Alors que les députés PS soutiennent l’abrogation de la réforme des retraites portée par La France insoumise, qui efface également le mécanisme mis en place par l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sous François Hollande, le sénateur Bernard Jomier (Place publique), appelle les parlementaires de gauche à ne pas aller trop loin face aux enjeux démographiques.
Affaire Benalla : après le coup de fil de Macron à Larcher, les sénateurs font corps
Par Public Sénat
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Ce n’était pas un coup de fil de courtoisie. Mardi soir, Emmanuel Macron a appelé Gérard Larcher pour se plaindre de la tournure que prend la commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla, dénonçant un « déséquilibre institutionnel », selon L’Obs. L’appel, qui a été confirmé à Public Sénat par l’entourage du président de la Haute assemblée, a été donné la veille de la reprise des auditions. Selon RTL, le chef de l’Etat n’aurait pas apprécié une déclaration de Philippe Bas, président LR de la commission d’enquête, qui aurait affirmé que « le Parlement contrôle l’exécutif ».
Au-delà du débat de fond sur la séparation des pouvoirs (voir notre article), cet appel montre que la tension monte encore d’un cran. Pour Emmanuel Macron, affaibli cet été par l’affaire, la reprise des travaux de la commission l’empêche de tourner la page. La majorité sénatoriale en a bien conscience. Mais en appelant le deuxième personnage de l’Etat pour lui rappeler la nécessité de séparation des pouvoirs, Emmanuel Macron risque politiquement de montrer une forme de fébrilité.
« Nous menons nos travaux avec une totale sérénité et ténacité »
Face à ce coup de fil, l’institution sénatoriale fait corps à tous niveaux. Interrogé par Le Figaro, Gérard Larcher apporte son soutien à Philippe Bas : « On peut lui faire confiance, il n'a pas débordé. Il gère ça comme un jardin à la française ! » « Les Français devant leur téléviseur verront que le Sénat est une institution indépendante, sérieuse, qui va au fond des dossiers sans jamais se laisser emporter», ajoute le sénateur des Yvelines, qui sait que son assemblée marque des points dans l’opinion, grâce à la commission.
Jean-Pierre Sueur, co-rapporteur PS de la commission d’enquête, entend continuer son travail. C’est ce qu’il affirme à publicsenat.fr :
« Je ne veux pas croire que le président de la République ou un membre du gouvernement puisse faire un quelconque obstacle au bon déroulement des travaux d’une commission d’enquête parlementaire. Cela me paraît impossible. D’autant plus que nous menons nos travaux en totale cohésion et dans le total respect des règles de droit et donc de l’indépendance de la justice. Et avec une totale sérénité et ténacité ».
Le sénateur du Loiret ajoute : « Compte tenu de ses agissements, je ne suis pas sûr que M. Benalla soit le mieux placé pour faire la morale aux représentants de la Nation et de surcroît les insulter ».
« Quelle pression un Président peut-il exercer sur des sénateurs qui n’ont aucun compte à lui rendre ? »
Bruno Retailleau, président du groupe LR du Sénat, a lui accusé sur RTL l'exécutif et le gouvernement de « se coaliser » pour « soutenir » l'ex-chargé de mission de l’Elysée. « C’est une idée absolument nulle d’appeler le président du Sénat » estime son collègue Gérard Longuet, « c’est vraiment une mauvaise querelle ». « Même si la commission le gêne, on s’en fiche ! Le Président ne fait pas tout ce qu’il veut, quand il veut dans ce pays. Et plus Emmanuel Macron en parle, s’en mêle et plus il s’expose et perd des points » ajoute l’ancien ministre de la Défense. Et quand bien même le Président chercherait à faire pression sur le Sénat, Gérard Longuet souligne qu’elle serait sans effet : « Quelle pression un Président peut-il exercer sur des sénateurs et le président du Sénat qui sont élus en dehors de lui, qui n’ont aucun compte à lui rendre et ne dépendent à aucun moment de lui ? »
Le sénateur LR de Seine-Saint-Denis, Philippe Dallier, note que « la séquence est un peu étonnante », entre les propos d’Alexandre Benalla, ceux de la ministre de la Justice, Nicolas Belloubet, puis maintenant le chef de l’Etat. « J’ai du mal à comprendre quelle mouche a piqué le Président. On va aussi invoquer la séparation des pouvoirs » ajoute le vice-président du Sénat. Selon Philippe Dallier, « ça brouille encore les cartes. Il donne le sentiment, alors qu’Alexandre Benalla a fini par être licencié pour faute, que l’Elysée ne veut absolument pas qu’on fasse la clarté sur un certain nombre de points ». Un autre sénateur pense au fond de lui qu’« il y a des choses étranges, un mystère, pour qu’il y ait une telle fébrilité ».
La sénatrice EELV Esther Benbassa, membre de la commission des lois, se demande sur Twitter si Emmanuel Macron est le « garant des institutions républicaines ou chef de clan cherchant à se protéger ? »
« Ils ont trouvé un os à ronger »
Du côté de la macronie, on y voit avant tout une affaire politique. « On fait une saison 2, la semaine prochaine, il y a Benalla. Aujourd’hui, la droite n’ayant aucun leader et contre-projet, la gauche non plus, elle a trouvé ce fait divers pour en faire un montage politique de façon à atteindre l’image du Président » dénonce François Patriat, président du groupe LREM. Pour lui, il n’y a pas de doute :
« C’est une manière pour les oppositions de masquer leur propre vide pour tenter d’affaiblir l’exécutif. Les Français ne sont pas dupes. ».
« De Gaulle aurait-il accepté qu’Alain Poher (ancien président du Sénat, ndlr) demande une commission d’enquête sur le fonctionnement des fonctionnaires de l’Elysée ? » demande encore le sénateur de Côte-d’Or, dans une référence pour le coup très ancien monde.
Plus mesurée, Julien Bargeton, sénateur LREM de Paris, « pense que la commission d’enquête mérite ni un excès d’honneur, ni l’indignité dans laquelle les propos d’Alexandre Benalla voulaient la plonger. Je pense que le Sénat veut continuer à tirer les fils de la pelote, en espérant trouver des éléments. Mais ça ne produira pas grand chose. Il faut rester très serein ». « Ne tombons pas dans le piège de ceux qui voudraient se faire passer pour des chevaliers blancs purs et parfaits » ajoute Julien Bargeton. S’il trouve « normal que l’opposition fasse de la politique », il estime que « les sénateurs en font beaucoup. Je trouve qu’ils surjouent ce moment car ils ont trouvé un os à ronger ».
Les sénateurs ne le lâcheront pas facilement. L’audition d’Alexandre Benalla est prévue mercredi 19 septembre. Les sénateurs se doutent qu’elle s’annonce compliquée. « De toute façon, il ne va rien nous dire ! » lâche un sénateur LR... L’ancien chargé de mission va certainement s’abriter derrière la procédure judiciaire, le secret-défense et le secret professionnel pour esquiver les questions. Reste que les sénateurs ne se privent pas de le convoquer. Si on ne devrait pas avoir toutes les réponses aux parts d’ombre de cette affaire, il y aura de quoi alimenter le feuilleton.