Suite à trois recours déposés contre le choc des savoirs, dont un par la sénatrice écologiste Monique de Marco, le rapporteur public du Conseil d’Etat demande d’annuler la mise en place des groupes de niveau au collège, soit le cœur de la réforme portée par Gabriel Attal. S’il faut encore attendre la décision du Conseil d’Etat, son avis pourrait être suivi.
Elisabeth Borne demande aux ministres de supprimer WhatsApp, Signal et Telegram de leurs téléphones et d’utiliser Olvid
Par Adrien Pain
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Il ne leur reste que quelques jours aux ministres pour changer radicalement leurs habitudes numériques. Une circulaire du 22 novembre, révélée par Le Point, invite les ministres et leurs cabinets à se séparer des « principales applications de messagerie instantanée grand public », qui « occupent une place grandissante dans nos communications », mais « ne sont pas dénuées de failles de sécurité ».
La Première ministre préconise de se tourner à la place vers la messagerie d’Olvid, une start-up parisienne créée en 2019 par des experts français en cybersécurité. Sur X, Jean-Noël Barrot, le ministre délégué au Numérique, la qualifie même de « messagerie instantanée la plus sûre du monde ».
Pour l’installation de l’application, rien de complexe, elle est disponible sur l’App Store ou Google Play. La première ouverture de l’application surprend presque. A la différence des autres messageries sécurisées, Olvid ne demande ni numéro de téléphone, ni adresse mail pour assurer une sécurisation optimale des conversations. Il n’y a même pas besoin de carte SIM pour faire fonctionner l’application, et il est possible d’y créer une infinité de profils. C’est pour ajouter des contacts que le processus se corse. Il faut recréer ses contacts un par un en scannant un QR code sur l’appareil de la personne que nous souhaitons ajouter ou par un code à quatre chiffres.
Un mode de communication encore loin d’être généralisé. Le cofondateur d’Olvid, Cédric Sylvestre, affirme ne compter que « 100 000 utilisateurs » pour le moment. A titre de comparaison, WhatsApp en cumule 42 millions dans l’Hexagone.
Si cette nouvelle obligation ne s’adresse qu’à l’exécutif, elle concerne aussi indirectement les parlementaires et leurs collaborateurs qui échangent régulièrement avec le gouvernement.
« C’est bien beau de changer de système, mais il va bien falloir communiquer avec eux », plaisante Loïc Hervé, sénateur centriste de la Haute-Savoie et membre de la CNIL, bien que très favorable à ce système plus sécurisé. Il évoque un « enjeu de sécurité nationale, d’autant plus qu’il y a déjà eu les MacronLeaks ». Malgré un « côté vieillot » et presque « médiéval » de ces modes de communication, le sénateur fait déjà usage d’Olvid depuis quelques mois, tout comme son collègue socialiste Mickaël Vallet (PS), membre du groupe Numérique du Sénat.
« On est bien obligés de faire confiance. Nous ne sommes pas spécialistes des algorithmes. Nous voyons d’abord l’aspect et l’ergonomie avant de nous interroger sur le type de données qui sont collectés », déclare le sénateur de la Charente-Maritime.
La seule messagerie instantanée certifiée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information
Depuis septembre 2020, l’application est la seule messagerie instantanée certifiée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi). Le RAID, unité de la Police nationale française, a même annoncé en 2022 avoir adopté Olvid depuis plus d’un an pour les communications entre l’ensemble de ses membres.
Il n’a pas été précisé si Emmanuel Macron allait lui aussi utiliser Olvid. Depuis la campagne présidentielle de 2017, l’entourage d’Emmanuel Macron a rapporté qu’il était un utilisateur fréquent de l’application russe Telegram.
La justification avancée par le gouvernement pour imposer Olvid ne contente pas les autres messageries instantanées. La présidente Signal, Meredith Whittaker, a accusé jeudi l’exécutif français de désinformation : « Je suis inquiète que la Première ministre française invoque des « failles de sécurité » dans Signal (et autres) pour justifier cette décision. Cette affirmation n’est étayée par aucune preuve et est dangereusement trompeuse, en particulier venant d’un gouvernement. Si vous voulez avoir recours à une application française, faites-le ! Mais ne répandez pas de fausses informations en route. », a-t-elle affirmé sur X.
En mars, le gouvernement avait déjà banni l’usage d’applications « récréatives » aux fonctionnaires d’Etat sur les appareils de travail. Parmi elles : les réseaux sociaux TikTok, Instagram ou encore… Candy Crush et Netflix.
« Je ne fais pas plus confiance à WhatsApp qu’à TikTok », confie le sénateur Michaël Vallet qui avait présidé cette année une commission d’enquête sur TikTok dont le rapporteur était Claude Malhuret. Dans les recommandations du rapport publiées en juillet, figure notamment « élargir l’interdiction de TikTok aux personnels […] devant jouer un rôle important en cas de crise ».
Mickaël Vallet se dit optimiste au sujet de l’avenir d’Olvid : « C’est un excellent message envoyé par l’administration française. Cela va faire un effet boule de neige. »
« Le gouvernement doit être intraitable sur la question de la protection des données », exige Franck Montaugé, sénateur socialiste du Gers et vice-président du groupe Numérique du Sénat, encore plus quand « l’avènement de l’informatique quantique est très lourd de conséquence pour le cryptage mais aussi la rapidité de calcul en matière de décryptage ».
« Cela permet de faire émerger nos propres entreprises »
Derrière la volonté d’une cybersécurité renforcée, il y a aussi la perspective d’une « avancée vers une plus grande souveraineté française » d’après Matignon. Sur France Info, le ministre délégué au Numérique, Jean-Noël Barrot a indiqué jeudi dernier : « Il faut toujours se tourner vers les solutions issues de nos systèmes d’innovation. C’est la meilleure manière de garantir la souveraineté et l’autonomie stratégique de la France. »
Le sénateur LR Patrick Chaize, membre du Conseil national du numérique, se réjouit de cette obligation d’Olvid au gouvernement : « Cela permet de faire émerger nos propres entreprises. » En 2020, Qwant, était par exemple devenu le moteur de recherche par défaut dans l’administration française.
Elisabeth Borne appelle ses collaborateurs à aussi utiliser davantage Tchap, la messagerie réservée aux agents de la fonction publique.
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