Espace : un rapport du Sénat se penche sur les enjeux de l’exploitation des « ressources extraterrestres »
Dans un rapport, les sénatrices Christine Lavarde et Vanina Paoli-Gagin mettent en lumière « l’enjeu de l’exploitation des ressources spatiales » dans sa dimension économique et géopolitique. Alors que les Etats-Unis et la Chine sont dans une « course au spatial », les sénatrices appellent à « assumer » le principe de l’exploitation de la Lune et de Mars et appellent les Européens à « passer à l’action ».
Attention, on ne parle pas ici des petits hommes verts. Mais plutôt de métaux rares. Dans un rapport pour la délégation à la prospective du Sénat, les sénatrices Christine Lavarde (LR) et Vanina Paoli-Gagin (groupe Les Indépendant), mettent le doigt sur un sujet sensible et crucial pour l’avenir : l’exploitation des ressources spatiales.
« Les ressources spatiales, ce n’est plus de la science-fiction, le film Avatar ou Alien »
« Les ressources spatiales, ce n’est plus de la science-fiction, le film Avatar ou Alien. Et ce n’est pas un monde où les méchants exploitent les ressources et l’univers qui les entoure. C’est une réalité concrète, un enjeu géostratégique, géopolitique et économique. Et cet enjeu, c’est demain. En 2027, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils seront à nouveau sur la Lune, pas seulement pour y planter un drapeau mais pour construire une base. Et les Chinois ont dit qu’ils seront là pour les accueillir », souligne Christine Lavarde, qui dresse le tableau. Entre les Etats-Unis et la Chine, c’est objectif Lune – puis Mars – et c’est à qui arrivera le premier. « Il y a une course au spatial car aujourd’hui, on se rend compte que les ressources spatiales permettent d’apporter des réponses à la finitude des ressources terrestres », explique la sénatrice LR des Hauts-de-Seine.
C’est « l’enjeu de l’exploitation des ressources spatiales. Il y a des opportunités réelles sur la Lune et Mars. Il y a un potentiel économique sur ces deux astres », lance Christine Lavarde, pour qui il faut « assumer l’exploitation » de ces « ressources extraterrestres », au sens propre.
Psyché, l’astéroïde qui « permettrait de subvenir aux besoins de l’humanité en métaux rares pour des millions d’années »
Pour avoir une idée des enjeux colossaux, que les Etats et certaines entreprises privées ont déjà bien en tête, Christine Lavarde prend l’exemple de « Psyché ». Derrière ce petit nom, se cache non pas les phénomènes psychiques, mais un astéroïde qui gravite quelque part entre Mars et Jupiter. « Il contiendrait l’équivalent de 700 trillions de dollars de fer, de nickel, d’or et d’autres métaux précieux », explique la synthèse du rapport. « On sait que son contenu permettrait de subvenir aux besoins de l’humanité pour une période très longue, des millions d’années », explique la sénatrice. De quoi susciter quelques convoitises.
Plus proche, notre bonne vieille Lune, comme Mars, sont dans le collimateur des puissances. « L’enjeu, c’est de s’installer durablement sur la Lune, et demain sur Mars, pour pouvoir exploiter les deux astres. On sait qu’on pourra vivre sur la Lune en mobilisant les ressources disponibles sur place. Car sur la Lune, on trouve de l’eau. C’est vital pour les êtres humains. Par processus chimique, on peut en faire aussi de l’oxygène pour respirer et de l’énergie, pour redécoller », détaille Christine Lavarde. Connaissez-vous le régolithe lunaire ? C’est la poussière présente à la surface de notre satellite. Il pourra être utilisé pour « en tirer de l’oxygène et un matériau de construction, utilisé par l’impression 3D », décrit l’élue, avant d’ajouter :
« On a aussi des nutriments sur le sol martien qui permettraient de faire de l’agriculture »
La planète rouge, qui doit son nom à l’abondance de fer présent dans son sol, a en effet de quoi nourrir les imaginaires. « Il y a beaucoup plus d’eau, énormément sous forme de glace, à faible profondeur. On a aussi des nutriments sur le sol martien qui permettraient de faire de l’agriculture. Et l’atmosphère de Mars, c’est 95% de CO2, mais on peut le transformer en oxygène et en méthane, soit un combustible, une source d’énergie », souligne la sénatrice LR. Ce n’est pas pour rien si la fusée Starship de Space X, la société d’Elon Musk, utilise du méthane justement.
Le cas de SpaceX est emblématique de « ce moment clef de bascule » que nous vivons, selon Vanina Paoli-Gagin. « Des puissances leaders, avec des acteurs privés disruptifs, prennent des années lumières d’avance sur nous, et réinventent des nouveaux modèles, qui vient titiller la puissance publique. La NASA externalise ses lancements, car c’est moins cher », souligne la sénatrice de l’Aube. Alors que pendant ce temps, les Européens « attendent toujours Ariane 6, quand Space X aura fait 100 lancements ».
« C’est une espèce de nouvelle conquête de l’ouest où le premier arrivé sera le premier servi… »
Pour ne rien arranger, le niveau global des budgets dédiés au spatial n’est pas comparable. « 14 milliards pour les Etats-Unis versus 1 milliard pour l’Europe », pointe Vanina Paoli-Gagin, qui ajoute : « Il faut passer à l’action. Si on veut continuer d’exister dans le paysage, que ce soit à l’échelon européen ou national ».
