C’est désormais au tour Sénat de se prononcer. Après des débats chaotiques à l’Assemblée nationale la semaine dernière, le projet de loi « de veille et de sécurité sanitaire » va être soumis aux sénateurs ce 20 juillet en séance publique. Remanié en commission des lois hier, à travers l’adoption des amendements du rapporteur Philippe Bas (LR), le texte comporte a réintroduit la possibilité d’exiger un passe sanitaire aux frontières. L’article 2 avait été supprimé par une agrégation de plusieurs députés d’opposition.
Les sénateurs ont souhaité conserver une possibilité de protéger les frontières, mais avec des conditions « claires ». « S’il apparaît dans le monde, dans un pays donné, un variant extrêmement dangereux, nous voulons pouvoir filtrer les voyageurs au départ des avions en provenance de ces pays. Nous permettrons au gouvernement de leur demander un test », explique Philippe Bas. Un test négatif est considéré par le sénateur comme le « document le plus fiable sanitairement », là où le projet de loi initial prévoyait aussi la possibilité de présenter une attestation de vaccination. Le texte adopté par la commission des lois prévoit un dispositif similaire pour les outre-mer, en cas de saturation des hôpitaux. « Si le gouvernement avait circonscrit de la manière la plus stricte les dispositions prévues pour la protection aux frontières et la protection des outre-mer il n’aurait pas eu de difficultés à l’Assemblée nationale », glisse au passage Philippe Bas.
Une « abrogation » du régime de l’état d’urgence sanitaire
Si les sénateurs sont donc revenus sur la suppression de l’article 2, ils ont également voulu lever toute ambiguïté et éviter tout risque d’une survie de l’état d’urgence sanitaire dans le droit, sur lequel le gouvernement prévoyait une extinction implicite. « Le mot-clé du travail que nous avons fait, c’est abrogation. Le gouvernement n’abrogeait pas les dispositifs qui permettent le confinement, le couvre-feu, le passe sanitaire, le passe vaccinal. Nous les abrogeons, ils ne pourront pas être rétablis par une simple phrase au détour d’une loi », défend Philippe Bas.
Une autre modification notable différencie le texte sorti de la commission des lois du Sénat : un nouvel article, créé par l’adoption de l’amendement du rapporteur, esquisse un début de perspective pour les soignants suspendus pour ne pas s’être vaccinés contre le covid-19. Pour Philippe Bas, il faut déterminer les conditions de leur retour, ces personnels étant suspendus, et non licenciés. « Il n’y avait pas de procédure, le gouvernement avait un pouvoir discrétionnaire, il faisait ce qu’il voulait par un simple décret. Nous disons non. » Il reviendra à la Haute autorité de santé, saisie par le gouvernement ou le Parlement, de prendre la décision. « Il faut une constatation médicale […] c’est le critère médical qui doit être pris en compte », précise le sénateur Philippe Bas.
« C’est seulement quand ce sera plus médicalement nécessaire que nous pourrons réintégrer des personnels »
Face à l’introduction de ce débat, l’Académie de médecine a fait savoir qu’elle s’opposait « fermement » à la réintégration des personnes suspendues. Des médecins sont également montés au créneau pour dénoncer le signal politique envoyé par le rapporteur Philippe Bas et la majorité sénatoriale. « Le rapporteur a choisi de flatter les antivax pour des raisons internes au groupe LR », dénonçait hier le docteur Bernard Jomier, sénateur membre du groupe socialiste, écologiste et républicain. Pas de quoi déstabiliser le rapporteur. « Tout le monde est d’accord sur le fait que tant que c’est médicalement nécessaire, il faut que les soignants qui sont en exercice soient vaccinés. C’est seulement quand ce ne sera plus médicalement nécessaire que nous pourrons réintégrer des personnels. »
Après l’examen au Sénat ce 20 juillet, députés et sénateurs devront trouver un terrain d’entente, lors d’une commission mixte paritaire organisée demain, 21 juillet.