Opération Wuambushu à Mayotte : Gérald Darmanin réaffirme sa stratégie

Mercredi 3 mai, le ministre de l’Intérieur a défendu sa stratégie de lutte contre l’immigration illégale à Mayotte dans l’hémicycle du Sénat. L’opération « Wuambushu » prévoit l’expulsion du sol français de ressortissants étrangers arrivés illégalement à Mayotte, principalement en provenance de l’archipel des Comores. Une opération soutenue par les élus locaux mais qui suscite des tensions avec les autorités comoriennes.
Lauriane Nembrot

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

« Ce que le gouvernement fait à Mayotte, c’est ce qu’il aurait dû faire depuis très longtemps. C’est-à-dire lutter contre l’immigration clandestine et l’insécurité sur l’île française. » Interrogé par le sénateur des Bouches-du-Rhône Jérémy Bacchi, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a défendu fermement l’opération « Wuambushu » menée depuis le 21 avril sur le territoire ultramarin.

Dans le détail, il s’agit avant tout selon le ministre d’ « interpeller les bandes, casser la spirale incroyable des « bangas », « ces habitats illégaux où vivent des enfants, des vieillards, des personnes handicapées qui n’ont ni eau, ni électricité, ni gaz », a précisé Gérald Darmanin.

Accélérer la lutte contre l’immigration clandestine en France

« Nous luttons contre l’immigration irrégulière » assure Gérald Darmanin. Le ministre de l’Intérieur rappelle notamment que « 80 % des enfants qui naissent à Mamoudzou » n’ont pas de parents ayant la nationalité française. Alors même que la maternité de Mamoudzou est la première de France en nombre de naissances par année, « 900 parturientes » sont accouchées par les sapeurs-pompiers assure Gérald Darmanin, démontrant ainsi « une difficulté sanitaire » supplémentaire.

Cette ambition affichée par le gouvernement doit aussi se poursuivre dans d’autres territoires. « L’immigration irrégulière est inacceptable dans votre département comme à Mayotte, c’est-à-dire dans toute la France », a aussi répondu le ministre de l’Intérieur alors qu’il était interrogé au sujet de « Wuambushu » par le sénateur des Bouches-du-Rhône Jérémy Bacchi.

Une île « plus belle que les Bahamas »

Une politique de lutte contre l’immigration parfaitement assumée. Lorsqu’il s’adresse au sénateur Thani Mohamed Soilihi, qui rappelle une « situation sans égal dans le reste du territoire français » et qui lui demande si l’Etat entend renforcer le dispositif de l’opération, Gérald Darmanin assure qu’il agit avant tout en faveur de Mayotte. « Le problème de cette magnifique île, qui pourrait être plus belle encore que le sont les Bahamas ou les Seychelles avec son lagon incroyable, est qu’elle est déstabilisée par une population qui malheureusement fait dériver les services publics ».

La réponse à ce constat se trouverait dans l’opération Wuambushu. « Nous interpellons au péril des policiers et des gendarmes tous les jours et toutes les nuits des bandes criminelles. C’est le premier objectif de cette opération », a martelé le ministre dans l’hémicycle du Sénat mercredi 3 mai.

Une opération lancée à l’initiative des élus mahorais

Répondant à cette question et des propos qu’il juge « scandaleux », Gérald Darmanin a répété être convaincu du bien-fondé de « Wuambushu ». « Cette opération nous la lançons à la demande de tous les élus mahorais et même du responsable LFI de Mayotte, ça mérite quand même d’être souligné », a également lancé Gérald Darmanin.

Députés et élus mahorais avaient en effet demandé au gouvernement d’intervenir rapidement sur l’île, afin de tenter de réguler l’immigration irrégulière et de remédier à l’insécurité grandissante. À commencer par le sénateur de Mayotte Thani Mohamed Soilihi (RDPI) , qui parle d’une « opération courageuse » ; « nécessaire » et d’une « réponse forte » . Selon lui, « elle tranche avec l’inertie de ces dernières années ».

Invité de Public Sénat mardi 2 mai, il a lancé un appel à l’Etat pour le déploiement de l’armée sur l’île pour « dissuader les kwassa kwassa – embarcations qui transportent illégalement des personnes en situation irrégulière au départ des Comores et à destination de Mayotte – de faire des traversées. Favorable à l’opération « Wuambushu », il demande ce mercredi au gouvernement des mesures supplémentaires pour que « cette promesse de retour à l’ordre républicain soit un succès ».

