Coronavirus : « Actuellement, je travaille avec un masque du BTP », une infirmière libérale raconte son quotidien

Coronavirus : « Actuellement, je travaille avec un masque du BTP », une infirmière libérale raconte son quotidien

« On côtoie chaque jour des personnes atteintes du covid… Des personnes inquiètes qu’il faut soigner mais aussi rassurer ». Depuis plusieurs semaines déjà, elle a vu son activité professionnelle mais aussi sa vie et celle de ses patients transformés avec la pandémie de Coronavirus. Rencontre avec Nathalie Delachapelle, infirmière libérale à Agnetz dans l’Oise.
Marie Lebon

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

200323-mavieconfinee.jpg

Répondre aux inquiétudes des patients de jour comme de nuit

Après une journée de travail, Nathalie Delachapelle évoque son quotidien à l’heure de la pandémie.
Un quotidien qu’il a fallu adapter aux contraintes de la maladie à laquelle elle est confrontée chaque jour lors de ses visites à domicile. Un métier, celui d’infirmière libérale, qu’elle a dû « réinventer ».

« Cette nuit, j’ai été réveillée par l’appel d’un patient inquiet, au lieu d’appeler les urgences ou le Samu, c’est à moi qu’il a pensé car il me connaît bien. Il ne respirait pas bien, ne savait pas quoi faire. Après cela, je n’ai pas réussi à me rendormir ».

Être disponible le jour mais aussi parfois la nuit, pour la soignante la pandémie de coronavirus a décuplé les inquiétudes des malades, ceux atteints du covid mais aussi les autres. Elle explique : « En ce moment, il y a un fort afflux de patients en forte détresse psychologique ». Des patients qui parfois sortent de l’hôpital et ont besoin d’accompagnement médical mais aussi d’explication, d’autres, souvent âgés que le confinement isole encore d’avantage.

Nathalie Delachapelle infirmière libérale dans l'Oise équipée pour rendre visite à ses patients

 

Conserver un lien malgré la distanciation et les précautions à prendre 

« Un matin, je suis arrivée chez une dame de 90 ans qui m’avait préparé des crêpes… Elle me dit : tu viens déguisée, comme pour le Carnaval alors je te fais des crêpes ». L’anecdote fait sourire mais elle montre aussi le lien qui unit patient et soignant

Mais à virus exceptionnel, dispositif exceptionnel, masque, surblouse, charlotte sur la tête et éventuellement surchaussures, pour assurer ses consultations, Nathalie s’équipe et explique « c’est une autre façon de travailler qu’il a fallu expliquer, quand je suis chez quelqu’un maintenant, je ne peux plus m’asseoir, je ne touche à rien, je ne m’approche pas trop et mes mains sont protégées par des gants. Et ces crêpes, je n’ai même pas pu les manger avec elle car je ne peux pas enlever mon masque pendant les consultations ».
 

Le matériel de Nathalie Delachapelle organisé dans son coffre de voiture pour prendre en charge ses patients en minimisant les risques


Être en première ligne avec un petit goût amer… celui de l’abandon

Pour les soignants libéraux, infirmiers et médecins à domicile, il faut donc gérer depuis les premiers cas de coronavirus des situations « stressantes » et remédier à certains manques comme le souligne Nathalie Delachapelle.
Les spécialistes, pédicures ou kinésithérapeutes, non plus le droit se déplacer chez les gens, donc il faut prendre le relais quand cela est possible.
Ainsi, quand elle vient pour prodiguer ses soins, l’infirmière fait faire, quelques pas à une personne âgée à qui on a mis une prothèse de hanche juste avant le confinement, privée de rééducation.
Pour Nathalie Delachapelle tout cela « accentue la souffrance », qu’elle et certaines de ses collègues ressentent : « celle de ne pas être reconnu à leur juste valeur par les autorités. D’être de plus en plus invisible ».

Penser à l’après avec difficulté

Pour la soignante, près de trois après le début de l’épidémie en France, beaucoup de choses manquent encore pour permettre aux personnels de santé libéraux de travailler dans les meilleures conditions. « Bien sûr, donner du matériel à tout le monde en même temps, hôpitaux, libéraux, c’est n’est pas possible, mais quand même… concernant les masques, par exemple, on a l’impression bizarre que le gouvernement a passé des commandes qui mettent beaucoup de temps à arriver et le temps presse ».
Cette semaine, elle a reçu pour dotation 6 masques FPP2 et 12 masques chirurgicaux… « insuffisant quand on côtoie des covid toute la journée »

 

La dotation pour une semaine 6 masques FFP2 et 12 masques chirurgicaux


Alors pour le reste, Nathalie Delachapelle a recours à la solidarité de ceux qui l’entourent, professionnels du bâtiment, peintre, particuliers qui fouillent dans les caves et les greniers… « Actuellement, je travaille avec un masque du BTP ».

Alors quand on lui parle de déconfinement, elle reste prudente. « Pour moi impossible de me projeter sur le déconfinement, nous manquons déjà de matériels, alors comment les gens vont-ils faire pour sortir, emmener les enfants à l’école… » 

Dans la même thématique

Coronavirus : « Actuellement, je travaille avec un masque du BTP », une infirmière libérale raconte son quotidien
8min

Société

Définition pénale du viol : « Le droit français n’est plus adapté »

La délégation aux droits des femmes du Sénat organisait une matinée de débat autour de l’opportunité d’introduire la notion de consentement dans la définition pénale du viol. Pour la majorité des intervenants, cette notion est partout dans l’enquête et dans la procédure, sauf dans la loi.

Le

PARIS: Murs en miroirs pour dissimuler les travaux de la Fondation Cartier
3min

Société

[Info Public Sénat] Le rapporteur public du Conseil d’Etat demande l’« annulation » des groupes de niveau au collège

Suite à trois recours déposés contre le choc des savoirs, dont un par la sénatrice écologiste Monique de Marco, le rapporteur public du Conseil d’Etat demande d’annuler la mise en place des groupes de niveau au collège, soit le cœur de la réforme portée par Gabriel Attal. S’il faut encore attendre la décision du Conseil d’Etat, son avis pourrait être suivi.

Le

Coronavirus : « Actuellement, je travaille avec un masque du BTP », une infirmière libérale raconte son quotidien
3min

Société

« Bruno Retailleau a eu tort de parler de suppression des aides sociales » en cas de condamnation, assure Marie-Arlette Carlotti

Ce mardi, Marie-Arlette Carlotti, sénatrice socialiste des Bouches-du-Rhône, était invité de la matinale de Public Sénat. Membre de la commission d’enquête sur le narcotrafic, elle est revenue sur les mesures présentées vendredi dernier par Bruno Retailleau et Didier Migaud dans le cadre de leur plan de lutte contre le trafic de drogue.

Le