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Cyclone Chido à Mayotte : un sénateur encore « traumatisé » par les cris de ses petits-enfants

48 heures après le passage du cyclone Chido, Mayotte est dévastée. Dans le département le plus pauvre de France, où la population clandestine dépasse les 100 000 personnes, difficile de faire un premier bilan humain. Les sénateurs ultramarins demandent à l’Etat de mettre tous les moyens, réglementaires et financiers, pour accélérer la reconstruction. Le sénateur de Mayotte, Saïd Omar Oili s’est rendu sur place retrouver sa famille.
Simon Barbarit

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Le cyclone le plus intense que Mayotte ait connu en un siècle n’a pas fini de faire des dégâts. Samedi, Chido a ravagé le département français sans que l’on sache exactement son bilan humain. « Il y aura certainement plusieurs centaines » de morts, « peut-être approcherons-nous le millier, quelques milliers », a évalué dimanche, François-Xavier Bieuville, le préfet de Mayotte.

« Ce qui est le plus marquant, c’est le silence dans des quartiers »

Les toits en tôle des « bangas », les bidonvilles qui jouxtent de nombreuses communes de l’île, n’ont pas fait le poids face aux rafales de plus de 220 km/h. « La population clandestine de Mayotte dépasse 100 000 personnes (320 000 habitants officiellement dénombrés). La tradition musulmane est par ailleurs d’enterrer les morts dans les 24 heures », rappelle une source du ministère de l’Intérieur.

L’unique hôpital, qui héberge la plus grande maternité de France a été « très endommagé » et les centres médicaux sont « inopérants », a par ailleurs, précisé la ministre de la Santé démissionnaire, Geneviève Darrieussecq.

« Ce qui est le plus marquant, c’est le silence dans des quartiers qui étaient pleins de vie jusque-là. 77 % de la population vivent sous le seuil de pauvreté. Ils ne pouvaient se mettre à l’abri. Combien d’enfants ont perdu leurs parents ? Les écoles sont détruites. Les enseignants qui ont perdu leur maison ne reviendront peut-être pas », s’inquiète le sénateur (RDPI) de Mayotte, Saïd Omar Oili qui dit craindre de voir sur son île « une génération perdue », déjà privée d’école pendant la crise du Covid.

« Il va falloir des jours et des jours » pour dresser le bilan des victimes a confirmé le ministre de l’intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau à son arrivée à Mayotte, lundi matin, avec son collègue des Outre-mer, François-Noël Buffet, et le mahorais Thani Mohamed Soilihi, secrétaire d’Etat chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

Saïd Omar Oili est lui « traumatisé » après avoir entendu, au téléphone, depuis la métropole, les cris de ses petits enfants lorsque la toiture de la maison familiale s’est envolée. « L’île est détruite à 90 %. L’eau et la nourriture vont manquer. Il n’y a plus d’électricité. 51 des 54 pylônes Orange sont endommagés. Il y a un risque d’épidémie de choléra. Il faut absolument éviter que la crise sanitaire se transforme en crise sécuritaire. Si la population n’a plus rien à manger, ça va entraîner des pillages », craint le sénateur qui est arrivé à Mayotte cet après-midi pour rejoindre sa famille ».

Selon une source de Beauvau, le ministre a demandé au préfet « une mobilisation maximale des forces de l’ordre pour porter secours à la population ». « 1 600 policiers et gendarmes sont déployés dans le respect de leur sécurité afin de « prévenir d’éventuels pillages ».

Bruno Retailleau a aussi demandé au préfet de Mayotte d’activer l’article 27 de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (Lopmi). Un dispositif qui « permet au préfet, de prendre la direction de la crise et il a autorité sur l’ensemble des services de l’État au niveau local », précise-t-il sur X.

« La Réunion jouera son rôle de hub sanitaire »

Des ponts aériens et maritimes sont organisés depuis l’île voisine de la Réunion où vingt-trois soignants ont déjà rejoint Mayotte. « La Réunion va servir de hub pour transférer du matériel, des vêtements, de la nourriture. Un premier navire de la marine nationale est déjà parti avec à son bord des denrées alimentaires et du matériel EDF. La Réunion jouera son rôle de hub sanitaire. Mais ne pourra pas tout faire seule. La solidarité nationale doit jouer pleinement. Mayotte avait déjà des besoins extrêmement grands. L’Etat va devoir maintenant bousculer les procédures et mettre les moyens pour venir en aide aux Mahorais. Notre gouvernement est démissionnaire et contraint à la gestion des affaires courantes. Mais il s’agit d’une urgence vitale », appelle la sénatrice socialiste de la Réunion, Audrey Bélim.

Après l’aide d’urgence aux victimes, la question de la reconstruction du département le plus pauvre de France émerge déjà. L’ancien ministre des Outre-mer et actuel sénateur (PS) de Martinique, Victorin Lurel demande lui aussi « au gouvernement démissionnaire de prendre des mesures exceptionnelles ». L’Outre-mer ne fait d’ailleurs plus partie du portefeuille du ministère de l’intérieur depuis la nomination de Bruno Retailleau. Le ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet est rattaché auprès du Premier ministre.

« Bousculer les procédures »

« Après le passage de l’ouragan Hugo en Guadeloupe en 1989, François Mitterrand était venu sur place et avait décidé qu’il fallait bousculer les procédures. La loi 3DS nous en offre la possibilité avec un article qui n’a jamais été utilisé jusqu’à ce jour. Il permet de déclarer l’état de calamité naturelle exceptionnelle. L’Etat n’est ainsi pas freiné dans son action de reconstruction par des délais imposés par le code des marchés publics », rappelle le sénateur, Victorin Lurel demande également que soit créée une délégation interministérielle, avec à sa tête un fonctionnaire expérimenté, et dotée de moyens pluriannuels conséquents », comme ce fut le cas après le passage de l’ouragan Irma en 2017. Audrey Bélim abonde. « Il faudra une ligne budgétaire dédiée à la reconstruction de Mayotte dans le prochain budget »

Néanmoins, plus de 300 000 personnes vivent à Mayotte contre à peine 45 000 à Saint-Martin et Saint-Barthélemy. La catastrophe climatique qui s’est abattue sur l’île française du Pacifique, déjà en proie à de graves problèmes sanitaires, sociaux et sécuritaires, constituera un défi de taille pour le prochain gouvernement du nouveau Premier ministre, François Bayrou.

 

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