Creusement de la dette publique : la France a-t-elle le choix ?
Face à l’ampleur de la crise du covid-19, le gouvernement a dû financer des mesures d’urgence par la dette. Elle devrait atteindre plus de 115% du PIB à la fin de l’année 2020. Comment la financer ? Par l’impôt, ou par une réduction des dépenses publiques ? Mercredi 3 juin, le Sénat organisait une table ronde sur le plan de relance économique. Quatre participants, pour deux visions totalement opposées de la reconstruction économique.
Par Samia Dechir
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Recréer de la confiance. Tous les économistes, tous les entrepreneurs sont au moins d’accord là-dessus : c’est la clé de voûte de toute politique de reconstruction. Mais les chemins de la confiance sont multiples. Leader de la grande distribution en France, Michel-Edouard Leclerc ne croit pas à une relance par la demande. Favorable à des mesures très ciblées pour les plus démunis, comme la revalorisation des bas salaires, il pense que la consommation globale des ménages va repartir d’elle-même. Mais les entreprises, dont la trésorerie a souvent basculé dans le rouge, pourront-elles se relever ? Pour éviter les faillites, le patron des hypermarchés plaide pour un investissement public massif ciblé sur certains secteurs.
« On a mis les Grecs à genoux pour des histoires de principe »
Le PDG appelle par exemple à réorganiser totalement le transport de marchandises, grâce à des investissements dits « verts ». Il cite l’exemple de ses magasins, qu’il avait raccordés au réseau SNCF il y a 25 ans. « Aujourd’hui, il y a du gazon partout sur les voies. Il n’y a jamais eu de volonté sur le long terme de s’affronter au lobby des camionneurs ». Le dirigeant appelle l’État à investir massivement, dans la mobilité, dans la santé, dans des secteurs ciblés, pour augmenter la compétitivité des entreprises françaises. Et ce, quoiqu’il en coûte. Quitte à laisser filer la dette publique.
Michel-Edouard Leclerc cite l’exemple de la Grèce « qu’on a mis à genoux pour des questions de principe » alors qu’aujourd’hui la plupart des pays européens laissent filer leurs déficits à des niveaux jamais atteints. « Ne retombons pas dans l’ornière de l’analyse comptable », prévient le PDG, « et commençons par travailler sur les projets d’investissement »
« Le vrai monde d’après, c’est celui de l’endettement »
À l’écoute de ce discours, Xavier Ragot promet d’aller faire ses prochaines courses chez Leclerc. Car le Président de l’OFCE ne dit pas autre chose. « Le vrai monde d’après, c’est celui de l’endettement » prédit l’économiste de l’Observatoire français des conjonctures économiques. Pour lui, la dette ne mène pas nécessairement à la faillite d’un pays. Il distingue cependant deux types de dette : la bonne et la mauvaise, la dette « laxiste » liée à la mauvaise gestion des fonds publics, et la dette « d’investissement » qui sert la croissance. « L’urgence, c’est de séparer les deux. De séparer la dette du covid dans un support additionnel, pour qu’elle ne pèse pas sur les choix d’investissement futurs ».
Créer un « impôt de reconstruction »
Mais même isolée sur un compte à part, il faudra bien la payer, cette dette. Pour cela, l’économiste veut créer un « impôt de reconstruction ». Il propose de s’inspirer du modèle de la CADES, la caisse d’amortissement de la dette sociale, créée en 1996 pour boucher le fameux « trou de la sécu ». Elle est en partie financée par un impôt : la contribution sociale généralisée, dite CSG. Une idée « pas bête » dit l’économiste, parce que grâce à une assiette très large (qui touche le plus de revenus possible) et avec un but bien identifié, cet impôt est « socialement acceptable ». Xavier Ragot voudrait donc créer une sorte de « CSG Covid ». C’est ce qui aurait permis à l’Allemagne de réussir sa réunification : « Ils ont eu un impôt de transfert à l’Est (…) qui a été complètement accepté parce qu’il y avait une visibilité politique de l’impôt. Là, c’est la même chose, il faut une visibilité politique de la CSG COVID ».
Le modèle allemand
Si l’Allemagne est aujourd’hui la première puissance économique du continent, c’est plutôt grâce à sa maîtrise des finances publiques, juge Agnès Verdier-Molinié, directrice de l’iFRAP (Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques). À la fin 2020, la dette publique de notre voisin ne devrait pas dépasser les 68% de son PIB. Une rigueur budgétaire qui, en cas de crise, lui laisse une marge de manœuvre pour financer un plan de relance, sans risquer de s’enfoncer dans la spirale de l’endettement.
Pour redresser l’économie française, endettée à plus de 115%, Agnès Verdier-Molinié veut donc assainir les finances publiques et inscrire dans la Constitution un « frein à l’endettement ». Cela permettrait à la France, en cas de nouvelle crise, de disposer de « cet outil qui a permis aux Allemands d’être beaucoup plus forts ». Pas question, donc, de laisser filer la dette, et encore moins de la financer par un nouvel impôt, alors que la France est déjà « le pays qui dépense le plus au niveau social ».
Tirer les enseignements de l’histoire
Même analyse pour le Medef, qui voit dans la création d’un nouvel impôt la dernière chose à faire pour recréer de la confiance. Patrick Martin appelle à « tirer les enseignements de l’histoire ». Le président délégué du syndicat patronal rappelle qu’entre 2010 et 2013, les gouvernements successifs ont tenté de rééquilibrer les dépenses publiques par une augmentation des prélèvements obligatoires. « Ça a eu un effet catastrophique » juge Patrick Martin, pour qui « la bonne solution est d’augmenter la masse fiscale, donc de soutenir contre vents et marées l’activité, la consommation et l’investissement ». Pour le Medef comme pour l’iFRAP, la relance passe d’abord par un allègement des charges des entreprises.
Depuis le début de la crise, le gouvernement s’est toujours opposé à une augmentation des impôts pour financer la dette. Mais il a aussi promis des plans d’investissements massifs, à commencer par l’hôpital. Une fois la crise passée, la France devra faire des choix. Réduire ses dépenses publiques, ou les financer par l’impôt.
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