La (co)dépendance énergétique de l’Europe et de la Russie en chiffres

La (co)dépendance énergétique de l’Europe et de la Russie en chiffres

La dépendance énergétique de l’Europe à la Russie est un sujet crucial depuis le début de la crise ukrainienne. Mais à quel point les pays de l’UE dépendent-ils vraiment des exportations d’énergie russes ? À l’inverse, à quel point la Russie serait-elle pénalisée par des sanctions économiques visant à réduire ces exportations énergétiques vers l’UE ?
Louis Mollier-Sabet

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Alors que Bruno Le Maire a estimé ce mercredi matin que la situation actuelle était « comparable en intensité et en brutalité au choc pétrolier de 1973 », le volet énergétique du conflit en Ukraine devient une facette primordiale de la guerre qui se déroule actuellement à l’Est de l’Europe. La Russie est probablement le partenaire énergétique le plus important de l’Union européenne, avec 40 à 50 % des importations européennes de gaz et de charbon et 20 à 25 % des importations européennes d’hydrocarbures qui proviennent de la Fédération de Russie. Le problème de la dépendance énergétique des pays de l’UE à la Russie s’est donc immédiatement posé, dès le début de l’invasion russe, mais pas exactement dans les mêmes termes pour tous les pays européens.

À retenir : la Russie, le partenaire énergétique clé de l’UE

  • La Russie, c’est 40 à 50 % des importations européennes de gaz naturel
  • La Russie, c’est 20 à 25 % des importations européennes de pétrole
  • La Russie, c’est environ 40 % des importations européennes de combustibles solides (le charbon principalement)

Des dépendances inégales à la Russie : l’exemple de la France et de l’Allemagne

Alors que la Commission européenne a présenté mardi 8 mars un plan pour amortir la flambée des prix de l’énergie, ainsi que pour réduire de 2/3 les importations européennes de gaz russe, l’Allemagne s’est prononcée contre un embargo sur le gaz et le pétrole. Annalena Baerbock, la ministre écologiste des Affaires étrangères, a notamment craint de devoir revenir sur ces sanctions quand « les lumières s’éteindront » en Allemagne ou en Europe. Les 27 devraient se mettre d’accord sur une stratégie au sommet de Versailles jeudi et vendredi, alors que les contraintes en termes d’émissions de gaz à effet de serre réduisent la marge de manœuvre en rendant difficile le recours au charbon. Mais tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Globalement, et pour des raisons géographiques évidentes, l’Europe de l’Est est plus dépendante des importations énergétiques russes. L’Allemagne importe par exemple 55 % de son gaz et 42 % de son pétrole à la Russie, contre 17 % et 9 % pour la France.

>> Lire aussi : Les sénateurs proposent des « mesures d’urgence » pour réduire notre dépendance au gaz russe

En outre, l’Allemagne est d’autant plus dépendante des exportations du régime de Vladimir Poutine que son mix énergétique repose plus fortement sur le gaz naturel et le charbon que la France, avec respectivement 28 % de l’énergie finale consommée contre 20 % pour le gaz et 10 % contre 3 % pour le charbon. De plus, l’Allemagne est de façon générale plus dépendante de ses importations d’énergie. En effet, le taux de dépendance énergétique, qui calcule la part d’énergie importée par rapport à l’énergie totale consommée, montre que l’Allemagne importe 67,6 % de son énergie, avec 1/3 de l’énergie finale consommée en Allemagne provenant de la Russie, si l’on prend en compte les importations de gaz naturel, de pétrole et de charbon. À titre de comparaison, la France n’importe même pas la moitié de son énergie (47,6 %), et en prenant en compte les importations de gaz, de pétrole et de charbon russes, moins de 10 % de l’énergie française proviendrait de la Russie.

À retenir : des disparités importantes dans la dépendance énergétique à la Russie

  • L’Allemagne importe 55 % de son gaz et 42 % de son pétrole et 50 % de son charbon de Russie, pour environ 1/3 de l’énergie finale consommée provenant d’importations russes
  • La France importe 17 % de son gaz et 9 % de son pétrole et 30 % de son charbon de Russie, pour à peine 10 % de l’énergie finale consommée provenant d’importations russes

L’enjeu des sanctions économiques : le pétrole bien plus important que le gaz pour l’économie russe

Ces disparités structurelles dans les mix énergétiques européens avaient déjà compliqué la mise en place de la taxonomie européenne. Elles devraient à nouveau être l’objet de négociations difficiles dans le plan qu’adoptera finalement l’Union européenne pour réduire sa dépendance énergétique aux importations russes, afin de mettre en place des sanctions économiques efficaces. Parce que, si l’Europe – et particulièrement les pays de l’Est et l’Allemagne – est dépendante des importations énergétiques russes, la Russie est en retour aussi dépendante de ses exportations de gaz, de pétrole et de charbon vers l’Union européenne.

D’après un rapport de Transport & Environnement, l’Europe « donne à Poutine 285 millions de dollars par jour pour couvrir ses besoins de pétrole. » Les exportations russes de pétrole vers l’Europe représentent ainsi 104 milliards de dollars (ou 88 milliards d’euros) par an, soit environ 7 % du PIB. D’après ce rapport, l’énergie représente la moitié des exportations de matières premières russes, soit environ 125 milliards de dollars d’exportations de pétrole et de gaz vers l’Europe, soit la moitié des exportations russes totales. Le gaz naturel n’est donc pas au cœur de la balance commerciale russe, les exportations de pétrole vers l’Union européenne représentant, en valeur, 4 fois les exportations de gaz naturel.

À retenir : les exportations de pétrole vers l’Union européenne sont le principal enjeu des sanctions

  • Pour la Russie, les exportations énergétiques représentent la moitié des exportations de matières premières
  • La moitié des exportations énergétiques russes sont dirigées vers l’Union européenne, soit environ 125 milliards de dollars et 8,5 % du PIB russe.
  • Les exportations de pétrole vers l’Union européenne représentent plus de 100 milliards de dollars pour la Russie, soit environ 7 % du PIB.
  • Dans le cadre des sanctions économiques prises par l’Union européenne, le pétrole est donc un enjeu plus important que le gaz naturel

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