Une étude Médiamétrie sur le nombre de mineurs exposés aux images pornographiques sur Internet jette un nouveau pavé dans la mare, alors que la loi contraint les plateformes à vérifier l’âge de leurs utilisateurs. Trois ans après son entrée en vigueur, cette mesure reste largement inopérante, mais les chiffres publiés jeudi trahissent l’importance du phénomène. « Ils sont terrifiants de par leur ampleur, 2 millions d’enfants exposés chaque mois aux contenus pornographiques, de par leur progression, plus de 600 000 en cinq ans, et de par la jeunesse de ces enfants. Parmi les garçons de 12 ans, la moitié est exposée chaque mois à ce type de contenu pour une durée d’une heure en moyenne », a reconnu Jean-Noël Barrot, le ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, qui était l’invité vendredi 26 mai de l’émission « Extra local » sur Public Sénat.
Renforcer le pouvoir de l’Arcom
« Il y a un an et demi, l’Arcom [l’autorité de régulation du numérique et de l’audiovisuel, ndlr] a mis en demeure les cinq sites principaux de mettre en place la vérification d’âge. Au bout de 15 jours, ces procédures n’ayant pas été mises en œuvre, l’Arcom a saisi le tribunal judiciaire de Paris. Une procédure est en cours, le verdict sera rendu le 7 juillet. Nous souhaitons qu’il soit exemplaire », rappelle le ministre qui reconnaît toutefois que ce mécanisme, de par sa lenteur, est loin d’être satisfaisant. Dans un rapport de 2022, consacré aux dérives de l’industrie pornographique, le Sénat recommandait de donner à l’Arcom le pouvoir d’ordonner directement le blocage et le référencement sur les moteurs de recherche des sites pornographique en infraction. Cette proposition a été reprise dans le projet de loi « Sécuriser et réguler le numérique » qui a été présenté le 10 mai en Conseil des ministres. « Je pense que cette menace les contraindra à mettre en place des outils de vérification de l’âge », estime Jean-Noël Barrot.
« Les expérimentations techniques sont en cours »
Mais quels outils ? Car l’application de la loi se heurte également à une difficulté technique : comment vérifier l’âge des utilisateurs, éviter les usurpations d’identité tout en respectant les règles de protection des données ? « Nous voulons qu’il puisse y avoir des outils de vérification de l’âge qui se standardisent », explique le ministre. « J’ai demandé à des entreprises d’expérimenter des solutions qui préservent l’anonymat tout en assurant un niveau élevé de fiabilité de la mesure d’âge de l’utilisateur. Les expérimentations techniques sont en cours. Nous avons des solutions très intéressantes », a-t-il encore glissé, sans en dire davantage.