Capture d’écran du documentaire « Là où tout se joue. Du théâtre dans les tours »

En Seine-Saint-Denis, le théâtre se joue chez les habitants 

« Quand on a vu que les gens n’allaient pas au théâtre, on s’est dit que le théâtre irait chez eux ». Valérie Suner est la directrice de « La Poudrerie », scène conventionnée implantée depuis 2011 à Sevran, en Seine-Saint-Denis. Sa particularité : proposer du spectacle vivant chez et avec les habitants du territoire. La réalisatrice Julie Chauvin a suivi l’un de leurs projets, il est au cœur du documentaire : « Là où tout se joue. Du théâtre dans les tours »
Rebecca Fitoussi

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

Ils sont nés à Sevran ou dans les environs, ils y ont grandi, souvent en cité HLM, ils ont fait de brillantes études ou sont passés par la case prison pour trafic de drogue et c’est l’aventure théâtrale qui va les réunir le temps d’un projet de spectacle sur la vie des jeunes hommes de banlieue.

La pièce de théâtre s’écrira au fil de l’eau, à partir de leurs témoignages, de leurs confidences livrées en toute confiance à la directrice du théâtre et à l’auteure du texte en gestation, Dorothée Zumstein. Elle s’inspirera de leurs histoires respectives, elle s’inspirera par exemple de ce jeune homme pakistanais par son père, français par sa mère qui confie son addiction passée au cannabis :

« Je retrouve de l’ambition. Je l’avais perdue parce que je fumais beaucoup. Fumer, c’est fuir. Fumer, c’est empêcher l’ennui. »

Le texte s’écrira aussi à partir des propos de cet autre jeune homme qui regrette d’avoir été dealer :

« Je vendais de la mort, j’étais un vendeur de mort »

Un autre confiera qu’il s’est mis au trafic parce qu’il ne savait pas quoi faire de son été et qu’il a fini par prendre goût à l’argent facile. « Il fallait jouer un rôle, le rôle du mec viril. »

Capture d'écran du documentaire « Là où tout se joue. Du théâtre dans les tours »

Ego, oisiveté, manque de perspectives… C’est cette parole que les deux femmes recueilleront pendant des semaines et mettront en forme puis en scène.

Mais la vie en cité et ses « aléas » comme le dit l’un d’eux, n’empêche pas d’avoir envie de s’en sortir et d’avoir des rêves comme celui de créer une ferme, de devenir maraicher et pourquoi pas d’accueillir des visiteurs le week-end.

La force du projet, c’est qu’il part de la vie des habitants, de leurs témoignages bruts et qu’il est joué devant les habitants eux-mêmes, à domicile, dans les appartements, « dans les tours », parfois devant les familles, devant des mères émues de découvrir les doutes et les colères de leur garçon. Les choses n’avaient jamais été dites avant, souvent par pudeur.

« C’est bien, c’est naturel, ça enlève les barrages » dit l’une des mamans spectatrices.

« Maintenant on se sent plus intéressant » conclura l’un des garçons.

Capture d'écran du documentaire « Là où tout se joue. Du théâtre dans les tours »

Retrouvez le documentaire « Là où tout se joue. Du théâtre dans les tours » de Julie Chauvin » le 12 août à 21h puis en replay sur notre site internet ici.

Pour aller plus loin

Dans la même thématique

En Seine-Saint-Denis, le théâtre se joue chez les habitants 
4min

Société

« L’état de nos prisons est honteux, c’est immonde », alerte la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté

Dominique Simonnot a alerté sur l’état « immonde » des prisons françaises, en pointant la responsabilité de l’Etat dans une situation « honteuse. » La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté a déploré un discours politique « pas à la hauteur » et a appelé à « vider les prisons » plutôt qu’à en construire.

Le

En Seine-Saint-Denis, le théâtre se joue chez les habitants 
5min

Société

Fast fashion : qu’y a-t-il dans la proposition de loi examinée par le Sénat ?

Adoptée en mars 2024 à l’Assemblée nationale, la proposition de loi visant à réduire « l’impact environnemental de l’industrie textile » est examinée au Sénat ce début de semaine, avant un vote solennel prévu le 10 juin. Un an après le vote des députés, le texte est recentré sur les géants chinois de l’ultra fast fashion, comme Shein et Temu, épargnant désormais certaines entreprises européennes.

Le