« Nous avons une coopération efficace avec les Comores »

Mais depuis le lancement officiel de l’opération Wuambushu à Mayotte, les relations sont pour le moins tendues entre la France et l’archipel africain des Comores. Fortement opposé à la reconduite à la frontière et au rapatriement contraint de ressortissants comoriens, le régime du président Azali Assoumani a déjà demandé à Paris de renoncer à l’opération Wuambushu. « Nous utilisons tous les moyens diplomatiques pour renouer le contact » a indiqué ce mercredi Gérald Darmanin.

« Dans cette opération, vous vous heurtez à la non-réadmission de ces gens en situation irrégulière à Anjouan ou aux Comores […] que nous tentons d’expulser de Mayotte » a soulevé François-Marie Buffet, sénateur LR du Rhône. « Sans réussite, sans obtention de ces fameux laissez-passer consulaires, je pense que l’opération sera en difficulté », a-t-il indiqué.

« Nous avons une coopération efficace avec les Comores », a aussitôt répondu Gérald Darmanin, qui veut se montrer rassurant. Une « bonne coopération » qui s’illustre par des chiffres brandis par le ministre de l’Intérieur. « Chaque année, 25.000 reconduites à la frontière ont lieu et 100 % des personnes condamnées par la justice française ont été renvoyées aux Comores ». Selon Gérald Darmanin, une rencontre avec son homologue mahorais devrait avoir lieu à ce sujet place Beauvau dans les prochains jours.

Dans la même thématique

France Rape Trial
4min

Société

Procès de Mazan : une mission sur la soumission chimique stoppée à cause de la dissolution

Le procès retentissant des viols de Mazan fait prendre conscience de l’ampleur du phénomène de la soumission chimique. Une mission gouvernementale sur ce sujet avait été lancée en avril avec à sa tête la députée Modem, Sandrine Josso, elle-même victime de ce procédé. Les travaux ont été stoppés avec la dissolution. La parlementaire s’apprête à envoyer un courrier au chef de l’Etat pour qu’elle reprenne au plus vite.

Le

Telegram
4min

Société

Interdiction de X au Brésil, arrestation du patron de Telegram en France : « Ça marque un tournant », selon Thomas Huchon 

Vendredi 30 août 2024, un juge brésilien a ordonné la suspension dans le pays du réseau social X, anciennement Twitter. Quelques jours plus tôt, le patron de l’application Telegram était mis en examen et placé sous contrôle judiciaire, à Paris, pour une demi-douzaine d’infractions liées à la plateforme. Ces décisions prises par la Justice au Brésil et en France marquent un tournant pour les réseaux sociaux selon Thomas Huchon, journaliste et enseignant spécialisé dans l'étude des fake news et des théories complotistes.

Le

Telegram
5min

Société

Mise en examen de Pavel Durov : « Telegram a accepté de devenir la plateforme du crime organisé »

Ce jeudi, le Kremlin a averti que l'affaire judiciaire visant le patron franco-russe de Telegram, arrêté en France, ne devait pas « se transformer en persécution politique ». Inculpé par la justice française qui lui reproche de ne pas agir contre la diffusion de contenus criminels sur la messagerie, Pavel Durov s'est vu imposer un lourd contrôle judiciaire l'obligeant à rester en France. Pour Public Sénat, Michel Sejean, professeur de droit à l'Université Sorbonne Paris Nord, enseignant-chercheur en droit de la cybersécurité et directeur scientifique du Code de la cybersécurité aux éditions Dalloz, analyse une affaire qui pourrait se résumer à « une attaque contre l’impunité » et non contre la liberté d’expression.

Le

La sélection de la rédaction

France Mayotte decasing operation
5min

Politique

Mayotte : l’opération Wuambushu entre revers judiciaire et tensions diplomatiques

Une vaste opération de maintien de l’ordre a débuté le vendredi 21 avril à Mayotte. L’opération Wuambushu visait le démantèlement des bidonvilles installés sur l’île et l’expulsion des migrants en situation irrégulière. Le tribunal judiciaire de Mamoudzou a néanmoins suspendu l’opération jugeant les conditions d’expulsion irrégulières et les solutions de relogement insuffisantes. En parallèle, les Comores refusent la reconduction sur leur territoire des migrants irréguliers.

Le

Opération Wuambushu à Mayotte : Gérald Darmanin réaffirme sa stratégie
3min

Politique

Mayotte : une situation alarmante, selon le sénateur Thani Mohamed Soilihi

A Mayotte, 13 nouveaux cas de Covid-19 ont été répertoriés en 24 heures portant à 339 le nombre de cas sur l’ile. Une situation inquiétante dans ce département d’outre-mer de 250 000 habitants où la densité est 6 fois supérieure à celle de l’Hexagone. Sénateur LREM de Mayotte, Thani Mohamed Soilihi, alerte sur le risque d’expansion de l’épidémie.  

Le