French Territory of  New Caledonia. Noumea . Riots

En Nouvelle-Calédonie, le spectre « d’une crise sanitaire et humanitaire », faute de sortie de crise

Pour le sénateur LR de Nouvelle-Calédonie, Georges Naturel, sans gouvernement de plein exercice à Paris, l’archipel du Pacifique va rentrer en septembre « dans l’instabilité complète ». Au niveau local, les équilibres pourraient bouger avec l’élection jeudi 29 août du président du Congrès. Le leader indépendantiste Roch Wamytan, en poste depuis 5 ans, est menacé.
Jérôme Rabier

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Déclenchées le 13 mai dernier, les émeutes en Nouvelle-Calédonie ont continué cet été. Les affrontements ont fait un onzième mort, le 15 août dernier. Et l’absence de gouvernement de plein exercice à Paris ne permet pas de préparer une sortie de crise dans le cadre d’un dialogue avec l’Etat. « Il va pourtant falloir agir, et vite » prévient le sénateur non indépendantiste Georges Naturel. « On arrive à une crise sanitaire et bientôt humanitaire » lance-t-il, évoquant le risque futur d’émeutes de la faim si rien n’est fait au niveau économique.

Une économie à terre

Les destructions d’entreprises et les entraves à la circulation ont en effet plongé la Nouvelle-Calédonie dans la crise. « L’usine de Nickel du nord ferme, avec 1200 chômeurs de plus, le principal bailleur social de l’île qui loge un calédonien sur dix est en cessation de paiement » égrène le sénateur, qui aurait pu ajouter des dizaines d’exemples d’institutions économiques locales en grande difficulté.

« Bercy avait un engagement jusqu’à fin août, avec des aides aux entreprises, rappelle le sénateur, mais avec un gouvernement de gestion des affaires courantes, nous plongeons dans l’instabilité complète au 1er septembre » alerte-t-il. « Pour les entreprises comme pour les collectivités qui sont exsangues, c’est un saut vers l’inconnu » conclue-t-il.

Plans d’urgence et de reconstruction

Dans l’attente d’un gouvernement à Paris, les institutions locales travaillent pour un plan d’urgence et de reconstruction de l’archipel. Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie, où cohabitent indépendantistes et loyalistes, a présenté cette semaine un plan baptisé S2R. Un acronyme pour « sauvegarde » dans l’immédiat, « refondation » à moyen terme, et « reconstruction » pour le futur. Un plan sur lequel les Calédoniens sont appelés à se prononcer en ligne jusqu’au 29 septembre. Il prévoit déjà des coupes claires dans le système de retraite local, lui aussi au bord de la faillite.

Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, le parlement local, a lui aussi adopté ce 28 août un plan quinquennal de reconstruction, qui demande notamment 4,2 milliards d’euros sur 5 ans à l’État pour reconstruire l’archipel. Ce plan, qui reste à négocier avec le futur gouvernement français, a reçu un large soutien avec 40 votes pour, 8 abstentions et un contre. Dans ce contexte, le congrès, dans sa diversité, demande au Président de la République de désigner une commission interministérielle pour la sauvegarde et la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie dès qu’un nouveau Premier ministre sera nommé.

Un renouvellement du Congrès incertain

Mais derrière ce large vote, le paysage politique local bouge. Les instances du Congrès, dont la présidence, seront renouvelées demain, jeudi 29 août. Roch Wamytan, indépendantiste, préside l’institution depuis 2019, grâce au soutien de 3 élus du parti l’Eveil océanien, qui défendent les intérêts de la communauté wallisienne et futunienne, nombreuse dans l’archipel.

Mais ce soutien, continu depuis 2019, est menacé. Un élu de ce petit parti charnière a démissionné aujourd’hui du gouvernement, signe que les tensions sont grandes. Sans leur vote, Roch Wamytan, figure indépendantiste, peut perdre la présidence.

Divisions chez les indépendantistes

D’autant plus qu’au sein du camp indépendantiste, les divisions font rage. Le congrès du FLNKS, qui rassemble normalement les différentes familles indépendantistes, doit tenir ce week-end un congrès, déjà reporté en juin dernier. Mais deux partis, l’union progressiste en Mélanésie et le Palika, ont annoncé boycotter l’événement. En cause, des désaccords sur la participation de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT) à ce Congrès, et plus largement sur l’attitude à adopter face aux émeutes.

Des divisions qui existent aussi dans le camp non-indépendantiste. Entre ceux qui prônent toujours le dialogue, et ceux qui, comme l’ancienne secrétaire d’État Sonia Backès, évoque désormais une partition du territoire. Une hypothèse dont ne veut pas entendre parler Georges Naturel. Pour le sénateur non indépendantiste, « il nous faudra une union sacrée pour reconstruire le territoire, les gens en ont marre des guéguerres politiciennes ». Un vœu qui peut paraitre pieux au vu des divisions qui animent le territoire depuis bientôt quatre mois.

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