Crèches : ce rapport du Sénat qui épingle la faiblesse des contrôles
Dans un rapport rendu public ce jeudi 20 mars, le Sénat alerte sur le manque de moyens des organismes chargés d’évaluer les structures d’accueil des jeunes enfants. Les élus évoquent des contrôles souvent techniques et parcellaires, qui ne permettent pas toujours d’identifier les signaux de maltraitance, ni de s’assurer du bon emploi des deniers publics.
Les alertes en direction des crèches se sont multipliées ces deux dernières années. Depuis le rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), faisant suite à l’empoisonnement d’un bébé dans un établissement lyonnais en juin 2022, jusqu’à la commission d’enquête lancée l’année dernière par l’Assemblée nationale sur le modèle de financement des structures d’accueil. Une commission qui a abouti à l’ouverture d’une information judiciaire pour parjure à l’encontre d’Aurore Berger, ex-ministre des Familles, suite aux révélations de Victor Castanet dans son livre Les Ogres. C’est d’ailleurs l’audition au Sénat du journaliste d’investigation, en septembre dernier, qui a poussé la Chambre haute à se saisir à son tour de ce sujet, avec l’ouverture d’une mission d’information sur « l’efficacité du contrôle des établissements d’accueil du jeune enfant et ses éventuelles défaillances ».
En clair : « Quels moyens avons-nous en France pour garantir aux familles que les établissements sont bien tenus ? », a résumé ce jeudi 20 mars le sénateur LR Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales, à l’occasion de la présentation du rapport de la mission. Dans leurs travaux, les élus épinglent le manque d’effectifs, une situation qui peut sembler paradoxal au vu de la multiplication des organismes de contrôle sur le terrain, mais aussi les nombreuses disparités qui existent d’un département à l’autre en l’absence de pilotage global. Ils formulent 15 recommandations pour redresser la situation.
Des contrôles insuffisants, faute de personnels
Actuellement, trois entités sont chargées des actions de contrôle. À l’échelon départemental, on trouve les Caisses d’allocations familiales (CAF), qui veillent au contrôle financier et comptable, et la Protection maternelle et infantile (PMI), centrée sur la qualité du service, qui délivre les autorisations d’ouverture, s’assure du respect des normes de sécurité et des règles d’encadrement. Enfin, au niveau national, les services de l’Etat peuvent procéder à des contrôles supplémentaires, notamment en cas de défaillance.
En 2023, sur 13 028 crèches qui reçoivent une aide de fonctionnement, la CAF n’a pu en contrôler que 2 241, soit un peu plus de 17 % des établissements. 167 fonctionnaires sont affiliés à temps plein aux missions de contrôle pour l’ensemble du territoire, ce qui laisse craindre aux sénateurs « une baisse de la fréquence et de la qualité des contrôles », alors que le gouvernement souhaite atteindre les 200 000 places ouvertes d’ici 2030.
Cette situation apparaît encore plus prégnante du côté de la Protection maternelle et infantile, même s’il n’existe pas de données au niveau national sur la fréquence des contrôles effectués par ce service. « Entre le suivi des ouvertures de crèches et les signalements, il semble n’y ait plus le temps pour le contrôle ordinaire », déplore la sénatrice LR Laurence Muller-Bronn, l’une des trois co-auteurs du rapport. « Enfin, nous n’avons pu que constater la quasi-invisibilité des services de l’Etat sur le terrain. »
Pour résorber ces difficultés, outre le renforcement des effectifs, les sénateurs proposent d’agréer des organismes tiers pour procéder à certaines évaluations. « Ils n’auront pas de pouvoir de sanction, mais les services pourront prendre des décisions sur la base de leurs rapports », précise le sénateur Union centriste Olivier Henno.
Des évaluations trop disparates
Les élus regrettent également l’aspect « hygiéniste » des contrôles, davantage centrés sur le respect des normes de sécurité que sur la dimension humaine de l’accueil des enfants. La CAF, par exemple, procède à un contrôle « majoritairement perçu comme technique et administratif », lit-on dans le rapport, même si les caisses ont introduit certains éléments d’évaluation, comme l’analyse de postes de dépenses particuliers, tels que l’achat de nourriture ou de couches, qui permettent de déceler « des signaux faibles » de risque de négligence. « Il est temps de passer d’un contrôle centré sur l’hygiène et la sécurité à un accompagnement des équipes, en résumé d’un contrôle sanction à un contrôle d’évaluation », résume Olivier Henno.
Par ailleurs, la nature même de ces contrôles peut varier d’un territoire à l’autre. « Une interprétation des règles très variables entre les départements, voire en fonction des contrôleurs, entraîne parfois des impacts opérationnels importants pour les gestionnaires », relève le rapport. « Uns structure s’est vu obliger de changer tous ces matelas au prétexte qu’ils n’étaient pas – je cite – ‘assez fermes’ », rapporte Olivier Henno.
Afin d’uniformiser ces contrôles, les parlementaires préconisent la mise en place d’une grille nationale de contrôle, « composée d’éléments objectivables ». Il est également question de mettre en place une plateforme nationale d’échanges d’informations entre les services de protection maternelle et infantile, afin d’uniformiser les pratiques et d’identifier plus facilement les éléments à risque. « Un opérateur peut très bien être inconnu dans un département et avoir un historique négatif dans un autre », explicite Laurence Muller-Bronn.
Se donner les moyens du contrôle financier
Enfin, la question du financement, sans être frontalement abordée par les élus qui n’ont pas voulu empiéter sur les travaux déjà conduits par l’Assemblée nationale, transparaît largement en filigrane de leur rapport. Quelque 7,6 milliards d’euros ont été injectés par la puissance publique dans les crèches en 2023, selon les chiffres du Sénat. Pour autant, les juridictions financières n’ont pas les moyens de s’assurer de la bonne utilisation de cette manne, supposée ne servir qu’à l’amélioration de la qualité d’accueil.
« Concernant les groupes de crèches privés par lesquels les scandales sont arrivés, il nous paraît essentiel, au regard de l’ampleur des financements publics dans le secteur, de renforcer les outils à disposition des autorités publiques. Par exemple, le groupe Les Petits Chaperons Rouges a indiqué que les financements publics de la CAF représentaient 28 % de son chiffre d’affaires », pointe la rapporteure socialiste Émilienne Poumirol. « Pour avoir géré pendant plus de vingt ans des crèches, et savoir combien cela coûte, je n’arrive pas à comprendre comment ces groupes arrivent à faire du bénéfice », ajoute cette médecin de formation, qui a été maire de Donneville en Haute-Garonne pendant plus de 25 ans.
Actuellement, l’Igas s’est lancée dans une série de contrôles des principaux acteurs du secteur. Si les parlementaires souhaitent attendre les résultats de ces enquêtes avant de se prononcer sur un renforcement de la législation sur les prises de participation au capital des entreprises de crèches, ils préconisent d’ores et déjà d’élargir les prérogatives de la Cour des comptes. Il s’agit de permettre aux Sages de la rue Cambon de contrôler les groupes privés, sur le modèle de ce qui existe déjà pour les gestionnaires d’Ehpad.
Au total, la mission d’information aura procédé à une trentaine d’auditions pour mener à terme ses travaux. Désormais, les sénateurs espèrent donner suite à leurs recommandations sous la forme d’une proposition de loi transpartisane. Elle pourrait être déposée sur le bureau de la Haute assemblée d’ici six mois.
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