Le vice-président de l’AMF juge sévèrement le discours de Michel Barnier en clôture du congrès des maires de France. Il note aucune avancée significative et prédit un avenir noir pour les édiles français si rien ne change.
Congrès des maires : Michel Barnier promet un « profond changement de notre façon de faire » dans les relations avec les collectivités territoriales
Par Henri Clavier
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« Ce budget n’est pas parfait, il comporte parfois des injustices, des points qu’il faut revoir », reconnaît Michel Barnier au congrès de l’Association des maires de France. Le Premier ministre reconnaît d’ailleurs volontiers que le projet de loi de finances doit être amendé, notamment par le Sénat qui débutera son examen le 25 novembre. Devant les élus locaux, Michel Barnier a voulu se démarquer de ses prédécesseurs en se plaçant dans une position attentive aux préoccupations des communes. L’ancien commissaire européen présente trois objectifs : redonner plus de liberté aux communes, notamment en matière réglementaire, faciliter la vie des élus et libérer des marges de manœuvre budgétaires.
Une baisse à venir des économies demandées aux collectivités territoriales
5 milliards d’euros d’économies étaient initialement demandés aux collectivités locales dans le cadre du projet de loi de finances 2025. Le 15 novembre, le Premier ministre avait déjà annoncé une réduction de l’effort, notamment de celui demandé aux départements. Une logique qu’il réaffirme devant les maires, sans donner de chiffres. Michel Barnier a confirmé que le gouvernement souhaitait revenir sur la baisse du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA). « C’est une mesure qui aurait conduit à revenir sur des sommes que vous aviez intégrées dans vos budgets, nous allons donc la modifier en lien avec le Sénat », explique le Premier ministre.
Le gouvernement devrait donc reprendre les propositions du Sénat, comme l’annonçait Stéphane Sautarel (LR), rapporteur de la commission des finances sur les crédits des collectivités territoriales. Le fonds de réserve pour les collectivités territoriales évalué à 3 milliards d’euros devrait également subir des modifications et surtout, ne pas être utilisé pour faire de la péréquation. « Nous allons inscrire dans la loi le principe selon lequel les sommes prélevées seront reversées à la collectivité contributrice au fond, le prélèvement permettra de freiner les dépenses de fonctionnement. Cet argent vous reviendra à l’issue », affirme le Premier ministre.
Enfin, Michel Barnier a annoncé que le « gouvernement proposera de lisser sur 4 ans, au lieu de 3, l’augmentation des cotisations des employeurs à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales ». Ces annonces devraient permettre de réduire l’effort financier demandé aux collectivités.
Faire des « lois moins bavardes »
Afin de redonner de la liberté aux élus, Michel Barnier a également fait plusieurs annonces sur le poids des normes qui pèse sur les communes. Le locataire de Matignon souhaite un « profond changement de notre façon de faire ». Pour cela, l’exécutif souhaite « mettre un terme à cette inflation normative » et faire en sorte « que l’Etat s’astreigne à ne prendre des normes que quand elles sont nécessaires ». Pour faire des « lois moins bavardes », Michel Barnier compte demander aux administrations de proposer des lois d’orientation ou lois-cadres qui « fixent les objectifs plutôt que des moyens ». En substance, il s’agit de faire un pas de plus vers la différenciation territoriale.
Par ailleurs, le rôle du Conseil national d’évaluation des normes devrait évoluer pour « en faire un organe de conception partagé des lois ». Michel Barnier souhaite également modifier la loi organique du 15 avril 2008 afin d’intégrer les effets sur les collectivités territoriales aux études d’impact précédant le dépôt d’un projet de loi. Enfin, le Premier ministre promet une évaluation du stock de normes afin de les « réécrire dans une logique de sobriété normative ».
Le Premier ministre compte notamment adapter la mise en œuvre du Zéro artificialisation nette (ZAN) pour « redonner de la souplesse ». Les adaptations, qui devraient arriver rapidement par voie réglementaire, devraient permettre de ne plus considérer les jardins pavillonnaires comme des terrains artificialisés et faciliter la construction de logement ou l’installation d’usines. « En lien très étroit avec le Sénat », le gouvernement devrait également soutenir la proposition de loi des sénateurs Guislain Cambier (UC) et Jean-Baptiste Blanc (LR) qui doit permettre de « repartir du terrain » pour respecter les objectifs liés au ZAN. « Si vous m’invitez l’année prochaine, si je suis encore là, je veux bien faire le bilan », assure Michel Barnier qui récuse tout effet d’annonce.
Renforcer la protection des élus
« Nous allons remettre en chantier le statut de l’élu », assure également Michel Barnier qui annonce que la proposition de loi de Françoise Gatel sera reprise et devrait être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale en février 2025. Le texte de l’ancienne sénatrice, désormais ministre déléguée chargée de la ruralité, du commerce et de l’artisanat, avait été adopté à l’unanimité au Sénat. Le texte devra figurer « en tête du Code général des collectivités territoriales », assure Michel Barnier et doit permettre une meilleure prise en charge des contraintes qui pèsent sur les élus. Le texte prévoit notamment une prise en charge des frais de transport ou des frais de garde ou d’assistance à une personne dépendante ou encore la création d’un congé maternité. Avec ces promesses, le Premier ministre souhaite aider les communes, « faciliter leur quotidien » pour « libérer davantage leur potentiel ».
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