Elizabeth II et les médias : « Elle voulait que son peuple puisse avoir ce lien direct avec elle par la télé », raconte Stéphane Bern
La reine Elizabeth II, décédée jeudi après 70 sur le trône britannique, a su utiliser les médias – radio, télévision, puis réseaux sociaux – pour « renforcer le lien avec le peuple, son obsession », selon Stéphane Bern. « Elizabeth II a appris à dompter les médias, tout en restant dans son rôle », souligne le journaliste anglais Alex Taylor.
En s’éteignant, jeudi 8 septembre, à l’âge de 96 ans, après 70 ans de règne, la reine Elizabeth II a laissé derrière elle une trace unique dans l’histoire moderne. Elle a su marquer de son empreinte toute la seconde moitié du XXe siècle et le début du nouveau millénaire. Une importance qui n’est pas seulement due à sa fonction, la place qu’elle a occupée sur le trône britannique, mais aussi à son usage des médias depuis son couronnement, en 1952, et même avant. Radio, surtout télé, puis plus récemment réseaux sociaux, Elizabeth II a su épouser la modernité technologique pour mieux communiquer et resserrer ce rapport si singulier avec son peuple.
« C’était une communicante hors pair, un des secrets de sa longévité »
« Renforcer le lien avec le peuple était son obsession, qu’il n’y ait pas de fossé qui se creuse entre elle et les Britanniques, être en phase avec son peuple », confirme à publicsenat.fr Stéphane Bern, spécialiste de la couronne britannique. « C’était une communicante hors pair. C’est un des secrets de sa longévité et de sa popularité », apprécie Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande.
A 21 ans, celle qui est encore princesse Elizabeth, héritière du trône, prononce un discours à la radio, depuis Le Cap, lors d’un voyage en Afrique du Sud. « Je déclare devant vous tous que ma vie entière, qu’elle soit longue ou courte, sera consacrée à votre service », jure la jeune fille, en s’adressant au Commonwealth.
Durant la guerre, Elizabeth voit son père, le roi George VI, parler directement à la population grâce à la radio. Un lien direct avec la population que la Reine va pousser beaucoup plus loin. « Pendant la guerre, elle a compris très vite l’importance de la radio, puis celle véhiculée par l’image. Elle s’est faite photographier comme mécanicienne », rappelle Stéphane Bern (voir photo ci-dessous). « C’était les balbutiements avec George VI. Comme on l’a vu dans le film « Le discours d’un roi », il appréhendait beaucoup la parole en public », souligne le journaliste anglais Alex Taylor. La faute à de sérieuses difficultés d’élocution. « Lui n’était pas un grand spécialiste des médias. Mais elle le faisait beaucoup plus naturellement. Elizabeth II a appris à dompter les médias, tout en restant dans son rôle, jusqu’à la fin, où elle s’est rendu compte qu’elle pouvait les utiliser, au deuxième degré », estime le journaliste britannique.
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« Lors de son couronnement, elle a porté un rouge à lèvres bleu pour que ses lèvres puissent apparaître sur les télés en noir et blanc »
Quand elle devient reine, en 1953, à l’âge de 25 ans, elle comprend que les temps ont changé. Son couronnement sera diffusé à la télévision, ce nouveau média en plein essor. Mieux : c’est le premier événement diffusé en mondovision (voir vidéo ci-dessous). « C’est elle qui a voulu absolument que son couronnement soit diffusé à la télévision. C’est un moment marquant pour tous les Britanniques. Mes parents ont acheté leur télé pour regarder ça », se souvient Alex Taylor, « contre l’avis de tout le monde, Elizabeth II a imposé ce choix ». Elle sait alors bousculer la monarchie. Non pas à son avantage en réalité, mais bien pour celui de la royauté.
« C’est son mari qui l’avait convaincue d’autoriser les caméras à pénétrer dans le sanctuaire, pour donner aux yeux du monde, et du Commonwealth, ce que représentait cette cérémonie. Elle a accepté. Churchill était contre, mais elle pour », précise Stéphane Bern. Le spécialiste des têtes couronnées raconte qu’elle s’est même « prêtée aux demandes de la télévision, qui était en noir et blanc à l’époque. Elle a ainsi porté un rouge à lèvres bleu pour que ses lèvres puissent apparaître ». « Elle savait très bien jouer de son image. Quand on regarde les films, on voit qu’elle oubliait très vite la caméra », constate l’animateur télé et radio, qui ajoute :
Elle voulait que ça démocratise la mystique royale, que ses sujets, son peuple, puissent avoir ce lien direct avec elle, par les médias et la télé.
La télévision deviendra alors son mode d’expression privilégié pour de longues années. « Elle a très bien su utiliser la télé. Elle en faisait très peu, mais avait le rendez-vous chaque année pour son allocution de Noël, réalisée en une prise. Elle s’adressait au peuple britannique les yeux dans les yeux. Et quand vous regardez ça, depuis 70 ans, c’est un moment que les gens attendaient », se souvient Alex Taylor (voir un extrait du message de Noël 2021, ci-dessous).
