi, ce qui m’intéresse, c’est l’effectivité des mesures que nous prenons, et notre capacité à avancer. En l’occurrence, aujourd’hui, on franchit une grande étape », a-t-il expliqué.

Voilà pourtant quatre mois que les propositions du Sénat sont bloquées dans la navette parlementaire. Le 19 octobre, le ministre s’était engagé à ce que la proposition de loi sénatoriale soit inscrite à l’agenda de l’Assemblée nationale, bref, à ce qu’elle « chemine » au Parlement, selon ses mots.

Des exigences de portée différente entre le gouvernement et les sénateurs

Dans son interview, Stanislas Guerini ne se place cependant pas au niveau de tous les standards imaginés par les sénateurs. Le ministre promet ainsi de « continuer à renforcer » ses « engagements » en faveur d’une publication des prestations de conseil commandées par l’Etat. Les ministères seront concernés, tout comme les opérateurs de l’Etat (Pôle emploi ou France Compétences par exemple) ayant un chiffre d’affaires supérieur à 60 millions d’euros. Lors des débats budgétaires de l’automne, les sénateurs demandaient que l’opération transparence s’étende y compris aux autorités administratives et publiques indépendantes, à la Caisse des Dépôts et Consignations, ou encore aux hôpitaux publics. Cette liste élargie n’a pas été retenue par le gouvernement dans le texte final en décembre.

Le ministre diverge également du Sénat sur un autre volet. Expliquant qu’il est possible de « renforcer l’exigence » de l’Etat, « sans dégoûter » les cabinets de conseil, le ministre a évoqué l’exemple des obligations déontologiques qui s’imposent aux consultants. « Je prends l’exemple des déclarations de non-conflit d’intérêts qui sont faites par chaque cabinet et par chaque consultant qui va travailler sur une mission de conseil. Je pense que c’est le bon niveau, plutôt que d’obliger à la publication de déclarations d’intérêt généralisées pour tout salarié d’une entreprise de conseil ainsi que son conjoint », a-t-il déclaré à l’AFP. Les obligations prévues par le texte du Sénat n’exigent des consultants qu’une déclaration « avant chaque prestation de conseil ». Quant aux informations demandées, pour ce qui est des conjoints, les sénateurs demandaient uniquement que la profession soit renseignée.

Lors de l’examen de la proposition de loi sénatoriale, Stanislas Guerini voulait limiter les déclarations aux seuls dirigeants des cabinets de conseil, pour des questions de « proportionnalité » et éviter une « embolisation » de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Depuis cet été, le nouvel accord-cadre de la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP) – le cadre de référence pour l’achat de prestations de conseil – impose une déclaration d’absence de conflit d’intérêts aux consultants mobilisés sur une mission. Mais la proposition de loi sénatoriale est plus ambitieuse, non seulement en inscrivant des obligations précises dans le marbre de la loi, mais également en faisant intervenir Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, avec la menace d’amendes en cas de non-respect des obligations déontologiques.

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