À une très large majorité, le Sénat a rejeté une fois de plus dans la nuit du 5 au 6 décembre le contrôle des dépenses des collectivités locales, inscrit dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Tous les amendements de suppression de cet article ont été adoptés, par 302 voix contre 38.
L’article en question fixait une trajectoire rigoureuse pour les finances locales. Dans ce « pacte de confiance », le gouvernement voulait obtenir de la part des grandes collectivités une diminution de leurs dépenses réelles de fonctionnement de 0,5 %. Un mécanisme de contractualisation et de sanction était prévu pour garantir le respect de l’orientation donnée.
La disposition figurait initialement dans le projet de loi de programmation des finances publiques, mais le Sénat l’a retirée il y a moins un mois. Quant aux députés, ils avaient purement et simplement rejeté le texte dans son intégralité.
« C’est une forme d’entêtement un peu coupable », s’est exclamé le rapporteur général de la commission des finances, Jean-François Husson (LR). « Vous cherchez finalement – et c’est peut-être ça l’avantage d’un 49.3 – à faire revenir par la fenêtre ce qui a été sorti », a dénoncé la sénatrice communiste Cécile Cukierman.
Les sénateurs rappellent l’engagement d’Élisabeth Borne tenu devant les maires
François Bonhomme (apparenté LR) a considéré que le dispositif du gouvernement allait « encore plus loin » que le précédent système de contractualisation avec les collectivités locales, finalement abandonné sous le précédent quinquennat. Il s’agissait des « contrats de Cahors ». « L’État essaye donc d’imposer aux collectivités locales les efforts auxquels il ne consent pas lui-même. Croyant, mais pas pratiquant en quelque sorte », a raillé le sénateur du Tarn-et-Garonne. Le parlementaire a indiqué que si les collectivités représentaient 20 % de la dépense publique, elles ne pesaient que pour 8,4 % dans la dette. Plusieurs sénateurs ont souligné que la nouvelle formule embarquait plus de communes.
Les sénateurs étaient d’autant plus mécontents sur la présence de cet article, qu’Élisabeth Borne s’était engagée au congrès de l’Association des maires de France à ne pas mettre en œuvre de sanctions (relire article). « Vous ne tenez pas compte même, dans une forme de désobéissance civile, de ce que la Première ministre a déclaré au Congrès des maires porte de Versailles. J’avoue que ça me surprend », a déclaré Jean-François Husson.
De son côté, Gabriel Attal, le ministre des comptes publics, a assuré qu’il ne s’agissait « pas d’une réédition des contrats de Cahors ». Le ministre a rappelé que ce mécanisme avait été précédé par « des dizaines d’heures de discussions » avec les associations d’élus, rappelant au passage que certaines d’entre elles comme les représentants des départements ou des intercommunalités ne s’étaient pas opposées au pacte de confiance. L’incertitude sur l’adoption du projet de loi de programmation des finances publiques a conduit le gouvernement à remettre ce dispositif dans le projet de loi de finances. « Cela permettrait de donner de la crédibilité à notre objectif » (de réduction de la dépense publique), a-t-il défendu.