« Elle savait qu’il fallait imposer le temps long, avoir une parole rare »
Communiquer, mais avec parcimonie. Elizabeth II a su, à bon escient, être économe dans ses prises de parole. « Elle n’a jamais donné d’interview. Les messages de Noël étaient sa manière de s’exprimer. Et elle n’a pris la parole autrement que trois ou autre fois : après la mort de Diana, la mort de sa mère et lors du covid-19 », ajoute Stéphane Bern.
« C’est un des secrets de sa longévité et de sa popularité. Elle avait cet adage, « never explain, never complain ». Ne jamais se justifier, ne jamais se plaindre, même quand on est attaqué. Elle avait une sorte de distance par rapport aux vicissitudes de l’actualité, à la culture du clash, qui s’est imposé récemment. Elle savait qu’il fallait imposer le temps long, avoir une parole rare, ne pas parler à tort et à travers », souligne Gaspard Gantzer. « Attachée à l’éthique monarchique, elle avait aussi son style, avec ses chapeaux, ses tenues originales », rappelle le dirigeant de Gantzer agency, qui ajoute :
Elle a réussi à inventer un style de communication tout en subtilité, petites touches et parfois humour, ce qui ne gâche rien.
« Une très bonne actrice », avec « beaucoup d’autodérision »
« Elle se mettait beaucoup en scène » également, souligne Alex Taylor, comme lors des Jeux olympiques de Londres, en 2012, où un petit film la montre avec Daniel Craig dans son rôle de James Bond, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture. Depuis le Palais de Buckingham, la reine arrive jusqu’au stade en hélicoptère avec 007. « C’était une très bonne actrice », note le journaliste britannique.
On le constate surtout, plus récemment, quand Elizabeth II se retrouve en tête en tête pour le tea time, avec le célèbre ours Paddington, en juin dernier. « C’était un petit clin d’œil très sympathique, très émouvant » sourit Alex Taylor. Un échange en images de synthèse, plus vrai que nature, où la reine fait de l’humour. Un trait de caractère qu’elle a longtemps gardé pour ses proches. « Elle a eu beaucoup d’autodérision, beaucoup d’humour. Elle riait d’elle-même. C’est très british », apprécie Stéphane Bern.
Le sketch avait été diffusé à l’occasion du concert géant organisé pour son Jubilé de platine. Elle était absente de l’événement, en raison d’une santé déjà fragile. La vidéo avait fait le tour des réseaux sociaux. Buckingham Palace avait, une nouvelle fois, suivi l’apparition de ces nouvelles formes de communication.
« Très tôt, la monarchie britannique s’est mise sur tous les réseaux »
« Très tôt, la monarchie britannique s’est mise sur tous les réseaux », confirme Stéphane Bern, « on lui a trouvé des gants qui lui permettaient de tweeter sur un écran tactile. Elle a aussi été la première à envoyer un mail. Elle pensait qu’il fallait toujours s’adapter aux évolutions de son époque ». Preuve de la nouvelle importance donnée aux réseaux sociaux : en juin 2019, ses services recherchaient un Community manager « pour animer les comptes Twitter, Facebook et Instagram de la reine, pour un salaire de 2.800 euros », racontait BFMTV. Mission : « Trouver de nouvelles façons pour maintenir la présence de la Reine aux yeux du public dans le monde entier ».
Elizabeth II, reine qui a su épouser la modernité ? « Oui, tout en refusant de sombrer dans le tout spectacle et le tout numérique de l’époque », selon Gazpar Gantzer. « Je ne sais pas si son souci c’était d’être moderne. Mais plutôt d’être visible, d’être vue », tempère Alex Taylor.
« C’est comme la maman. On attendait qu’elle parle, quand il y avait une crise »
Pouvoir garder ce lien privilégié et être, jusqu’au bout, la mère de toute la Nation. C’est ce qui importait, au fond, à Elizabeth II, présente dans les moments importants ou difficiles, comme lors de la crise du covid-19, en avril 2020. Stéphane Bern : « C’est comme la maman. On attendait qu’elle parle, quand il y avait une crise ».
Que ce soit sur via la BBC, média qui aura accompagné tout son règne, jusqu’à l’annonce de sa mort, ou les réseaux sociaux, elle s’adresse à ses sujets dans ce moment douloureux. « We will meet again », conclut the Queen. Une référence à la chanson de 1939 de Vera Lynn. « Elle a su faire passer des messages, comme pendant le covid, en citant cette chanson de la seconde guerre mondiale », salue Alex Taylor. Lié à la bataille d’Angleterre, le morceau occupe dans l’imaginaire britannique une place à part, synonyme d’espoir.
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