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Violences sexuelles dans le sport : « Tolérance zéro » et « intransigeance », Amélie Oudéa-Castéra affiche sa « détermination absolue »

La ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, a présenté le 21 mars les chiffres de la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS) dans le sport, promouvant dans le même temps, les mesures mises en place par le gouvernement ces derniers mois, pour renforcer les dispositifs déjà mis en place. Par ailleurs, elle a confirmé qu’un projet de loi d’héritage des JO, devrait être présenté par le gouvernement à l’automne.
Alexis Graillot

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C’est une ministre à la fois souriante et grave qui a fait son entrée en conférence de presse, ce jeudi 21 mars, pour présenter le bilan d’activité 2023 en matière de VSS dans le sport. Souriante d’une part, car les choses bougent au sein de ce « MeToo du sport ». Grave d’autre part, car les chiffres des signalements sont particulièrement élevés, ce qui démontre à la fois une saisie non négligeable de la cellule Signal Sport, preuve que la parole se libère … mais que la situation reste « grave » et « urgente ».

« Tolérance zéro », « détermination absolue », « intransigeance », ont été les maîtres-mots martelés par la ministre, qui a rappelé qu’ « aucun argument même la quête de médailles », ne peuvent justifier de tels agissements.

 On aura un dispositif de veille et d'alerte tout l'été pour qu'il y ait un alignement parfait des acteurs et beaucoup de clarté sur les procédures 

Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports

Le rôle « central » de la cellule Signal Sport

En 2023, 377 personnes ont été mises en cause à la suite de la saisie de la cellule Signal Sport, mise en place en 2020, après le témoignage de l’ancienne patineuse, Sarah Abitbol, qui avait accusé son ex-entraîneur, Gilles Beyer, de l’avoir violé entre ses 15 et 17 ans. En tout, ce sont 1284 individus qui ont été accusés de violences, parmi lesquels 95% d’hommes, 911 éducateurs sportifs (professionnels, stagiaires ou bénévoles), au sein de 65 fédérations. Parmi les victimes, 81% des victimes sont de sexe féminin et 77% étaient mineures.

Les violences sexuelles occupent une part majoritaire dans ces mises en causes puisque 90% des faits dénoncés concernent de telles violences. Pour 2023, ce chiffre est légèrement plus bas, à hauteur de 85%. Plus inquiétant cependant, 31% des victimes étaient âgées de moins de 15 ans au moment des faits.

La ministre est également revenue sur les procédures administratives, judiciaires et disciplinaires, à date du 31 décembre 2023. Sur l’ensemble de ces procédures, 46% des affaires instruites sont closes, 49% ont fait l’objet d’une décision administrative et 186 ont été communiqués auprès des procureurs de la République, sur la base de l’article 40 du Code de procédure pénale.

Une cellule Signal Sport, dont la ministre a assuré la présence pendant la période olympique, puisque cette dernière sera présente au club France ainsi qu’au village des athlètes, via le label « Terrain d’égalité », qui « valorise les organisations ayant mis en place des procédures permettant de promouvoir l’égalité femmes-hommes et de lutter contre les discriminations et les violences sexistes et sexuelles ». « On aura un dispositif de veille et d’alerte tout l’été pour qu’il y ait un alignement parfait des acteurs et beaucoup de clarté sur les procédures », assure la ministre.

Renforcer les dispositifs existants

En outre, le contrôle d’honorabilité, qui consiste en un contrôle des éducateurs sportifs bénévoles, arbitres et exploitants licenciés des fédérations, a été renforcé. Depuis 2020, un peu plus de 1.9 million de contrôles ont été effectués, avec un objectif de « doubler le nombre de contrôles d’établissements contrôlés », passant de 3900 à 6000 pour cette année. Amélie Oudéa-Castéra a également souhaité souligner la mise en place des référents sport au sein des parquets, ainsi que de 80 référents dans les fédérations sportives : « On a un réseau de professionnels dédiés et engagés sur ces questions », explique la ministre, tout en jugeant qu’ « il faut continuer à libérer la parole et l’écoute, à accompagner les victimes ». A ce titre, elle a salué le travail du sénateur socialiste, Sébastien Pla, auteur d’une proposition de loi, promulguée le 9 mars, et qui vise notamment à « renforcer la protection des mineurs et l’honorabilité dans le sport ». Dans la même lignée, elle a rappelé la loi du 2 mars 2022, votée sous le mandat de sa prédécesseure, Roxana Maracineanu, visant à « démocratiser le sport en France », en instaurant notamment une parité au sein des fédérations.

