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Bruno Retailleau : « On est disposé à faire du texte par texte, mais désormais, c’est du donnant-donnant »
Par François Vignal
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La rencontre a été plus longue que celle, le matin, avec l’intersyndicale, qui a duré à peine une heure. La première ministre Elisabeth Borne, qui consulte cette semaine partis et corps intermédiaires, a passé 1h30 à l’heure de l’apéro avec les pontes des LR, ce mercredi, en fin de journée, à Matignon. L’histoire ne dit pas s’il y avait des cacahouètes et du Picon-bière, mais le président des LR, Eric Ciotti, et les deux présidents des groupes de l’Assemblée nationale, Olivier Marleix, et du Sénat, Bruno Retailleau, ont pu faire passer quelques messages.
Les LR font monter les enchères
Ce dernier raconte à publicsenat.fr l’entretien. Sur « la méthode, j’ai redit qu’il était hors de question de faire un accord de gouvernement », rappelle Bruno Retailleau, alors qu’Emmanuel Macron a fixé à Elisabeth Borne pour mission « d’élargir » la majorité. En revanche, « je lui ai dit qu’on était disposé à faire du texte par texte, mais désormais, c’est du donnant-donnant. On ne peut pas se lancer sur du texte par texte s’il n’y a pas de propositions de loi choisies et votées par le Sénat, qui sont ensuite inscrites à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale », annonce le président du groupe LR du Sénat, qui donne trois textes que la majorité sénatoriale souhaiterait voir cheminer : « Celui sur le ZAN (zéro artificialisation nette), le texte eau et assainissement ou la proposition de loi (PPL) grands feux, votée hier soir ». Bruno Retailleau insiste :
La seule méthode qui fonctionne, c’est le texte par texte, mais on exige qu’il y ait une suite à nos PPL, celles qui nous paraissent majeures.
Et comment a réagi la première ministre ? « Elle a répondu favorablement sur ce point », selon Bruno Retailleau. La droite sait le gouvernement affaibli. Si la division des LR sur les retraites les a également mis à mal, la droite reste malgré tout en relative position de force. Elle peut faire les majorités à l’Assemblée et son appui au Sénat peut être précieux dans cette recherche de majorité incertaine pour le gouvernement. Elle assume donc d’en jouer et de faire monter les enchères. Si le gouvernement veut continuer à avoir le soutien des LR – même s’il peut être incertain comme il l’a été sur les retraites – il faudra lâcher. Et pas que des cacahouètes.
Mais avant d’espérer dealer à nouveau avec les LR, car c’est sûrement l’une des seules voies qui semble encore possible pour l’exécutif, le gouvernement doit se sortir de l’ornière des retraites. « La première chose, après la décision du Conseil constitutionnel, il faudra que le gouvernement sorte de la séquence retraites, apaise et fasse en sorte qu’un vrai dialogue soit repris avec les forces vives, avec les partenaires sociaux, en leur soumettant un certain nombre de sujets. Non pas en faisant des propositions, mais en leur demandant leurs propres propositions. Je pense à l’emploi des seniors, à l’usure professionnelle, des sujets qui peuvent faire l’objet d’un texte en réalité ».
« Il faut qu’Elisabeth Borne donne des gages aux syndicats, notamment réformistes »
Bruno Retailleau explique avoir également « mis en garde » la première ministre sur la façon d’aborder la loi travail, promise dans un premier temps pour le printemps. « Il y a trois choses : l’accord national interprofessionnel (ANI), c’est-à-dire l’accord sur le partage de la valeur, qui ne doit pas être dénaturé. Il doit être retranscrit fidèlement, dans un texte propre », défend le sénateur. Elisabeth Borne s’était déjà engagée à le reprendre. Pour Bruno Retailleau, cela veut dire un texte uniquement avec « l’ANI, sans ajouter la question des rachats d’actions », sujet mis sur la table par Emmanuel Macron lors de sa dernière allocution.
« Après la décision du Conseil constitutionnel, il faut qu’Elisabeth Borne donne des gages aux syndicats, notamment réformistes. Et ça doit justement être l’accord sur le partage de la valeur », selon le sénateur LR. « Il y a un autre bloc qui serait celui qui est en lien avec les retraites, notamment en cas de censure partielle du Conseil constitutionnel, peut-être sur l’emploi des seniors. Et il y aura un bloc avec France Travail, le RSA, le compte épargne temps universel », avance le sénateur LR de Vendée.
« La loi travail ne peut être que saucissonnée »
« Je pense que la loi travail ne peut être que saucissonnée », insiste le patron des sénateurs LR, « autant le texte sur l’immigration ne peut pas l’être, il y a besoin d’une vision d’ensemble. Mais sur la loi travail, il n’y a rien de commun entre l’ANI et les suites de la réforme des retraites ».
Sur l’immigration justement, le président du groupe LR a « redit que le pire était de saucissonner le texte ». « Je comprends qu’il y a toujours le texte qui est en suspension. Mais j’ai dit qu’on ne se contentera pas d’un texte qui fasse semblant. Et il est hors de question d’y voir l’article 3 » sur les régularisations pour les métiers en tension, répète Bruno Retailleau.
« En l’état, l’ordre du jour législatif n’a pas de sens »
Elisabeth Borne comptait aussi sur ces rencontres pour parler du calendrier. Alors que les parlementaires ont la sensation d’un Parlement un peu à l’arrêt, en apesanteur, depuis la crise autour des retraites, Bruno Retailleau n’est pas tendre. Il aimerait que le gouvernement muscle son jeu : « En l’état, l’ordre du jour législatif n’a pas de sens. Il n’y a que des PPL qui nous viennent de l’Assemblée. Il n’y a pas de récit. Après cette séquence retraites, qui a été un traumatisme pour beaucoup de Français, quels sont les textes majeurs ? On nous propose des textes techniques. Bien sûr, il faut une loi de programmation militaire, un texte sur les douanes, mais j’ai indiqué à la première ministre qu’il faudrait revoir l’ordre du jour pour qu’il y ait au moins quelques textes charpentés qui concernent le quotidien des Français, et qui puissent recueillir un très large assentiment des forces politiques », avance Bruno Retailleau, qui prend pour « exemple, un texte sur l’autonomie ou sur les lycées professionnels ».
Quant au projet de réforme constitutionnelle, il n’a « aucunement » été évoqué ce mercredi soir, à Matignon. Bruno Retailleau souligne au passage que le gouvernement a déjà du mal à trouver une majorité à l’Assemblée, « alors vous les voyez trouver une majorité des 3/5 au Congrès… »