Glyphosate : « Une sale journée pour l’environnement » déplore Yannick Jadot

Glyphosate : « Une sale journée pour l’environnement » déplore Yannick Jadot

Les États membres de l’UE pouvaient décider, ce mercredi, d’une sortie progressive du glyphosate. La décision a finalement été reportée. Dans la foulée, la France s’est dite favorable à une « prolongation qui n’aille pas au-delà de 4 ans », mais ne suit pas la position du Parlement européen qui a voté, hier, sa disparition progressive.
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Ce devait être une semaine cruciale sur la question du glyphosate. Après le vote, mardi, des eurodéputés d’une résolution en faveur d'une élimination progressive du glyphosate dans l'UE d'ici la fin 2022, l’Europe était suspendue à la décision des experts des États membres réunis à Bruxelles. En effet, le vote du Parlement n’ayant pas de valeur contraignante, il appartenait aux États de définir la durée de vie du glyphosate, molécule classée « cancérogène probable » par l’OMS et principe actif du Roundup de la firme Monsanto, herbicide le plus utilisé au monde.

 La Commission européenne avait revu (un peu) sa copie en proposant, hier, un renouvellement de l'autorisation de la substance pour cinq à sept ans au lieu de dix ans, sans évoquer la disparition progressive de cet herbicide le plus utilisé au monde.

La décision des États membres reportée

Les représentants des différents pays membres ne sont donc pas parvenus à un accord sur la proposition de la Commission. La majorité qualifiée n’a pas été atteinte : 16 États sur 28, représentant 65 % de la population de l’UE.  Selon une porte-parole de la Commission, l'exécutif européen maintient son objectif de « trouver une solution qui bénéficie du soutien le plus large possible, qui assure un haut niveau de protection de la santé humaine et de l'environnement, en ligne avec la législation européenne et fondée sur les données scientifiques disponibles ». La Commission fixera « sous peu » une nouvelle date de réunion.

Matignon favorable à une prolongation qui « n'aille pas au-delà de 4 ans »

La France, qui avait déjà fait part de son opposition à un renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour une durée de 10 ans, a dans la foulée fait part de sa position officielle. Matignon s’est dit favorable à une prolongation qui « n'aille pas au-delà de 4 ans ». Un choix de sémantique qui a sonné comme un camouflet pour le ministre de la Transition écologique. Présent au Sénat, mardi, Nicolas Hulot avait une nouvelle fois indiqué qu’il fallait « sortir de l’autorisation de cette molécule ». « Tout en ayant bien à l’esprit » qu’il allait falloir aider les agriculteurs à le faire. ».

Nicolas Hulot reste ferme pour « organiser la sortie de l’utilisation de pesticides »

Ce mercredi, lors des questions d’actualités à l’Assemblée nationale, le ministre a même semblé en décalage avec cet arbitrage en sa défaveur opéré par Matignon. « Nous sommes dans une stratégie de fermeté, de rationalité, pour, d’une manière progressive mais déterminée, organiser la sortie de l’utilisation de pesticides ».

Glyphosate: "Nous sommes dans une stratégie de fermeté"
01:22

« Ce n’est pas à la hauteur des ambitions écologiques affichées par l’exécutif »

Si le communiqué du Premier ministre indique que  « le maximum doit être fait pour que d'ici la fin de la période retenue, on puisse proposer aux agriculteurs des alternatives crédibles », la sortie progressive du glyphosate est passée sous silence. « C’est une sale journée pour l’environnement » a réagi l’eurodéputé EELV, Yannick Jadot. « C’est dramatique. Le Parlement européen a envoyé aux gouvernements le seul signal qui vaille : organiser la sortie du glyphosate. La France ne fait que reporter le problème. Ce n’est pas à la hauteur des ambitions écologiques affichées par l’exécutif. Nicolas Hulot est le ministre le plus populaire du gouvernement et il perd ses arbitrages au profit de Stéphane Travert » déplore l’ancien candidat écologiste à la présidentielle.

Sur France Inter, le ministre de l’agriculture, Stéphane Travert  a affirmé que l’utilisation du glyphosate était « nécessaire ». «  Ça évite de retourner les sols, on fait travailler les vers de terre. Ça, c’est l’agroécologie qui a été mise en place par le quinquennat précédent et nous devons encourager ces pratiques ».

Faisant référence à deux études réalisées par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques, qui n’ont pas considéré le glyphosate comme potentiellement cancérogène, Jean Bizet, président LR de la commission des affaires européennes du Sénat, a jugé que le glyphosate n’était « pas un problème de santé publique ». « Le glyphosate peut être potentiellement cancérigène au même titre que la charcuterie, que certains alcools ou le café » a-t-il affirmé. « Il faut relativiser. Nous sommes dans un débat de société en ce qui concerne le modèle agricole français ou européen » a-t-il conclu.

Le glyphosate peut être potentiellement cancérigène au même titre que la charcuterie et le café" selon Jean Bizet
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L’autorisation du glyphosate, principe actif du Roundup, herbicide commercialisé par Monsanto, arrive à son terme le 15 décembre. En l’absence de décision d’ici là, la firme américaine pourrait déposer « un recours en carence » auprès de la Cour de justice de l’Union européenne.

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