“Il y a des relations historiques extrêmement puissantes entre la France et l’Algérie, mais le maintien aujourd’hui d’un tel dispositif avec un pays avec lequel nous entretenons des relations compliquées ne me paraît plus justifié” a déclaré Edouard Philippe à l’Express le 5 juin. Alors que le dépôt du projet de loi immigration se fait attendre, l’ancien premier ministre a repris certaines idées poussées par Les Républicains. Une position dont se félicitait Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, affirmant que Les Républicains “font l’actualité”. Mais concrètement, que contient cet accord bilatéral devenu un marqueur fort pour la droite française.
Des facilités pour l’obtention des titres de séjour
Ce traité international régit les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants algériens sur le territoire français et pose donc un régime dérogatoire du droit commun en matière d’asile. Les conditions du regroupement familial sont assouplies. En effet, en cas de regroupement familial, les membres de la famille reçoivent également un certificat de résidence de 10 ans lorsque la personne qu’ils rejoignent dispose de ce titre. D’autres facilités relatives aux titres de séjour existent comme la possibilité de demander un certificat de 10 ans après trois ans de séjour. Le droit commun impose aux ressortissants d’autres nationalités un délai de cinq ans. Par ailleurs, l’accord permet de s’installer librement en France pour exercer une profession indépendante ou de commerçant.
Un traité visant à “favoriser le plein emploi”
Ce traité vieux de 55 ans et signé par le général de Gaulle et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des affaires étrangères algérien, permettait à la France de pouvoir compter sur une main d’œuvre importante, en échange de quoi les installations des travailleurs algériens bénéficient d’un régime juridique spécial. Ces facilités d’installation et d’exercice d’une activité professionnelle étaient avant tout destinées à régulariser certaines situations, mais aussi à assurer le plein emploi. Le préambule de l’accord précise que les deux Etats sont “conscients de la nécessité de maintenir un courant régulier de travailleurs”. L’objectif est de “favoriser le plein emploi de ces travailleurs qui résident déjà en France ou qui s’y rendent par le canal de l’Office national de la main d’œuvre”. Si le caractère caduque de l’accord est mis en avant par ses détracteurs, trois modifications du traité ont été réalisées en 1985, 1994 et 2001. Selon l’Insee, en 2021, 887 000 ressortissants algériens vivaient en France.
Un traité symbole des tensions entre l’Algérie et la France
La remise en question de l’accord souhaité par la droite s’inscrit également dans la perspective de relations tendues entre la France et l’Algérie. Le refus de l’Algérie de délivrer des laissez-passer consulaires a déclenché un incident diplomatique avec la France au début du mois de mars. Ces autorisations sont indispensables afin de pouvoir faire appliquer une “obligation de quitter le territoire français” (OQTF). Cette décision prise par un préfet permet l’expulsion en cas de séjour irrégulier ou en cas de refus de délivrance d’un titre de séjour. Pour ces raisons, la droite pousse pour une révision voire une dénonciation de l’accord. “Cinquante-cinq ans après, les conditions ont changé. Je pense que ce traité, il faut le réexaminer”, conclut le président LR du Sénat Gérard Larcher.