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Porno : « Plus l’exposition des enfants est précoce, plus il y a une banalisation du fait sexuel », alertent les associations
Par Simon Barbarit
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Hasard du calendrier, c’est le jour où l’Arcom somme les sites pornographiques YouPorn et RedTube de bloquer leur accès aux mineurs, que la mission du Sénat sur les dérives de cette industrie, auditionnait les associations de protection de l’enfance.
L’occasion de faire un point sur le nouveau rôle que la loi du 30 juillet 2020 a attribué au régulateur français de l’audiovisuel et du numérique. Pour rappel, c’est à l’initiative du Sénat que cette loi contraint les sites pornographiques de mettre en place un contrôle de l’âge de leurs visiteurs. L’Arcom (ex CSA) a la charge d’adresser une injonction de mise en conformité aux sites frauduleux. A défaut, l’Arcom peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris afin qu’il ordonne aux fournisseurs d’accès à Internet le blocage de ces sites depuis la France. Dès 2020, plusieurs associations de protection de l’enfance avaient fait pression sur le CSA pour qu’il agisse, mais faute de décret d’application, arrivé tardivement le 7 octobre 2021, ce n’est qu’en décembre dernier, que plusieurs sites pornographiques (Pornhub, Tukif, Xhamster, Xvideos, et Xnxx, Jackie et Michel…) ont reçu l’injonction de se mettre en conformité.
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« De plus en plus d’affaires de viols en réunion filmés dans les toilettes des cours de récréation »
L’association « e-nnocence » s’intéresse spécifiquement à l’exposition involontaire des mineurs aux contenus pornographiques. « Plus l’exposition est précoce, plus il y a une banalisation du fait sexuel », a mis en avant son président, Gordon Choisel en alertant sur les conséquences de cette exposition chez les mineurs. « On constate qu’il y a de plus en plus d’affaires de viols en réunion filmés dans les toilettes des cours de récréation chez des enfants de 12, 13 ans. Il est évident qu’ils n’ont pas eu cette idée tout seuls. Ils reproduisent un acte qu’ils ont vu en ligne ».
Quant à savoir si la nouvelle législation est efficace, pour le président de l’association « e-nnocence », ce serait plutôt le contraire. Il rappelle que l’article 227-24 du code pénal était déjà suffisamment explicite avant sa modification par la loi du 30 juillet 2020, car il interdit la diffusion de contenus pornographiques, « susceptibles d’être vus ou perçus par un mineur ».
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Mise en demeure des sites porno par l’Arcom. « La procédure mise en place est pour le moins discutable »
Pour Gordon Choisel, la loi de 2020 « n’a fait que créer un régime de responsabilité allégé pour certains opérateurs d’internet ». « On peut se satisfaire que les pouvoirs publics se soient saisis de cette question. Pour autant, la procédure mise en place est pour le moins discutable. Le président de l’Arcom ne peut demander le déréférencement d’un site qu’après l’avoir mis en demeure. C’est comme si vous mettiez en demeure un dealer avant d’appeler la police », a-t-il comparé.
Il regrette l’allongement des délais de procédure. Il note que le gouvernement a fait le choix de confier à l’Arcom le rôle du ministère public. Parmi les pistes d’amélioration, il préconise que les agents de l’Arcom puissent être assermentés pour faire les constats d’infraction et ainsi accélérer les délais ou encore faciliter la possibilité des associations d’agir en justice.
« Il faut garder à l’esprit, qu’on n’arrivera pas à fermer tous ces sites qui ont un intérêt financier. Ce qui nous semble essentiel c’est de réduire les flux et leur accessibilité. Le fait qu’un enfant de 16 ans tombe sur ces sites ce n’est pas la même chose que lorsque c’est un enfant de 10 ans », insiste-t-il.
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« 30 % des 15-17 ans déclarent consulter des contenus pornographiques sur les réseaux sociaux »
Ces sites, des « tubes » qui déversent un flot de vidéos pornographiques sans contrôle d’âge des utilisateurs ne sont que la face immergée de l’iceberg pour les associations qui pointent du doigt les réseaux sociaux.
Olivier Gérard, coordonnateur du pôle « Médias-usages numériques » de l’Union nationale des associations familiales (Unaf), rappelle que « 30 % des 15-17 ans déclarent consulter des contenus pornographiques sur les réseaux sociaux ». « On constate qu’aujourd’hui que la plupart des réseaux sociaux ne mettent pas en place de dispositif de contrôle d’âge ».
Le sénateur (rattaché au groupe LR), Bruno Belin fait l’expérience en direct et semble surpris d’avoir accès « en moins d’une minute » à des contenus pornographiques sur Twitter.
Thomas Rohmer, fondateur de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Open) remarque qu’il devient désormais difficile de faire « la dichotomie entre éducation aux médias et éducation à la sexualité. Les deux sont intimement liés à l’heure où certains influenceurs adoptent des comportements hypersexualisés dans ces espaces numériques ». Thomas Rohmer alerte sur l’émergence de certaines plateformes en France comme Onlyfans ou MYM « qui sont très incitatives pour certains ou certaines jeunes en difficulté ou fragiles ». Ces nouvelles plateformes très centrées sur la vente de vidéos ou de photos à caractère sexuel sont vraiment très inquiétantes ».
En conclusion, les associations se sont montrées extrêmement pessimistes sur la pertinence des outils juridiques destinés à limiter l’accès aux mineurs à la pornographie. « Les parquets n’ont déjà pas assez de moyens pour lutter contre la pédopornographie. Ils ne peuvent pas s’occuper de la pornographie », souligne Gordon Choisel.