“C’est un texte indispensable, vous avez aujourd’hui pratiquement 20% des électeurs calédoniens qui ne peuvent pas participer à ces votes”, déplore le sénateur calédonien, Georges Naturel. En effet, depuis la révision constitutionnelle de 2007, environ 25 000 personnes sont exclues des scrutins en Nouvelle-Calédonie. Seules les personnes inscrites sur les listes électorales avant les accords de Nouméa, signés en 1998, peuvent voter lors des élections provinciales.
“Il est de notre devoir de revoir ce corps électoral”
Alors que le contexte politique néo-calédonien est tendu après le rejet des trois référendums sur l’auto-détermination de l’archipel, le gouvernement a présenté, le 29 janvier, un projet de loi constitutionnelle proposant d’ouvrir le corps électoral aux personnes résidant depuis plus de dix ans en Nouvelle-Calédonie. Le Sénat doit se prononcer à nouveau sur le texte lors d’un vote solennel le 2 avril. Pour entrer en vigueur, et modifier la Constitution, le texte devra être voté en des termes identiques par l’Assemblée nationale puis adopté à la majorité des ⅗ par les parlementaires, réunis en Congrès le 1er juillet. “Il est de notre devoir de revoir ce corps électoral”, assure Georges Naturel qui soutient le texte, malgré le rejet de son amendement proposant de porter à 5 ans la durée de résidence nécessaire pour s’inscrire sur les listes électorales.
Un dégel du corps électoral pour résoudre un “climat politique inquiétant”
Pour le sénateur de Nouvelle-Calédonie, il est urgent de faire adopter rapidement le texte afin de permettre la tenue des élections provinciales. Des élections majeures puisque les provinces exercent de nombreuses compétences. La répartition des sièges au Congrès de Nouvelle-Calédonie, qui nomme le président du gouvernement, est déterminée par les équilibres politiques au sein des provinces.
“On ne peut pas tenir des élections provinciales sans le dégel du corps électoral”, prévient Georges Naturel qui craint que le Conseil constitutionnel invalide le scrutin si près d’un quart du corps électoral est exclu. Initialement prévues en mai 2024, un projet de loi organique, adopté par le Parlement, reporte les élections au 15 décembre 2024 au plus tard. Néanmoins, selon le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, le délai pourrait ne pas être tenu. Un amendement du rapporteur du texte, Philippe Bas (LR), adopté en séance, a passablement agacé le ministre. L’amendement contraint le gouvernement à présenter un projet de loi organique, au lieu d’un décret, pour organiser les élections provinciales. Une procédure plus longue et plus contraignante. “L’amendement du rapporteur empêche de convoquer les électeurs à temps”, estime Gérald Darmanin qui a demandé une deuxième délibération de l’amendement lors du vote solennel du 2 avril.
Georges Naturel estime que le dégel du corps électoral apporterait une réponse à un “climat politique inquiétant”. De nouvelles élections pourraient permettre de faciliter un accord sur l’avenir institutionnel de l’archipel alors que le dialogue est difficile entre indépendantistes et non-indépendantistes. “Le corps électoral c’est une chose, mais ce qui est aussi important, c’est le marasme économique aujourd’hui en Nouvelle-Calédonie”, affirme Georges Naturel. “Il faut se respecter les uns les autres, en particulier les indépendantistes, si on veut aboutir à un accord”, ajoute le sénateur alors que deux manifestations ont eu lieu ce matin à Nouméa.