Le ministre du travail, Olivier Dussopt, avait appelé à l’automne les organisations patronales et syndicales à trouver un accord sur le partage de la valeur en entreprise. Les partenaires sociaux ont conclu cet accord historique le 12 février dernier. Inquiets des mesures qui pourraient être décidées par l’exécutif, le MEDEF et la CFDT ont prévenu le gouvernement contre toute tentative de « détricotage du texte ». La majorité présidentielle tenait en effet lundi soir une convention sur le partage de la valeur en entreprise. Présente, Élisabeth Borne a fait savoir aux organisations patronales et syndicales qu’elle avait entendu le message ressorti de leur accord.
« Nous respecterons le compromis entre les partenaires sociaux »
Considérée comme une occasion pour le parti présidentiel de se poser en défenseur du travail, la convention Renaissance sur le partage de la valeur a finalement accouché d’une souris. Au-delà du contenu, la forme primait, la plupart des têtes d’affiche du parti étaient présentes Élisabeth Borne, Bruno Le Maire, Stéphane Séjourné, Clément Beaune… Sûrement pour pallier le manque de contenu de la convention, Stéphane Séjourné a insisté sur une consultation « décentralisée » en lien direct avec les « adhérents ».
Sur le fond, la Première ministre a annoncé « respecter le compromis entre les partenaires sociaux ». Dans une formule étonnante, Élisabeth Borne a ajouté qu’il lui paraissait « évident que le dialogue social était la meilleure méthode pour trouver les mesures les plus efficaces ». La « transcription fidèle et totale de cet accord dans la loi » pourrait être intégrée prochainement à un projet de loi. Pas de prise de risque donc, la majorité essaye surtout de se poser en défenseur de la « valeur travail ».
Un accord à l’équilibre fragile
Actuellement, l’accord prévoit plusieurs mesures pour mieux répartir la valeur créée au sein des entreprises, elles tiennent surtout à l’amélioration des mécanismes déjà existants. L’accord généralise l’obligation pour les entreprises entre 11 et 49 salariés de mettre en place un dispositif de partage de la valeur (intéressement, participation et prime de partage de la valeur) lorsque les bénéfices nets fiscaux de l’entreprise sont aux moins égaux à 1 % du chiffre d’affaires.
Si les syndicats étaient initialement opposés à l’ouverture de la prime sur le partage de la valeur aux entreprises - fiscalement avantageuse pour les entreprises - de moins de 50 salariés par peur qu’elle ne se substitue à des augmentations de salaires, cette dernière a été ajoutée. Les syndicats ont cependant obtenu que cette prime soit limitée à deux versements et dans la limite du plafond de 6 000 euros par an et par employé. Un mécanisme rejeté par le Sénat lors des débats sur l’adoption de la loi sur le pouvoir d’achat.
Enfin, l’accord évoque les superprofits et la possibilité d’un système automatique de redistribution dans les entreprises de plus de 50 salariés lorsque les résultats ont un « caractère exceptionnel tel que décrit par l’employeur ». Jean-Paul Mattei, président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, et Pascal Canfin s’étaient exprimés pour une définition, et une taxe, objective des superprofits.
Un sujet clivant au Parlement
Si l’exécutif compte sur cette pause parlementaire pour donner une teinte sociale à son agenda politique, le sujet est brûlant pour les oppositions. La sénatrice Christine Lavarde (LR) est toujours « défavorable à la taxation pour la taxation. Mais, si un projet de loi peut rendre acceptable que certaines entreprises réalisent de bons résultats, pourquoi pas » a nuancé la sénatrice du groupe majoritaire au Sénat.
Son de cloche différent de l’autre côté de l’hémicycle. Pour le sénateur communiste, Eric Bocquet, la « situation du pays » n’est pas appropriée pour ce genre de projet. Il estime également que « la théorie du ruissellement a fait long feu » avant d’ajouter que « la vraie redistribution c’est l’augmentation des salaires, car les salaires c’est aussi des cotisations ». Tout le monde n’a donc pas la même conception du partage de la valeur au sein de l’entreprise. D’autant que ces accords excluent les employés du public ou les indépendants.