Amélie Oudéa-Castéra a également tenu à souligner que de nombreux progrès restaient à faire, reconnaissant une « notoriété insuffisante de la cellule Signal Sport ». Pour cela, la ministre a évoqué la « campagne de communication lancée en ciblant particulièrement les mineurs », en s’appuyant notamment sur les fédérations, les clubs et les services déconcentrés du ministère. De la même manière, elle a annoncé vouloir poursuivre la publicité de la cellule au sein des clubs, et une « modernisation » du site Internet de celle-ci. Enfin, la ministre souhaite « continuer à améliorer le dispositif d’accompagnement existant », en réfléchissant notamment à l’allongement du délai de prescription, ainsi que la création de 56 ETP (équivalent temps plein) dédiés aux enquêtes et aux contrôles pour assurer la protection des publics entre 2023 et 2024.

Pas de création d’une AAI

Si la ministre souhaite s’appuyer plus que tout sur le rapport Buffet-Diagana, remis en décembre 2023 et auditionnés en février dernier, « en avançant une réflexion sur la suspension de la licence à vie pour les cas le plus graves », tout en donnant « un cadre clair aux activités bénévoles », elle a rappelé son opposition à la création d’une autorité administrative indépendante. Une telle autorité avait été préconisée par ce rapport, et serait chargée de « gérer la prévention et le traitement des VSS dans le milieu sportif », face à la « tendance dans certaines fédérations à préserver la vitrine plutôt que la victime », des mots du corapporteur, Stéphane Diagana. Une initiative à laquelle la ministre s’oppose : « Cela créerait une complexité nouvelle avec une dilution des responsabilités », argue Amélie Oudéa-Castéra. « Je ne souhaite pas qu’il y ait un éloignement du terrain et du tissu des clubs », continue-t-elle, jugeant que « ces sujets sont trop importants pour que l’on passe sa vie à tricoter et détricoter ».

En revanche, interrogée quant à savoir si elle avait reçu les signalements de la plateforme en ligne « Balance ton sport », lancée par les députées NUPES Sabrina Sebaihi, et Horizons Béatrice Bellamy, la ministre répond par la négative, tout en ajoutant froidement : « Ce n’est pas faute d’avoir essayé ».

Un projet de loi d’héritage après les JO

Enfin, questionnée par Public Sénat sur les éléments qui devraient accompagner le projet de loi promis par la ministre après la période olympique, Amélie Oudéa-Castéra a détaillé les trois dimensions contenues. La première d’entre elles concernera le « renforcement de la vie démocratique », via « un meilleur équilibre des pouvoirs et une meilleure représentativité », qui permettront, des mots de la ministre, « une vitalité plus forte ».

La deuxième dimension a trait au « renforcement des prérogatives des comités d’éthique et de leur indépendance », qui passera notamment par un « découplage des mandats avec ceux des organes dirigeants pour qu’il n’y ait pas de prise en compte des enjeux éthiques dans le calendrier électoral ». A ce titre, la ministre des Sports s’est déclarée favorable à un « régime d’incompatibilité » en cas de condamnation en première instance des dirigeants, tout en « respectant le cadre de la présomption d’innocence ». « En cas de carence » d’une fédération dans le traitement des dossiers, elle a également plaidé pour que le Comité national olympique (CNO), puisse se « substituer », le cas échéant.

Quant à la troisième dimension du projet, elle visera à renforcer « la protection des pratiquants », au-delà des violences, via des « plans d’actions », des « procédures disciplinaires », et des aides financières « conditionnées » aux modules de formations aux violences sexistes et sexuelles.

Et ne lui parlez pas du budget des Sports, auquel 50 millions d’euros d’annulations de crédits ont été retirés, par décret du ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, le 16 février dernier, et qui avait donné lieu à une audition tendue avec les sénateurs : « Ne créons pas de complexité supplémentaire », coupe la ministre. « Les structures sont déjà créées, au contraire, l’argent du contribuable a servi », assure-t-elle, estimant que désormais, « les fédérations et les ligues doivent aller au bout de leur responsabilité ». « Tolérance zéro », martèle-t-elle une nouvelle fois. Sébastien Pla, auteur de la proposition de loi votée le 8 mars dernier au Sénat, abonde : « Il n’y a pas besoin de moyens supplémentaires si les fédérations suivent ».

Quoiqu’il en soit, la ministre souhaite « continuer ces efforts de transparence », en nous donnant d’ores-et-déjà rendez-vous, à la suite des JO, lorsque se tiendra la 5e convention nationale de prévention des violences dans le sport. Sera-t-elle là pour le porter ? « J’espère », sourit-elle.

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