Plus qu’un humoriste, Pascal Légitimus connait la scène par cœur. Successivement, comédien, scénariste, metteur en scène puis réalisateur ; il sait provoquer le rire chez le spectateur, mais avec toujours la même idée en tête, observer le monde avec un œil critique tout en mettant le doigt sur une de nos contradictions. « Pour tous les sketchs [des inconnus] que l’on a faits, on a reconstitué la réalité en un tout petit peu déformée, il y a un petit côté clownesque, mais ce que l’on restitue, c’est un point de vue » raconte-t-il. Et si certains pensent qu’on ne peut plus rire de tout, Pascal Légitimus défend le contraire : « Je pense qu’on peut rire de tout, mais c’est la manière qu’il faut changer, c’est le vecteur, c’est la forme, c’est le paquet cadeau. Moi, j’ai fait un sketch sur Daech il y a cinq ans, je l’ai même testé en Tunisie, ça a très bien marché parce qu’il y avait un personnage, un contexte et ça a fait du bien » explique-t-il.« Les blagues qui sont nulles, mal faites, mêmes vulgaires, il faut les éliminer »Celui qui a fait ses débuts à la télévision dans l’émission, « Le petit théâtre de Bouvard » ne regrette pas un seul de ces sketchs. Il revient d’ailleurs sur un des sketchs des inconnus les plus connus, celui des infirmières antillaises : « C’est un hommage aux aides-soignants en ce qui me concerne. Quand je restitue avec mes camarades, qui font un black face pour eux, en ce qui les concerne, pour moi, c’est un hommage à toute une partie de ma famille, c’est générationnel, c’est un hommage aux Antillais qui ne sont pas souvent représentés, c’est ce qu’on appelle la diversité » soutient-il. Pour le comédien, le black face n’est pas toujours condamnable : « Si c’est drôle et intelligent oui, mais si c’est mal fait évidemment… Les blagues qui sont nulles, mal faites, mêmes vulgaires, il faut les éliminer ».
« Comment peut-on reprocher à quelqu’un ce qu’il n’a pas choisi d’être ? » - Pascal Légitimus
Même si l’humour des inconnus a fait l’unanimité, les trois comédiens n’ont pas été à l’abri des critiques. Pascal Légitimus fait partie de ceux qui dénoncent cette attitude de politiquement correct : « Le problème ce n’est pas forcément les critiques, ce sont les décideurs qui prennent en compte ces critiques. Ils ont peur, comme ça a toujours été. La France est le pays du politiquement correct parce qu’on a peur de tout. On a peur de ne pas manger, d’arriver en retard, de ne pas être aimé. La France est l’un des pays les plus peureux au monde, c’est le pays qui a le plus de pharmacies au m
2 et le premier consommateur d’anxiolytiques ». A la différence de ses compagnons de planches, Pascal Légitimus a subi tout au long de sa carrière du racisme. Il a appris à ignorer ces commentaires : « Comment peut-on reprocher à quelqu’un ce qu’il n’a pas choisi d’être ? On ne choisit pas d’être arabe, juif, aveugle, handicapé, chinois. Je n’ai pas choisi d’être métis alors pourquoi on me le reproche ? Les gens qui sont racistes qui critiquent sur l’apparence sont des gens qui ne sont pas très intéressants » balaye-t-il.
Victime de racisme depuis l’enfance.Depuis son jeune âge, l’humoriste révèle avoir subi des violences liées à sa couleur de peau : « Dans les années 70, c’était chaud » lance-t-il. « Je pense qu’il y avait beaucoup d’enfants qui étaient mal éduqués. Ils ne voyaient pas l’humain. On m’a brûlé mes vêtements, on m’a pissé dessus, on m’a frappé. J’ai subi beaucoup de choses, mais ça m’a forgé. Je ne suis pas rancunier, je n’ai pas de haine » raconte-t-il. De ces violences il a tiré une force, et des sketchs toujours actuels. Des sketchs cultes avec Didier Bourdon et Bernard Campan qui ont récemment été repris par une soixantaine d’humoristes, comédiens et chanteurs dans une émission intitulée « Tous inconnus » sur TF1. Un bel hommage qui témoigne de l’héritage de ces trois humoristes.