Dans ce jeu de grandes puissances, la concurrence entre les deux principaux acteurs risque de s’aiguiser. « Comme la course entre les Etats-Unis et la Chine est très ardente, ils vont y arriver. C’est une espèce de nouvelle conquête de l’ouest où le premier arrivé sera le premier servi… Et il dictera ses normes aux autres », met en garde la sénatrice du groupe Les Indépendants. Pour la Lune, « la zone qui est exploitable, où il y a des cratères avec de l’eau, c’est le pôle Sud. C’est la zone la moins hostile. Or c’est la taille de la petite couronne de l’Ile-de-France. On a du mal à croire qu’il y aura une copropriété pour tout le monde… » lâche Vanina Paoli-Gagin. Ces tensions pourraient-elles aller jusqu’à la guerre ? « Ce n’est pas exclu » pour Christine Lavarde. Ce n’est pas encore à la guerre des étoiles, mais elle ajoute :
« Le premier qui arrive au pôle Sud de la Lune peut militariser la zone »
Pour compliquer les choses, l’espace, c’est un peu de la loi de la jungle ou presque. « Aujourd’hui, il n’y a pas de cadre international sur les ressources spatiales. Il y a eu une tentative avec un traité sur l’espace en 1967, où on a affirmé que les corps célestes ne peuvent pas faire l’objet d’une appropriation nationale. Par contre, le traité ne dit rien des ressources », explique Christine Lavarde, qui ajoute qu’« en 1979, il y a eu un traité sur la Lune, qui interdit explicitement l’appropriation des ressources. Il dit que ça appartient au patrimoine commun de l’humanité, mais il n’a été signé par aucune puissante spatiale… » Quant à l’ONU, une instance a commencé à se pencher sur le sujet, mais « qu’en 2022 ».
De leur côté, les Etats-Unis ont avancé unilatéralement. En 2015, le Space act autorise l’exploitation des ressources spatiales à des fins commerciales pour tout citoyen américain. En 2020, ils mettent en place les accords Artemis, signés avec huit autres pays. Ils introduisent la notion de « safety zone », une zone de sécurité. « C’est pour protéger leurs activités de toute interférence nuisible. Autrement dit, le premier qui arrive au pôle Sud de la Lune peut militariser la zone », décrypte Christine Lavarde. De son côté, la France défend une solution négociée au niveau multilatéral. « C’est la stratégie du béni-oui-oui ou de l’utopie », tacle la sénatrice LR. Cela n’a cependant pas empêché la France de signer les accords Artemis. « Cela veut dire qu’on se range derrière les Etats-Unis », pour la sénatrice des Hauts-de-Seine.
Et quelle place pour la France justement dans cet infiniment grand ? « Un gros effort est fait par l’exécutif avec France 2030, car il y a 1,5 milliard d’euros réservés au spatial, dont un milliard pour les starts up du new space. Il y a une prise de conscience », salue Vanina Paoli-Gagin. Mais pour Christine Lavarde, « il faudrait aller au-delà avec une vision de long terme ». Quelque part vers l’infini et au-delà.
« Quel pouvoir de contrôle, de police, quel régime fiscal pour ces ressources de l’espace ? »
Face à ce constat général, la question aujourd’hui n’est plus le principe de « l’appropriation, car elle est en marche, mais davantage les modalités de l’appropriation » des ressources, selon la sénatrice Vanina Paoli-Gagin. Pour les sénatrices, il faudrait tenter de définir un cadre. Y compris en imaginant… un impôt.
« Il faut qu’on ait voix au chapitre, sur les règles d’attribution, les modalités d’agrément, sur les quotas, le pouvoir de contrôle, de police, quel régime fiscal pour ces ressources de l’espace », évoque la sénatrice de l’Aube. Dans l’immédiat, les sénatrices préconisent d’adapter le cadre juridique national et européen afin de développer « une stratégie européenne des ressources spatiales ».
« Tous les concepts terriens ne sont pas transposables »
Si le rapport est complet, ne manque-t-il pas une dimension écologique ? En exploitant la Lune ou Mars, l’homme y laissera de fait sa trace et y dégradera, comme sur la Terre, l’environnement. Mais pour les sénatrices, c’est un faux problème. « On ne peut pas transposer sur la Lune notre cadre de réflexion humain. Sur la Lune, il n’y a pas d’être vivant, pas de population. On n’ira pas coloniser des populations, faire des esclaves. Il n’y a pas de biodiversité à préserver », souligne Christine Lavarde.
Pour la sénatrice LR, « il ne faut pas transposer ces concepts, sinon on sera les derniers ». Vanina Paoli-Gagin est sur la même ligne. « Je comprends qu’on puisse se dire que les humains ont déjà ravagé la Terre, qu’ils iront encore faire des dégâts. Mais on ne peut pas raisonner en ces termes-là. Dans l’espace, il n’y a pas de nature au sens où on l’entend. Tous les concepts terriens ne sont pas transposables », soutient la sénatrice de l’Aube, qui ajoute : « On ne peut pas transposer le concept de pollution ou de biodiversité à ces espaces-là ». Il ne faudrait quand même pas qu’on trouve une trace de vie sur place. Ça compliquerait un peu les plans…
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