Comite interministeriel des Outre-mer

Outre-mer : Élisabeth Borne annonce 70 mesures pour « vivre mieux »

Après plusieurs reports, la Première ministre a tenu aujourd’hui le Comité Interministériel des Outre-mer. Élisabeth Borne a réuni dix-sept ministres pour apporter des réponses concrètes aux spécificités des territoires ultramarins « sur des questions clés », telles que la vie chère ou l’éducation. Ces 70 mesures touchent un grand nombre de sujets, mais pour un seul objectif : améliorer les conditions de vie dans ces territoires.
François-Xavier Roux

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Alors qu’Emmanuel Macron se déplacera en Nouvelle-Calédonie la semaine prochaine, c’est sa Première ministre qui a annoncé les premières mesures pour répondre au souhait du gouvernement de permettre aux 2,6 millions d’Ultramarins de « vivre mieux » dans les Outre-mer. Élisabeth Borne souligne les investissements entrepris par Emmanuel Macron, depuis 2017, pour ces « territoires de défis ». Elle rappelle ainsi le taux de chômage qui a baissé de 6 % ou les 1 200 forces de l’ordre supplémentaires. Mais dans les mesures prises par les ministres au cours du Comité Interministériel des Outre-mer (CIOM), aucune ne concerne la sécurité ou l’immigration, prévient Jean-François Carenco, le ministre délégué chargé des Outre-mer. Les grands thèmes abordés sont l’éducation et les questions économiques. La Première ministre ne fixe pas de calendrier pour appliquer l’ensemble des mesures. Elle veut privilégier l’efficacité, et faire entrer en vigueur les mesures dès que l’une est prête. Ainsi, il n’y aura pas de projet de loi regroupant toutes ces mesures. « Nous voulons que nos compatriotes ultramarins voient les changements rapidement », explique-t-elle. Ces 70 mesures n’ont « qu’une seule boussole : l’efficacité ».

Lutter contre la vie chère

Ce que veut avant tout la Première ministre, c’est répondre aux préoccupations quotidiennes des citoyens d’Outre-mer. Et celles-ci tournent autour de la vie chère. Ces territoires souffrent de fortes inégalités avec l’Hexagone. Par exemple, selon une enquête de l’Insee de 2015 (la dernière disponible), l’alimentation coûtait en moyenne de 28 à 38 % plus cher que dans l’Hexagone. Elisabeth Borne considère le pouvoir d’achat comme un enjeu central des territoires ultramarins. Pour réduire cette inégalité, l’exécutif veut diminuer les prix. Bruno Le Maire annonce ainsi une révision de l’octroi de mer. Cet impôt (ancien) consiste en une taxation des produits importés dans les Outre-mer, pour favoriser les productions locales. Mais ce prélèvement sur plusieurs milliers d’articles avec des taux variables ne « correspond à plus aucune logique », selon le ministre de l’Economie. C’est pourquoi il veut « engager une refonte en profondeur de l’octroi de mer » afin de « lutter contre la vie chère ».

Bruno Le Maire prévient toutefois que cette mesure de refonte prendra du temps. Il souhaite introduire cette réforme dans le projet de loi de finances 2025, donc débattu en 2024. Et si elle est adaptée, sa mise en œuvre devrait se faire au plus tard en 2027. Cependant, la refonte de l’octroi de mer est loin de faire l’unanimité. Les élus locaux s’y opposent, notamment parce qu’il finance les collectivités locales. Mais pour le ministre, l’octroi de mer s’impose sur des produits qui n’ont plus aucun rapport avec les productions locales. Il prend l’exemple du riz, qui est surtaxé alors que les territoires ultramarins n’en cultivent pas. Toutefois, il assure aux collectivités locales « le même niveau de recette ». Autre mesure pour combattre la vie chère : mieux contrôler la concurrence. En effet, il est prévu un renforcement des moyens de contrôle des situations de monopole, avec la création de 10 postes supplémentaires. Aux Antilles et en Guyane, Bruno Le Maire annonce également vouloir fixer les prix des carburants, mais sans préciser de calendrier.

Un accompagnement spécifique des territoires ultramarins

L’ensemble des mesures annoncées par la Première ministre visent à mieux adapter les lois et décrets « à la réalité des Outre-mer ». Au-delà du seul volet normatif, l’Etat doit réaliser un accompagnement spécifique dans tous les services, afin de « faire vivre chaque jour les promesses républicaines ». Jean-François Carenco, le ministre délégué chargé des Outre-mer, dévoile quelques mesures pour aider la population, du plus jeune âge jusqu’à l’insertion professionnelle. 10 000 places supplémentaires en crèches devraient voir le jour. Il a aussi été décidé la gratuité des manuels scolaires dans les classes du primaire, ainsi qu’une revalorisation des bourses étudiantes de 800€ par mois. Cette revalorisation s’ajoute à celle déjà annoncée pour l’année 2023-2024 pour l’ensemble des étudiants boursiers, métropolitains comme ultramarins. Un plan de rattrapage de 150 millions d’euros a également été décidé, à destination de l’accompagnement médico-social des personnes handicapées.

Cet accompagnement social doit aussi s’accompagner d’un engagement plus fort de l’Etat. Élisabeth Borne promet un investissement plus important dans les infrastructures. Pour les années 2024-2027, 2,3 milliards d’euros seront injectés dans les réseaux d’eau, d’assainissement et de transports. Cela correspond à un effort supplémentaire de 400 millions d’euros par rapport à la période 2019-2022. Cependant, Jean-François Carenco rappelle que ces investissements financiers de l’Etat doivent être suivis par l’engagement des élus locaux, à un niveau d’effort équivalent. Pour bien superviser tous ces efforts, le Comité Interministériel des Outre-mer se réunira désormais tous les ans.

L’exception pour Mayotte

Dans les territoires ultramarins, Mayotte fait figure d’exception. Élisabeth Borne annonce un projet de loi spécifique et « d’urgence », pour renforcer l’efficacité des services publics. Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur mais aussi des Outre-mer, se félicite des résultats de l’opération Wuambushu, qui a permis « d’apporter du repos ». Mais désormais, le nouveau combat à mener sur l’île est contre le réchauffement climatique. Alors que l’île est traversée par une importante sécheresse, la Première ministre annonce que, dès demain, paraîtra un décret pour geler le prix de l’eau en bouteille. Et Gérald Darmanin veut qu’en 2031, à l’aide du projet de loi, l’île de Mayotte soit « un véritable département français dans son fonctionnement ». Il espère présenter le projet de loi en conseil des ministres dans les six mois qui viennent. après

Parmi les réactions politiques à ce train de mesures, la délégation sénatoriale aux outre-mer : elle se félicite de la tenue de Comité interministériel « après plusieurs reports » et  « se félicite notamment de la reprise de ses recommandations en faveur d’un assouplissement des conditions de ressources pour bénéficier des aides ». Cependant, les sénateurs de la délégation resteront vigilants sur la mise en place des mesures annoncées et « donne rendez-vous en 2024 pour un bilan d’étape ».

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